Depuis la nuit des temps, on donne des surnoms aux joueurs de NBA. Certains sont oubliés car peu originaux, quand d’autres deviennent carrément des marques connues à l’échelle mondiale. Pervis Ellison n’échappe pas à cette tradition. Il est alors affublé d’un sobriquet aussi drôle que cruel. Cependant, au vu de sa carrière, il ne pouvait en être autrement.
Un futur crack
La carrière nationale de Pervis Ellison commence fort. Alors qu’il n’est seulement que dans sa première année au sein de l’université de Louisville, il remporte le tournoi NCAA de 1986. Il en est même le meilleur joueur et se voit récompensé par le trophée de MOP (Most Outstanding Player). En finale, il inscrit 25 points et capte 11 rebonds pour venir à bout de Duke et de son illustre coach Mike Krzyzewski qui participe à ce moment-là à sa première finale. Pervis est étincelant et montre sa faculté à défendre le cercle. Une aptitude qui ébahit les observateurs qui le comparent sans sourciller à Patrick Ewing. Certains évoquent même le nom de Bill Russell. Car lorsqu’il retombe après un premier saut, il est capable de remonter aussi vite avec une aisance folle. S’il n’est que dans sa première année, son partenaire Jeff Hall annonce déjà que l’avenir lui appartient.
« Il va rendre une équipe de NBA très heureuse. »
Pervis a déjà un surnom. On l’appelle « Never Nervous Pervis » (jamais nerveux Pervis), pour sa capacité à ne jamais trembler dans les moments clutch. C’est également en rapport avec son attitude placide et peu expressive. En tout cas, il vient de marquer les esprits avec cette victoire de prestige en NCAA. Cela même si la saison suivante, son équipe ne se qualifie pas pour les phases finales et si elle ne remporte plus de trophée par la suite. Après quatre ans à Louisville, il reste le favori pour être choisi en premier choix de la draft de 1989. Avec 18 points, 9 rebonds et 3 contres de moyenne, le pivot de 2m06 pour 95 kg est attendu comme un des jeunes espoirs les plus talentueux de sa génération.
La désillusion
Les projections s’avèrent exactes, Pervis Ellison est bien choisi en première position de la loterie de 1989. Il est sélectionné par les Sacramento Kings devant Danny Ferry, Sean Elliott et Glen Rice. Sur son poste, pas grand monde, le besogneux Greg Kite et les cendres de Ralph Sampson. Cependant, tout ne va pas se passer comme prévu. Pervis Ellison, à l’instar de son coéquipier, souffre également de blessures à répétition. Ses genoux sont meurtris, les tendinites s’enchaînent et il ne participe qu’à 38 rencontres.
C’est là qu’entre en scène Danny Ainge, qui trouve un nouveau pseudonyme à son partenaire. Désormais le jeune prodige se fait appeler « Out of Service Pervis ». Ce sobriquet ne le quittera plus jamais. Le surnom devient même péjoratif, car en plus de ne pas jouer beaucoup, Pervis a déçu avec seulement 8 points, 6 rebonds et presque 2 contres en 25 minutes. Un rendement clairement en dessous des attentes qui pousse les Kings à se débarrasser de lui dès l’été. Un échange à trois est monté avec les Washington Bullets et les Utah Jazz. Sacramento ne récupère rien d’extraordinaire en contrepartie et Pervis fait ses valises en direction de la capitale.
Sa première année avec les Bullets est prometteuse. Avec le même temps de jeu, il améliore toutes ses statistiques. Mais ce qui est encourageant et qu’il participe à 76 rencontres. Tous les espoirs peuvent à nouveau être permis. Il attaque la campagne 1991/92 le couteau entre les dents et aligne à la fin du mois de novembre des chiffres monstrueux. En 40 minutes, il affiche 20 points, 12 rebonds et 2,5 contres, un rythme qu’il parvient à tenir toute la saison. Alors il manque des matchs par-ci par-là, mais rien de désolant, il participe malgré cela à 66 rencontres. La NBA le récompense avec le prix de meilleure progression de l’année, le fameux MIP.
Les Bullets sont nuls, mais on se console en se disant que la franchise a trouvé sa star. Le soufflet retombe très vite. La saison suivante il retrouve la spirale infernale des blessures à répétitions. Sa production est en baisse et il ne participe qu’à 49 matchs. L’exercice 1993/94 est encore pire, il chute à 7 points de moyenne avec le même taux d’absence. C’est la débandade, il est une nouvelle fois hors de service.
Le désespoir
Lassé, Washington décide de se séparer de Pervis Ellison, il trouve alors refuge chez les Boston Celtics. Il reste 5 saisons dans le Massachusetts et devient même capitaine des C’s. Il est surprenant de voir un pivot qui est à 5 points et 5 rebonds de moyenne en étant absent 70 % du temps, être capitaine de son équipe. En effet, il ne joue que 163 matchs sur 450 possibles. Ses genoux n’ont de cesse de le faire souffrir et le sort s’acharne jusqu’à en tourner au ridicule et finir d’achever sa réputation.
De 1996 à 1998, il ne participe qu’à 39 rencontres. Le bougre s’est éclaté un orteil en déplaçant des meubles, un incident qui lui pourrit la vie dans cette période. Puis il manque l’exercice 1998/99 dans son entièreté à cause d’une cheville douloureuse. Il revient l’année suivante pour n’être finalement présent sur les parquets que 30 fois. Enfin, Pervis Ellison traverse le pays et pose ses valises à Seattle, mais le cœur et les rotules n’y sont plus. Il est remercié après n’avoir joué que 9 matchs.
Son parcours s’achève ainsi, après 12 saisons de NBA pour seulement 474 apparitions sur 972 possibles. Un taux de présence de 50 % qui valide complètement le nickname que lui avait trouvé en son temps Danny Ainge. Dans les colonnes du magazine Sports Illustrated d’avril 1986, on découvre un autre surnom de Pervis Ellison. Le journaliste Curry Kirkpatrick appelle la jeune star de Louisville, « Impervious Perv », l’imperméable Pervis. L’auteur fait référence ici à son style lisse et sans émotion.
Imperméable, il l’a été. Face aux moqueries, aux critiques et aux multiples déceptions qui ont jalonné son chemin dans la grande ligue. Un MIP pour montrer qu’il était capable de s’imposer, un rôle de capitaine pour prouver qu’il était aussi capable de faire entendre sa voix. Une carrière juste malheureuse, gâché par les blessures. L’homme et le joueur avait sans nul doute de quoi pouvoir faire beaucoup mieux.
Instant Promo
Enfin, si vous êtes amateur d’anecdote qui tourne autour des surnoms des joueurs, je ne peux que vous conseiller de suivre l’excellent Vincent Reculeau sur X. Je vous encourage également à vous procurer son superbe ouvrage illustrer par le tout aussi excellent Adrien Pommepuy qui s’intitule « All Star Name, les meilleurs surnoms de l’histoire de NBA » préfacée par Thomas Pesquet, rien que ça. Un indispensable.