Il est resté sans réponses face aux ajustements du néo-tacticien angelinos Darvin Harm en Playoffs. Il a été sèchement éliminé à la tête de Team USA face à l’Allemagne durant la Coupe du Monde. L’homme aux neuf titres NBA (5 en tant que joueur, 4 en tant que coach) est, plus que jamais, sous le feu des critiques. Est-il encore capable de mener une équipe vers la victoire ?
Des critiques qui ne datent pas d’hier
Steve Kerr a eu le privilège de coacher trois des meilleurs shooteurs de l’Histoire. Il a eu deux MVP dans leurs primes et le meilleur défenseur de sa génération. Avec eux, il a remporté quatre titres NBA, réalisé un back-to-back et atteint cinq fois les finales NBA consécutivement. Surtout, il n’a perdu qu’une seule série de Playoffs à l’Ouest depuis son arrivée aux commandes.
Seulement voilà, une réputation lui colle à la peau. Celle d’un coach peu inspiré qui doit son succès moins à son leadership qu’à la qualité de ses effectifs. Puisqu’il n’a jamais connu d’autres équipes que Golden State, beaucoup attribuent son succès à sa présence aux côtés d’un effectif très talentueux. En résumé, selon cette logique, c’est Curry, Thompson et Green qui lui auraient “donné une carrière”.
Ces critiques s’appuient sur l’exemple de la saison 2015-2016 des Warriors. Golden State a commencé son parcours par une série de 24 victoires consécutives. Mais c’est Luke Walton qui remplaçait Kerr, hospitalisé pour des problèmes de dos. Cette absence ne prendra fin qu’au 44e match de la saison. Cela prouverait, selon les détracteurs de Kerr, qu’il n’est pas le principal artisan de la victoire des siens. Plus récemment, le départ de Mike Brown pour Sacramento a donné aux critiques du grain à moudre. Avec l’accès aux Playoffs pour les Kings et les déboires des Warriors cette même saison, certains ont repris leurs vieilles affirmations. Toutes ces années, Kerr aurait été chanceux d’être bien entouré au sein de son coaching staff. Il n’aurait eu qu’à se laisser porter par le talent de ses joueurs et l’intelligence de ses subordonnés.
Un coach borné ?
Une des critiques qu’on retrouve le plus à propos du coach des Warriors, c’est sa supposée incapacité à s’ajuster tactiquement lorsque son plan initial est mis en difficulté. Les rotations de Kerr ont la réputation d’être très (trop ?) rigides. On retrouve ces critiques parmi les débats autour du nombre de minutes allouées à Steph Curry. Mais pas seulement. A titre d’exemple, durant la saison 2022-2023, c’est l’utilisation (pour certains, excessive) d’Anthony Lamb qui a beaucoup fait débat. La gestion de Lamb, two way contract, intérieur en provenance d’Houston qui a su gagner ses minutes à la faveur d’une incroyable adresse en début de saison (plus de 40% de loin), n’a pas été comprise par le grand public. Lorsque les pourcentages de ce dernier sont retombés à son véritable niveau, Kerr, malgré le handicap qu’il pouvait représenter sur le terrain, a préféré le conserver sur le terrain plutôt que de faire jouer certains jeunes de l’effectif.
Un coach qui n’aime pas les jeunes ?
Le temps de jeu des jeunes constitue en effet un point de crispation. En effet, parmi les alternatives à Anthony Lamb, Patrick Baldwin Jr n’a presque pas été utilisé, se contentant de garbage time ici et là. Le début de saison de Jonathan Kuminga s’est essentiellement résumer à rester sur le banc. Seule la blessure aux adducteurs d’Andrew Wiggins en novembre et l’accumulation de résultats en dent de scie poussera Steve Kerr à le réintégrer dans la rotation. Alors que beaucoup se demandaient si Kuminga aurait droit au même temps de jeu en Playoffs, le jeune congolais ne passera pas beaucoup de temps sur le parquet face aux Kings et aux Lakers. Mooses Moody n’est pas en reste non plus dans son traitement. Malgré une saison régulière compliquée voir décevante, il réussira à se faire une place dans la rotation durant les playoffs en partie en raison des difficultés de Jordan Poole.
Enfin, on peut se poser des questions sur la capacité de Kerr à tenir son groupe. Il n’a pas réussit à maintenir une alchimie suffisamment bonne pour que Draymond Green et Jordan Poole mettent leurs différents de côtés et puissent avancer ensemble. Le vestiaire de 2022 semble bien loin. Kerr n’est pas non plus parvenu à constituer un groupe solide avec Team USA, mais cela est davantage dû à la difficulté de s’adapter aux logiques FIBA.
N’oublions pas qui est Steve Kerr
Steve Kerr a construit les conditions du succès de la franchise californienne. En arrivant à Oakland en 2014, au moment de prendre la suite de Mark Jackson, Kerr trouve une équipe très talentueuse mais à qui il manque un petit quelque chose pour aller plus loin. Il n’hésite pas à prendre une décision courageuse : faire de Draymond Green l’ailier fort titulaire de Golden State au détriment de David Lee, All Star il y 2 saisons. Il convoque aussi Andre Iguodala pour lui expliquer qu’il ne sera plus dans le 5 de départ, au profit du jeune Harrison Barnes.
Steve Kerr fait passer Steph Curry et Klay Thompson dans une autre dimension. Alors que le deuxième est All Star pour la première fois de sa carrière cette saison-là, le premier devient tout bonnement MVP. Le résultat ? Une saison historique pour les Dubs, 67 victoires pour seulement 15 défaites, une apparition en finale et un premier titre depuis 1975. Kerr ne s’est pas laissé porter par le talent de son effectif, bien au contraire. Il a su faire ce que Mark Jackson ne parvenait pas à réaliser : gagner.
Beaucoup de coachs ont eu à gérer des effectifs impressionnants, notamment Steve Nash à Brooklyn. Kevin Durant, Kyrie Irving, James Harden. Autant de superstars que d’égos à canaliser. Un effectif All Star n’est pas nécessairement synonyme de titres. Kerr a su gagner le respect de ses joueurs et a su gérer un effectif composé de 2 MVP dans leurs primes, 2 joueurs qui ont su partager le ballon sans que l’un ou l’autre ne se marche dessus.
Steve Kerr tries to motivate Kevin Durant with a Michael Jordan story. KD responds with 2 PTS & 0 ASTS in the 4th.
If that was Phil telling Kobe a MJ story…
— David Astramskas (@redapples) May 25, 2018
On ne remporte pas 4 titres NBA avec de la chance.
Avec l’arrivée de Chris Paul dans l’effectif des Warriors, Coach Kerr est face à un nouveau défis : intégrer en son sein un joueur au style de jeu bien différent de l’ADN de Golden State. CP3 est, en effet, un adapte du pick n roll, un système trop faiblement utilisé par Steph Curry et sa bande. A lui de faire taire les critiques et rappeler à ceux qui ont la mémoire courte qu’il est l’un des dix meilleurs coachs de l’Histoire de la NBA.