Sam Jones, Mr Clutch

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Avant Sam Jones

11 avril 1961, ce jour est celui du quatrième sacre de l’ère Bill Russell pour les Boston Celtics. C’est aussi le jour de la dernière apparition sur un parquet de NBA pour Bill Sharman. Il n’est pas celui le plus souvent cité lorsqu’on évoque les 13 titres des Celtes, et pourtant sa contribution est primordiale.

L’équipe la plus dominante de son temps base son succès sur un rythme de jeu intenable pour ses adversaires et une défense de fer. Par contre, les Bostoniens n’excellent pas en attaque et c’est bien souvent vers Bill Sharman qu’on se tourne lorsqu’on a besoin d’un panier. S’il ne fait pas partie de l’élite de la ligue en termes d’efficacité, il est de loin le plus fiable de son effectif.

Bill Sharman, seulement 1m85, est l’arrière qui forme avec Bob Cousy le backcourt le plus solide et fantasque de ces premières heures de la grande ligue. Il est pendant plusieurs années le meilleur marqueur de sa franchise, mais il a désormais 34 ans et il décline. Sa dernière campagne de playoff reste impeccable, mais des rumeurs courent. La ville de Chicago arrive en tant qu’équipe d’expansion et il se raconte que Red Auerbach souhaite poser le nom de Bill Sharman sur la liste des joueurs que les Packers sont susceptibles de sélectionner.

Ce n’est clairement pas la proposition qu’attend Bill Sharman de la part de son club à ce moment de sa carrière. Il décide alors de faire ses bagages en direction de la Californie et de devenir entraîneur/joueur pour le compte des Los Angeles Jets dans la défunte ABL. Les Celtics viennent de laisser s’en aller un des hommes les plus marquants de leur histoire. Un joueur crucial offensivement, celui capable d’offrir des points avec régularité, mais aussi capable d’être déterminant dans les moments chauds.

Cependant, si Red Auerbach est si peu gêné de le perdre dans une draft d’expansion, ce n’est pas pour rien. L’entraîneur des Celtics, en vieux brisquard, sait qu’il a déjà un autre atout de choix dans sa manche.

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Éloge de la Patience

Comme le veut le vieil adage, tout vient à point à qui sait attendre. Cette maxime correspond parfaitement au parcours de Sam Jones, car c’est bien lui le digne successeur de Bill Sharman. Cependant, avant de montrer qu’il est bien celui qui a les épaules pour faire oublier son illustre prédécesseur, Sam Jones a dû faire preuve de patience.

Bob Ryan dit de Sam Jones. 3Sam Jones a été l'un des premiers joueurs modernes, ses meilleures années se passent sur un temps court car il avait presque 30 ans avant de devenir un titulaire. Aujourd'hui cela n'arriverait pas, avec tous les agents et tout l'argent qui poussent les joueurs à vouloir s'imposer immédiatement. De plus, il n'y a plus d'équipes avec la mystique des Boston Celtics, où les joueurs se contentent d'en faire partie.

Cette remarque du célèbre auteur expert des Boston Celtics, Bob Ryan, loue la manière dont Sam Jones à fait preuve de patience. Mais avait-il vraiment le choix de faire autrement ? Car nous sommes encore dans les années 50 quand il rejoint la NBA. Dans cette ligue qui n’existe que depuis une courte décennie, les choses sont bien différentes de la NBA actuelle. Sam Jones n’a pas un nom connu nationalement. Red Auerbach a eu vent de l’existence de Jones, car un ancien de la maison, Bones McKinney, l’a vu joué en Caroline du Nord pour l’université de NC Central.

En ce temps-là, point de scouting avisé sur l’ensemble du pays, seuls le bouche-à-oreille et un nez fin peuvent permettre de recruter une pépite. Autre problème typique de l’époque, Sam doit passer par la case armée. Lors de ce service militaire, il rencontre Slick Leonard, futur joueur des Lakers. Leonard, glisse le nom de Sam à un journaliste qui souhaite savoir qui peut recruter la franchise de Minneapolis parmi ces jeunes soldats. C’est ainsi que les Minneapolis Lakers choisissent Sam en 59e position du troisième round de la draft de 1956.

Le monde du basketball professionnel n’est pas encore assez rémunérateur pour être totalement attractif. Sam Jones refuse l’offre de Minneapolis et souhaite d’abord finir ses études afin d’obtenir son diplôme. Les Lakers lui font alors la promesse de le sélectionner lors de la prochaine draft. La parole n’est pas tenue et c’est Jim Krebs qui est appelé avec le pick numéro 3. Finalement, c’est Red Auerbach qui met la main sur Jones avec le huitième choix.

La cuvée 1957 est bien faible et ne voit que onze sélectionnés jouer de manière régulière lors de la reprise de la saison. Huit ans plus tard, Sam Jones est le dernier représentant de cette draft dont il est indéniablement le meilleur joueur. Red Auerbach a une fois de plus fait preuve de génie, avec la satisfaction de l’avoir fait au détriment des Lakers. Tout cela pour dire, que Jones n’arrive pas en NBA par la grande porte, il n’est pas attendu et il doit faire ses preuves. Dans cette ligue à huit équipes, faire sa place est compliqué et on ne demande pas de se faire transférer. Et pour aller où ?

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Sam Jones doit attendre quatre saisons avant de devenir titulaire à Boston. Dans ce laps de temps les adversaires des Celtics ne sont pas forcément dépourvus d’arrières. Les Syracuse Nationals ont Hal Greer, les Detroit Pistons ont Gene Shue, Richie Guerin est le leader des New York Knicks, Tom Gola est la machine à triple double des Philadelphia Warriors, et les Lakers ont de quoi faire sur leur backcourt. Seuls les Saint-Louis Hawks et les Cincinnati Royals semblent être moins bien servis, mais Al Ferrari, John McCarthy ou Bucky Bockhorn sont considérés comme des joueurs solides.

Dernier point et non des moindres, en quatre saisons, Sam Jones voit son équipe remporter trois championnats consécutifs. Alors, pourquoi partir de la meilleure franchise de NBA ? Surtout que son coach, Red Auerbach, voit en lui le futur leader de son attaque. Ainsi, au fur et à mesure que décline Bill Sharman, Sam Jones voit son temps de jeu augmenté jusqu’à devenir, enfin, un membre incontournable du cinq majeur des Celtics.

Triste Sam

Devenir un Celtics est tout d’abord une terrible nouvelle pour Sam Jones. Lorsqu’on lui annonce son arrivée à Boston, celui qu’on surnomme « Sad Sam » fait grise mine. Ce surnom, il le doit à son visage qui affiche un air naturellement triste. Cependant, sa déception post-draft est bien réelle comme il en témoigne plus tard.

Sam Jones déclare: "Je n'avais jamais été aussi malheureux de ma vie. Je pensais vraiment que c'était la fin de ma carrière de basketteur. J'étais ravi d'être choisi par une grande équipe, mais Boston avait cinq très bon arrières en ce temps-là. Je pensais que jamais je ne serais capable d'entrer en jeu et de faire ma place dans l'effectif."

Sa première saison en NBA n’est pas faite pour lui donner confiance, avec seulement 11 petites minutes de présence sur le parquet à chaque rencontre. Mais les choses vont vite évoluer et son temps de jeu double la saison suivante. Sam vient en fait d’endosser le rôle de Frank Ramsey.

Comme Bill Sharman, Frank Ramsey n’est pas un nom qui sort le premier quand on parle de la dynastie des Celtics, il est pourtant un élément clé de l’effectif. Red Auerbach est l’inventeur du rôle de sixième homme, et le joueur qui prend pour la première fois de l’histoire cette responsabilité est Frank Ramsey. Il navigue entre le poste d’arrière et d’ailier pour apporter des points en sortie de banc avec l’objectif de dominer les second unit adverse. Malgré son statut de remplaçant, il est un des meilleurs scoreurs de son équipe. Dorénavant, c’est à Sam de remplir cette mission.

Le moins que l’on puisse dire c’est qu’il va exceller dans ce domaine, à tel point que son nom est désormais suivi de la mention « le meilleur sixième homme de NBA ». Dans cette période, le trophée de Sixth man of the Year n’existe pas encore, mais si un joueur mérite cette récompense c’est bien Sam Jones. Lors de la saison 1960/61, il score 15 points par rencontre en sortie de banc en étant l’attaquant le plus efficace des Celtics à égalité avec un certain Frank Ramsey.

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Finalement, Sad Sam a réussi à faire son trou dans cette prestigieuse équipe. Dorénavant, et grâce à ses performances, Red Auerbach lui offre un nouveau rôle, celui de scoreur numéro un du club, une responsabilité tenue jusqu’ici par Bill Sharman. Frank Ramsey s’en retourne sur le banc pour retrouver son job de sixième homme avant de lui aussi céder sa place à un certain John Havlicek.

Elle est également là, la force de ces Celtics. Chacun connaît sa mission et Red Auerbach réussit à trouver à chaque fois un joueur capable de se donner à fond dans celle-ci. Cela permet à Boston de dérouler son jeu saison après saison et de dominer pendant plus d’une décennie. Peu nombreux sont ceux qui auraient misé une pièce sur Sam Jones pour faire oublier le grand Bill Sharman. Pourtant, une fois intronisé dans le cinq majeur, personne ne peut contester qu’il est le choix parfait.

Le Shooteur

Les Boston Celtics de l’ère Bill Russell ne sont pas bons offensivement. Au mieux, on les trouve dans le ventre mou du championnat, mais la plupart du temps ils sont les cancres de la discipline. Pour l’emporter, ils défendent fort, un exercice dans lequel Sam Jones se donne avec beaucoup de sérieux. Sans être le meilleur défenseur de la ligue, s’il décide de vous coller aux basques, il le fait avec détermination. Mais défendre dur ne suffit pas, il faut aussi courir vite. Le Run & Gun des Celtics est intenable pour leur adversaire. Ainsi, en jouant beaucoup de possessions, les Verts compensent leur faiblesse en attaque.

Mais ce rythme de jeu sur vitaminé ne permet pas toujours à s’imposer quand on a du mal à trouver le chemin des filets. Les Celtics ont donc régulièrement besoin de s’en remettre à Sam Jones pour recoller au score. C’est grâce à son tir à mi-distance que celui qu’on surnomme également « The Shooter », réussit à devenir bien souvent, le sauveur des Celtics.

Sam Jones a tout l’arsenal du shooteur mi-distance. Tir après un drive, catch and shoot, fade away, tout y est. Autre option pour lui, prendre de vitesse son adversaire. Alors bien entendu, pas de dribble à outrance en ce temps-là. Mais Jones utilise parfaitement sa rapidité pour conclure avec un double pas ou un running hook typique de son époque.

Car il ne faut pas oublier que Sam est un joueur qui a fait ses classes durant les années 50, il a donc tous les attraits caractéristiques des arrières de cette période. Le bras roulé en pleine course en est un, et il aime particulièrement ce shoot qui est une de ses armes favorites. Plus tard, il fait l’éloge de Magic Johnson qui pour lui est certainement le joueur moderne qui utilisent le mieux, et le plus, ce tir qu’il affectionne.

Son mi-distance est très proche de celui des basketteurs actuels, une mécanique pure, même si à l’époque le geste ne se finit pas encore par un joli fouetté du poignet. Par contre, dès qu’il tente sa chance à une portée qui est celle d’un tir à trois points, on remarque bien que Sam est un athlète typique des 50’s. Les pieds ne se décollent pas du sol et il lance le ballon avec ses deux mains. Difficile de savoir le volume de ces tentatives lointaines et surtout quel en est le pourcentage de réussite.

Cependant, le move qui devient sa marque de fabrique est le Bank Shot. Ce tir prit à 45 degrés qui se sert de la planche pour faire rentrer le ballon dans le panier. Il en devient un véritable spécialiste. Pour lui, c’est un tir plus simple à rentrer et il ne comprend pas pourquoi plus de monde ne l’utilise pas. Grâce à ce shoot, il peut se rassurer, car selon lui les soirs où il est en panne d’adresse, s’aider le la planche lui permet de pouvoir continuer à scorer.

John Havlicek dit de Sam Jones : "C'est comme si Sam avait divisé le terrain en section. La plupart des shooteurs ont des zones grises où s'ils reçoivent la balle ils se demandent s'ils doivent tirer avec la planche ou directement ? Sam n'a jamais eu un moment de doute. Il prenait toujours ses tirs avec la planche du même endroit."

Enfin, comme tous les arrières de ce temps, Sam est un marqueur en transition. Les contre-attaques pleuvent dans cette ligue au rythme fou. Il est donc bien souvent amené à lancer ou conclure ces escapades destinées à prendre de vitesse l’adversaire. Toutefois, malgré toutes ses qualités, il est loin de l’efficacité des meilleurs scoreurs de NBA.

Sam Jones, c’est environ 1,12 points par tirs tentés, loin derrière les meneurs intouchables que sont Jerry West ou Oscar Robertson qui dépasse fréquemment les 1,3 ou même les 1,4 points par tirs tentés. Mais si on se cantonne aux « arrières » de la ligue, il est à plusieurs reprises dans les cinq meilleurs en termes d’efficacité. Sam Jones n’est donc pas un scoreur élite, du moins pas en saison régulière. Car quand le niveau de jeu monte d’un cran, Sam se transcende, et c’est comme cela qu’il gagne un nouveau surnom.

Mister Clutch

Difficile de dire combien de tirs décisifs a inscrit Sam Jones dans sa carrière. Le site Basketballscholar en recense neuf. Il y en a sept en saison régulière et deux en playoff. Aujourd’hui, ce sont des actions entrées dans la légende avec tout d’abord ce shoot lors du Game 7 des finales de la division Est face aux Philadelphia Warriors le 5 avril 1962.

Sam Jones a peu de temps pour tenter sa chance, mais il parvient à rentrer son tir pour une victoire 109 à 107. Les Warriors sont furieux et contestent la validité de ce tir, mais il est bel et bien accordé. Red Auerbach avoue plus tard qu’il est possible qu’il y ait eu un petit dysfonctionnement avec le chronomètre. Voici encore un exemple ultime que Red Auerbach est indéniablement le roi des roublards.

Mais, le plus connu de tous et le tir qu’il inscrit lors du Game 4 des finales NBA de 1969 qui opposent Celtics et Lakers. Après une remise en jeu, le ballon tombe dans les mains de John Havlicek qui attend de voir qui se démarque. Sam Jones surgit, Hondo lui passe la gonfle et l’arrière des Celtics déclenche dans la foulée un shoot en tête de raquette. Ce n’est pas son tir le plus joli, pas le plus fluide de sa carrière non plus. Cependant, il fait mouche et il ne reste plus qu’une seule seconde dans ce match. Les Los Angeles Lakers ne s’en remettront pas.

Ces deux tirs sont des actions décisives et mémorables, car elles clôturent des rencontres à enjeux. Mais elles sont loin de symboliser à elles seules pourquoi on surnomme Sam Jones, Mister Clutch. Ce sobriquet définit mieux que n’importe quel autre l’impact de Jones sur la dynastie des Bostoniens.

Car s’il crucifie les Warriors à la dernière seconde en 1962, on oublie ses 35 points pour revenir à 3-3 dans la série qui oppose Celtics et Lakers en finale. Que dire de son match 7, après un piteux 1/10 en première mi-temps, Sam Jones inscrit 25 points dans la seconde avec 5 points cruciaux lors de la prolongation.

Ceci, c’est un exemple parmi tant d’autres, de rencontres où Sam Jones est le sauveur de sa franchise. Ce qui est remarquable, c’est que lors de ses meilleures années, on constate qu’il passe de scoreur dans la moyenne en saison à scoreur élite en phase finale. La différence d’efficacité est parfois sidérante, comme lors de la saison 1963/64, où il passe de 1,08 points par tirs tentés à 1,29 points/tirs lors des playoffs. Incroyable.

Cela, il le réalise cinq années de suite. La variation entre saison et playoff n’est pas toujours aussi affolante, mais il montre durant cette période qu’il est l’homme des moments clés. Entre 1962 et 1967, il passe de 1,14 points/tirs en saison à 1,22 points/tirs en playoff. Pour un joueur qui doit porter son attaque sous la pression des grands rendez-vous, c’est simplement extraordinaire.

La tendance s’inverse lors de ses vieux jours. Désormais, il a allégrement dépassé la trentaine et son efficacité diminue pendant les séries éliminatoires. Pourtant, c’est bien sur lui qu’on s’appuie pour vaincre les Lakers à la fin du Game 4 en 1969. C’est également lui qui score 24 points dans la victoire 108 – 106 dans le match 7 de cette série. S’il n’est pas le meilleur scoreur des Celtics lors de cette rencontre (John Havlicek, 26 points), il est, malgré ses 35 ans, toujours un des artisans du succès de Boston.

Sam Jones, c’est 35 points par ci, 28 points par là, ou 14 points dans un quatrième quart temps. Cela n’a rien extraordinaire dans une époque où les statistiques folles sont la norme avec Wilt Chamberlain, Elgin Baylor ou même son partenaire Bill Russell. Pourtant, cette discrétion cache un joueur au tempérament redoutable. Sam Jones est un gagneur, un chambreur et un tueur de rencontres.

Citation de Wayne Embry, pivot des Celtics. Lors du Game 4 contre les New York Knicks en 1967, Bill Russell a eu des ennuis toute la nuit. Il a à peine joué, je suis rentré et j'ai marqué 15 points. J'ai reçu toute l'attention des journalistes, mais c'est Sam qui l'a gagné pour nous, il a scoré 51 points.

Sam Jones, point stats et comparaison

Comme à chaque fois, il est temps de remettre en contexte les statistiques de Sam Jones. Bien souvent les grandes stars de l’ère du Run & Gun affichent des chiffres hallucinants qu’il est important de normaliser pour se donner une idée plus précise du rendement de ces joueurs. Pour ce faire, il faut aligner ces chiffres sur 75 possessions.

Dans le cas de Sam Jones, nous sommes en carrière à 14 points, 4 rebonds et 2 passes de moyenne en 871 matchs. Rien qui ne soit très impressionnant. Cela s’explique par ce que l’on vient de voir dans cet article. Pendant quatre ans, Sam Jones est un joueur de banc avant de devenir titulaire. Puis, il a naturellement et comme la grande majorité des athlètes, déclinée.

Son prime n’est pas si long que cela, seulement 371 matchs. Sur cette courte période, il affiche 20 points, 4,5 rebonds et 3 passes de moyenne sur 75 possessions. Ces 75 possessions représentent 36 minutes de temps de jeu sur une rencontre qui en compte 100, comme dans le basket actuel.

Le hic, c’est que Sam Jones lors de son prime ne passe que 32,5 minutes sur le parquet, ce qui est bien inférieur aux grandes stars de son époque. C’est aussi cela d’évoluer au sein d’une grosse écurie comme les Boston Celtics. Pour s’en rendre compte, cela correspond à 68 possessions sur un match moderne.

Habituellement, je cherche pour vous un joueur dans le même rang statistique pour faire une comparaison. Cependant, lorsque je pense à ces Celtics et à Sam Jones, j’aime à les comparer aux Pistons des années 2000. Les deux équipes sont de gros collectifs, deux places fortes défensives menées par un pivot spécialiste du genre. Deux franchises qui dominent lors d’une décennie, même si les Pistons n’ont pas autant gagné dans une ligue évidemment plus compétitive.

Ben Wallace est celui qui tient le rôle de Bill Russell. Comme lui il a dû se frotter au pivot le plus dominant physiquement de son époque. Tom Heinsohn est la troisième lame au scoring sur le poste d’ailier fort comme le fait Rasheed Wallace. Satch Sanders, a également des points communs avec Tayshaun Prince et son apport sur l’aile. Enfin, John Havlicek et Sam Jones, en duo de leader au scoring sans qu’un des deux ne prennent le pas sur l’autre, comme Richard Hamilton et Chauncey Billups.

C’est à ce dernier que me fait penser Sam Jones. Les deux joueurs ne se ressemblent pas dans leur style de jeu. Cependant, lorsqu’il faut conclure une rencontre, c’est vers eux que leur équipe se tourne. Sam Jones reçoit ainsi le surnom de « Mr Clutch », quand Chauncey Billups devient « Mr Big Shot ».

C’est sans doute dans cette caste là que se trouve Sam Jones. Il est compliqué de juger les joueurs des années 60, surtout ces Celtics qui remportent 11 titres en 13 saisons. Sam Jones avec 10 bagues est sur un palmarès inégalable. Toutefois, le comparer avec les plus grands arrières de l’histoire serait exagéré. Vraisemblablement, il est plus judicieux de le voir comme un arrière du rang d’un Chauncey Billups que de le comparer avec un Ray Allen ou un Clyde Drexler.

Satch Sanders, John Havlicek, Sam Jones et Bill Russell. © George Long/Sport Illustrated/Getty images

Conclusion

Le parcours de Sam Jones est celui d’un joueur qui a réussi à chaque instant de sa carrière à embrasser le rôle qu’on attendait de lui. Il fait d’abord preuve de patience et accepte son sort de joueur de banc puis de sixth man. Par la suite, il devient l’homme des situations critiques non sans quelques réticences, comme lorsqu’on lui demande d’évoluer au poste de meneur. Toutefois, à chaque fois il parvient à satisfaire tous les espoirs placés en lui et cela sans jamais décevoir.

Sans Bill Russell, Sam Jones ne gagne sûrement pas 10 titres. Mais sans Sam Jones, Bill Russell n’en remporte pas onze non plus. L’impact de Russell est sans équivoque et il est phénoménal pour cette époque. Cependant, le caractère décisif et répété des performances de Sam Jones fait de lui un des meilleurs lieutenants de l’histoire.

Ce sont des exploits qui ne se traduisent pas en statistiques, des actes tombés dans l’oubli par manque de bandes vidéo. Pourtant, les récits des remontées fantastiques menées par Sam Jones courant derrière le score sont légion. Sans son scoreur, le bilan des Celtics ne serait sûrement pas le même. De « Sad Sam » le jeune rookie dont on se moque, à « The Shooter », fer de lance malgré lui de l’attaque des Celtics. Pour enfin arriver au champion ultime, le précieux, élégant, déterminé, est tout simplement formidable « Mr Clutch ».

Richard DRIE

43 ans - Rédacteur - Contrairement à ce qui se raconte, je n'ai pas côtoyé George Mikan. Mais je m'efforce de raconter du mieux que je peux l'histoire de la NBA. Avec un gros penchant pour les années 60 et 70. Le bon vieux temps des moustaches et des shorts courts.

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