MIP

L’histoire du trophée MIP

Le « Most Improved Player », plus communément appelé « MIP », est un des trophées remis en fin de saison par la NBA. Il récompense le joueur ayant le plus progressé. Ce trophée est celui qui raconte sans doute la plus belle histoire chaque saison. Un joueur sorti de nul part ? Un trade bénéfique ? Plus de responsabilité ? Ou même une explosion statistique dans la même équipe ? Tout les profils y sont passés. Le storytelling est aussi essentiel pour créer l’engouement nécessaire à l’attribution du MIP.

Les critères « officieux » d’attribution

Comme pour chaque trophée, aucun critère officiel n’existe vraiment pour son obtention. C’est donc le peuple qui a vulgairement défini ce qu’il fallait pour être l’élu, et historiquement, les votants se rapprochent fortement du vote populaire.

Voici les critères :

  • Augmentation de minutes jouées
  • Progression statistique significative
  • Nouveau rôle/Nouvelle(s) responsabilité(s)
  • All-Star/Niveau All-Star
  • Storytelling

Lors des débats tonitruants pour choisir SA pépite de l’année, ce sont ces critères qui reviennent le plus. Ajoutez à cela un peu de magie en racontant LA raison qui permet à votre favori de passer devant la concurrence et vous obtenez un vrai scénario hollywoodien. Et ce ne sont pas les 100 journalistes chargés d’auréoler un des nombreux NBAers qui diront le contraire.

L’histoire

Vous la voyez arriver la belle histoire ? Oui.

Attribué depuis la saison 1985-86 et inauguré par Alvin Robertson, ce trophée a déjà fait 38 heureux. Comme écrit en préambule, ce trophée raconte certainement les plus belles histoires de la saison. En témoigne le dernier vainqueur en la personne de Lauri Markkanen. Après un plutôt bon début de carrière du côté de Chicago mais avec une utilisation posant question, le finlandais se voit échangé à Cleveland. Repositionné au poste 3, il profite de la bonne saison des Cavaliers menés par Garland pour affirmer ses qualités. Mais à l’été 2022, deux événements surviennent : sa magnifique performance lors du FIBA EuroBasket avec la Finlande et son trade chez le Utah Jazz.

Lauri Markkanen explose. Dans la continuité de son Euro, le Finlandais nous gratifie d’une superbe saison !

25.6 points (+10.8)
8.6 rebonds (+2.9)
49.9% aux tirs (+5.4%)
39.1% à 3pts (+3.3%)
64% TS (+5.8%)
110 TS+ (+7)
26.6% USG (+7.1%)

Devenu l’option numéro 1 de son équipe, Markkanen à assuré. Plus de responsabilités pourrait amener à être mis sous pression, le focus défensif étant sur soi. Mais les pourcentages n’ont pas flanchés, au contraire, ils se sont améliorés ! Il sera récompensé par une sélection au All-Star Game.

Lauri Markkanen

Je repense à Victor Oladipo ou à Brandon Ingram qui possèdent des histoires similaires. Également Boris Diaw, qui lui n’a cependant pas été confié au match des étoiles… mais quelle saison !

Voici donc une manière de décrocher le graal. Mais la plupart du temps, c’est une évolution en interne qui se manifeste. Un autre exemple récent avec Julius Randle. Arrivé chez les New-York Knicks en 2019 pour entamé sa 6ème saison dans la grande ligue, l’ailier fort finira celle-ci à la 12ème place de la conférence. Il compilera 19.5 points, 9.7 rebonds, 3.1 passes décisives à 46% aux tirs et 27.7% de loin.

Un simple changement de coach lors de la saison suivante lui permettra d’atteindre un niveau de jeu plus vu chez les New-yorkais depuis Carmelo Anthony. 24.1 points, 10.2 rebonds, 6 passes décisives ! Même les pourcentages sont en hausses : 41.1% à 3pts, soit une évolution de 13.4% sur un volume encore plus grand. Il réussira à emmener son équipe à la 4ème place de la conférence Est. Et pour couronner le tout, Randle sera récompensé d’une sélection All-Star et All-NBA.

Julius Randle

Ce storytelling pour être élu MIP est le plus classique. La plupart des 38 lauréats ont procédé de la même manière : l’évolution interne. Changement de coach, star qui s’en va, nouveau projet autour de soi… tout ces chemins existent pour devenir, même qu’une seule saison, le chouchou du public. Et même de toute la NBA.

Cas particuliers

Il y a un critère très officieux que je n’ai pas cité jusqu’ici : l’interdiction aux sophomores.

En effet, selon l’opinion publique, il serait contre-nature d’élire un sophomore MIP car la logique voudrait une évolution suite à sa saison rookie, tant dans les statistiques que dans les responsabilités. Ce trophée devrait être réservé à un joueur sortant un peu de nulle part… vous en pensez quoi ? Vous qui lisez ceci ?

Pourtant, déjà 6 joueurs ont été élus dans ces conditions, notamment au début de la création du trophée :

  • Alvin Robertson, 1985-86. Date de création du MIP
  • Kevin Johnson, 1988-89
  • Rony Seikaly, 1989-90
  • Don MacLean, 1993-94
  • Gilbert Arenas, 2002-03
  • Monta Ellis, 2006-07

Mais petit à petit, l’argument interdisant l’accession à ce trophée pour les sophomores semblent entrer dans les mœurs.

Il suffit de voir les réactions qu’ont suscité les saisons sophomores de Desmond Bane et Devonte’ Graham récemment par exemple. Ils ont bien sûr reçu des votes, leur saison respectives en méritant. Tous ne sont pas unanimes sur ce « critère » très partagé au sein des débats. Lors de la saison 2021-22, c’est le coéquipier de Bane, Ja Morant, qui a été choisi par les 100 journalistes désignés par la NBA pour déclarer un vainqueur.

Classement du trophée MIP 2021-22

Historiquement, le trophée de MIP est attribué à des joueurs non-concernés par la course au MVP. Kevin Johnson et Tracy McGrady, lors des saisons 1988-89 et 2000-01, ont respectivement fini à la 8ème et 6ème place de cette course là. Entre 1985 et 2016, ils ont été les seuls à finir dans le Top 10 au classement du MVP. Mais depuis la saison 2016-17, ce phénomène prend de l’ampleur.

  • Giannis Antetokounmpo en 2016-17, 7ème
  • Julius Randle en 2020-21, 8ème
  • Ja Morant en 2021-22, 8ème

En l’espace de sept ans, trois joueurs se hissant dans le classement du MVP ont été auréolé du titre de MIP. On pourrait même rajouter Victor Oladipo, finissant 13ème en 2018.

Un autre joueur, et non des moindres, aurait pu se rajouter à cette liste. Il s’agit de Shai Gilgeous-Alexander. Fort de sa saison 2022-23, le joueur d’Oklahoma était pour un bon nombre de fans et d’analystes le favori pour le trophée George Mikan (nouveau nom du MIP depuis la saison dernière).

Classement du trophée MIP 2022-23

Shai est lui aussi concerné par cette tendance et finira à la 5ème place du classement MVP. Il est aussi choisi pour intégrer la All-NBA First Team.

Les différents paliers d’évolution

Mais alors, que lui a t-il manqué pour être l’élu ? Un « retour en source » des votants ? Ou tout simplement une meilleure progression de Markkanen d’une année à l’autre ? Difficile à dire. Lors de la saison 2022-23, Shai a réussi à franchir l’étape la plus compliquée pour tout basketteur : passer du niveau de All-Star à celui de Superstar.

Shai en 2021-22 :

56 matchs, 34.7 minutes/match

24.5 PTS | 5 RBD | 5.9 AST
1.3 STL | 0.8 BLK | 2.8 TOV

45.3% | 30% à 3pts | 81% LFs
98 TS+ | 33% USG

Shai en 2022-23 :

68 matchs, 35.5 minutes/match

31.4 PTS | 4.8 RBD | 5.5 AST
1.6 STL | 1 BLK | 2.8 TOV

51% | 34.5% à 3pts | 90.5% LFs
108 TS+ | 34.5% USG

Une évolution fulgurante qui justifie à présent son nouveau statut dans la grande ligue.

Selon moi, les paliers d’évolution sont ceux-ci :

Banc => Titulaire (role player) / Role player => Joueur responsabilisé / Joueur responsabilisé => Niveau All-Star / Niveau All-Star => Superstar

Plus le palier est haut, plus la difficulté augmente.

Mais alors, à quel point doit t-on valoriser cela dans l’attribution du trophée de MIP ? Il n’y a pas de réponse claire, mais la tendance commence à se tourner vers une meilleure considération de la dernière étape, celle franchie par Shai Gilgeous-Alexander (malgré le fait qu’il ne l’ai pas remporté) et Ja Morant récemment.

Qui décrochera le Graal cette saison ?

Comme chaque année, la bataille sera rude pour l’obtention du fameux trophée. Entre les favoris qui ont le contexte parfait pour décoller, les joueurs qui défoncent tout sans prévenir, les bons joueurs qui deviennent de très bons joueurs et les sophomores qui progressent à vitesse en grand V, il y a le choix.

Zoom sur les gros dossiers de la saison 2023-24 :

Tyrese Maxey

Nouveau contexte pour le guard des 76ers. Avec le départ de James Harden, Maxey est repositionné au poste de meneur de jeu où il excelle en ce début de saison. Cantonné essentiellement à un rôle de finisseur d’action l’an passé, il crée cette saison davantage ses tirs (43% de paniers assistés contre 55% la saison dernière).

ASTD% = Pourcentage de panier assisté

Ses augmentations statistiques les plus significatives :

38.4 minutes/match (+4.8min)
26.9 points (+6.6)
4.4 rebonds (+1.5)
6.7 passes décisives (+3.2)
20.2 tirs/match (+5)
5.4 lancers francs provoqués/match (+1.8)
90.3% aux lancers francs (+5.8%)

Le favori ? Peut-être. Tyrese Maxey sera logiquement élu All-Star, un argument de plus pour lui.

Scottie Barnes

Nouveau coach, nouveau rôle pour le ROY 2021. Cette saison, le meneur-ailier est davantage responsabilisé par son entraîneur Darko Rajaković avec plus de ballons dans les mains pour créer le jeu. Son adresse est en hausse, on le sent libéré. Scottie Barnes rend la pareille à son coach en défendant encore plus dur que le saison passée. En témoigne ce tableau : à son poste, c’est l’un des meilleurs !Tout les voyants sont aux verts (ou plutôt au orange*). Contre, interception, faute commise, rebond offensif, défensif. Il fait tout.

*Les colonnes colorées correspondent au « centile ». C’est à dire l’efficacité du joueur relatif à son poste. 100 étant le meilleur, 1 le moins bon.

Efficacité défensive de Scottie Barnes

Ses augmentations statistiques les plus significatives :

19.2 points (+4.9)
9.1 rebonds (+4.5)
1.7 interceptions (+0.6)
1.3 contres (+0.5)
5.2 tentatives à 3pts (+2.3)
37.6% à 3pts (+9.5%)
23.2% d’usage (+3.2%)

Avec le même temps de jeu, Scottie est bien plus efficace des deux cotés du terrain. Plus de défense et le même nombre de fautes que la saison dernière. MIP ?

MIP
Alperen Şengün

Alerte franchise player dans le Texas. Les Houston Rockets ont enfin trouvé la pièce centrale de leur projet. Exit Jalen Green ou encore Jabari Smith, c’est bien le turc qui prend les reines. Şengün est devenu en peu de temps la plaque tournante de l’attaque d’Ime Udoka. En effet, il possède une création offensive folle pour sa taille.

Statistique offensive d’Alperen Şengün

Ses augmentations statistiques les plus significatives :

32.8 minutes/match (+3.9)
21 points (+6.2)
15.8 tirs/match (+5.1)
5.6 passes décisives (+1.7)
27.6% AST (+7.6%)*
12.9% de pertes de balles (-3.9%)
27.4% d’usage (+6.3) 

*Correspond au % d’assist de Şengün relatif à celui de l’équipe lorsque le joueur est sur le terrain. Ici, plus d’une passe décisive sur quatre est faite par Şengün lorsque il est en jeu.

Et si le surnom de « Mini-Jokic » n’était pas usurpé ?

MIP
Jalen Johnson

Place maintenant à l’ailier-fort d’Atlanta. Débarrassé de son concurrent principal John Collins, « double J » est intégré dans le 5 majeur cette saison par Quin Snyder. Voilà ici un dossier intéressant, différent des trois précédents. 70 matchs joués l’année dernière, uniquement 6 en tant que titulaire. Les plus experts le connaissent sûrement déjà, mais c’est bien cette saison qu’il se fera un nom.

Adresse aux tirs par zone du terrain

Ses augmentations statistiques les plus significatives :

29.9 minutes/match (+15)
14.1 points (+8.5)
7.3 rebonds (+3.3)
2.4 passes décisives (+1.2)
1.1 interceptions (+0.6)
1 contre (+0.5)
9.5 tirs/match (+4.9)
59.5% aux tirs (+10.3%)
42.5% à 3 points (+13.7%)
67.3% TS (+11.9%)

C’est simple. Avec Jalen Johnson, vous faites x2 à quasiment toutes ses statistiques de l’année dernière. Mais le plus impressionnant, c’est que l’efficacité augmente aussi ! La saison dernière, il shootait 5% moins efficacement que la moyenne de la ligue. Cette année ? 17% plus efficace que la moyenne de la ligue. Et le tout sans augmentation d’usage. Un sacré joueur doté d’un bon playmaking pour son gabarit. Retour de blessure dans environ 1 mois.

MIP
Jalen Suggs

Jalen Suggs. Le guard du Magic réalise une excellente saison 2023-24. Il possède un dossier spécial car sa principale évolution ne se traduit que trop peu dans les statistiques. Et pourtant. Sur ce début d’exercice, Suggs est l’un (le ?) des meilleur défenseur extérieur !

Ses augmentations statistiques les plus significatives :

12.2 points (+2.3)
44.9% aux tirs (+3%)
36.5% à 3 points (+3.8%)
81.5% aux lancers francs (+9.2%)
1.9 interceptions (+0.6)
100 TS+ (+9)
113 FTr+ (+12)*

*Capacité à provoquée la faute relatif à la moyenne (100) de la ligue.

Monstre défensif qui devient de plus en plus efficace. La belle saison d’Orlando, c’est aussi grâce à Jalen Suggs !

MIP
Cam Thomas

Comment ne pas parler du pyromane en provenance de Brooklyn ? Cam Thomas est en train de se faire un sacré nom dans la grande ligue. Des qualités de scoring très impressionnantes et qui se répète de manière plus régulière. Avant sa blessure, il commençait déjà à devenir le visage des Nets.

Efficacité aux tirs par zone

Ses augmentations statistiques les plus significatives :

31.7 minutes/match (+15.1)
24.3 points (+13.7)
19.9 tirs/match (+11.9)
45.7% aux tirs (+1.6%)
30.4% d’usage (+3.6%)

L’arrière explose cette saison ! Encore peu adroit de loin, (33.3% sur 6.3 tentatives) il est cependant une menace à mi-distance et pour finir au cercle. Il est le genre de joueur qui crée son tir tout seul, en témoigne ce tableau.

Pourcentages de paniers assistés

1 panier sur 2 tentés sans avoir recours à l’aide d’un coéquipier. Si Cameron Thomas améliore son efficacité, attention…

MIP
Tyrese Haliburton

Monsieur Tyrese Haliburton. Le meneur d’Indiana est en train de réaliser une saison stupéfiante. Playmaking, scoring, leadership, rythme, prises de décision. Il fait un bien fou à ces Pacers encore en quête d’identité il y a 2 ans. Haliburton est l’un des joueurs les plus efficaces de la NBA. Ce n’est pourtant pas simple en tant que meneur de jeu, mais pas pour lui.

PSA = Points par tir

Ses augmentations statistiques les plus significatives :

26.9 points (+6.2)
12.1 passes décisives (+1.7)
52.5% aux tirs (+2.5%)
44.1% à 3 points (+4.1%)
67.4% TS (+5%)
117 TS+ (+10)
2.2 ballons perdus (-0.3)

Tyrese Haliburton est en train de franchir le dernier palier d’évolution évoqué précédemment. À l’image de Shai Gilgeous-Alexander la saison passée, il est en train de devenir une Superstar. Rendez-vous compte de la saison de Haliburton : 1.39 points/tir, soit plus que des monstres comme Dončić ou Curry. Une utilisation et des responsabilités en hausse pourrait amener à des baisses d’efficacité, mais Haliburton fait tout le contraire. Tout est en hausse ! Les pourcentages, la propreté en perdant si peu de ballons (12.1 passes pour 2.2 ballons perdus !!!), le scoring… le tout sur un volume plus important. Tyrese Haliburton est-il trop fort pour le trophée de MIP ? Car oui, il est actuellement dans une autre conversation, celle du MVP. La question est maintenant de savoir à quel point la valorisation de la dernière étape de l’évolution est considérée à l’heure actuelle…