Mark Williams est un joueur au parcours évolutif étonnant et qui ne cesse d’impressionner par sa capacité à progresser dans des aspects du jeu qui le font rentrer dans une autre dimension. Sur ce début de saison, c’est le passing qui saute aux yeux. Voyons donc où ce phénomène en est et où peut il s’arrêter ?
Petit point sur le parcours de Mark Williams
Mark Williams est étonnant sur le point de vue de son évolution technico-physique, non pas dans les capacités qu’il acquière tout du long de son parcours, mais plutôt par la manière. En effet, quand on sait que Mark Williams a loupé 22 matchs sur ce début de saison et 63 l’an dernier, il y a de quoi se dire que les blessures, logiquement, vont freiner sa progression. Sauf que pas du tout. Très tôt, on a pu observer ce monstre physique et défensif qui a été le sujet du premier article sur le site.
Par la suite, avant sa blessure, on avait vu les progrès technique en attaque. Beaucoup utilisé avec LaMelo Ball sur P&R, il a su travailler son toucher petit à petit pour (1) devenir plus dangereux aux lancers francs et (2) être encore plus efficace que ce qu’il était déjà, sachant que ce P&R était déjà monstrueux entre la capacité de création et de profit de l’espace de Ball et le physique, le footwork et la fluidité de déplacement du géant de Duke.
Malgré les blessures et le niveau global de l’équipe qui n’est pas bonne sur ce début de saison, Mark Williams est en progression constante et cette fois-ci, c’est la passe qui est au rendez-vous.
Le nouveau skill de Big Mark : le Passing
Déjà, commençons par les stats qui sont plus que claires sur cette nouvelle arme du Big Man des Hornets. Ce qui est formidable avec Mark, c’est qu’on a une augmentation constante des ast/g et une baisse constante des tov/g. Alors certes, les blessures font que le volume n’est pas aussi significatif que pour d’autres joueurs, mais quand même à souligner. De 0.4 assists en année rookie, Mark est passé à 1.2 l’an passé puis 2.1 cette saison. De l’autre côté, en 3 ans, Mark est passé de 0.9 tov/g à 0.6 cette année.
Si on creuse plus loin dans les stats, ça se voit encore plus. Sur Cleaning The Glass, on peut observer plusieurs choses :
- Son Usage Rate a explosé cette saison. Il tournait à un régulier 14% sur les deux premières saisons, voilà qu’il est à 21% cette année, soit le 81ème centile chez les Bigs.
- Son Tov%, qui avait déjà baissé l’an dernier, a encore chuté à 6.7% cette saison. Chez les Bigs, ça le place au 98ème centile, soit 4ème derrière Thomas Bryant, Ousmane Dieng et Kristaps Porzingis
Mais encore plus frappant, ce sont ses chiffres d’Ast% et Ast/Usg qui ont explosé. Alors que l’ancien pensionnaire de Duke était parmi les 20% les plus faibles l’an dernier à ce niveau, il est maintenant largement dans le top 10 et se retrouve, dans ses rankings, entouré de joueurs comme Domantas Sabonis, Bam Adebayo ou bien Victor Wembanyama, même si le volume est différent.
La matérialisation de l’outil : l’utilisation de Big Mark
Les statistiques et les théories, c’est très bien et important. Cependant, cela ne suffit pas à comprendre l’évolution de fond, notamment sur le comment de l’exploitation de la capacité « passing » par Mark et les Hornets. On va donc en parler ici.
Il y a 2 profils type de situations où Mark Williams utilise son passing pour faire des différences. La première, et probablement la plus évidente, c’est le P&R. En réalité, cette arme était déjà celle de Mark depuis son arrivée en NBA.
Comme dit plus haut, le pivot des Hornets possède un arsenal physico-technique on ne peut plus complet pour roll : la taille, la longueur, la fluidité de déplacement, la vitesse et le footwork et des % aux lancers francs plus que décents si jamais l’adversaire, de manière consciente ou par erreur, venait à commettre une faute qui offrirait la possibilité à Mark d’aller sur la ligne. Cette année donc, on voit plus de short roll chez Mark Williams qui sait quand ressortir un ballon lorsqu’il roule vers le cercle, notamment quand l’adversaire vient doubler.
— ☭ (@SapphireExtrait) December 30, 2024
Cette arme lui permet de se défaire des prises à 2 sur roll qu’il subit fortement. En effet, vu qu’il est une arme difficile à défendre sur P&R (surtout si le créateur c’est LaMelo Ball), la prise à 2 est très vite envisagée par les adversaires. Si il arrive, petit à petit, à améliorer sa vitesse de lecture et de step-up dans son read-and-react play, ça peut devenir très dangereux.
— ☭ (@SapphireExtrait) December 30, 2024
L’autre situation type où on voit pas mal de reps de Big Mark, c’est sur des handoffs depuis la ligne extérieure. En effet, Mark Williams a vraiment progressé sur sa capacité de pose d’écran en devenant un meilleur créateur de décalage pour ouvrir des spots aux coéquipiers. Si Mark est si bon sur handoff, il y a 2 raisons que l’on va illustrer avec des plays.
La première, c’est que Mark Williams est un joueur qui a vraiment progressé dans sa pose d’écran comme je l’ai dit. Quand Mark pose un écran, il ne bouge pas, écarte au plus les bras pour forcer un contournement long et reste le plus immobile possible sur le haut du corps pour toujours gagner en puissance. Ici, on voit ça avec Miller qui va profiter de l’espace pour prendre un tir à 3 points.
— ☭ (@SapphireExtrait) December 30, 2024
Le deuxième point qui rend Mark si dangereux sur handoff, c’est qu’il a compris comment les meilleurs intérieurs de handoff optimisaient ces plays : la balle qui se dégage des mains avant le catch du coéquipier qui permet au récepteur de prendre position plus rapidement pour son tir ou son drive comme ci-dessous :
— ☭ (@SapphireExtrait) December 30, 2024
— ☭ (@SapphireExtrait) December 30, 2024
Les limites de Mark Williams
Lev Vygotski est un psychologue soviétique qui a inventé un modèle de développement qui est très simple, basé notamment sur sa culture marxiste, donc matérialiste : la Zone Proximale de Développement. Cette dernière inclut 3 parties. La première, c’est la zone de l’autonomie, c’est ce que l’apprenant sait faire tout seul sans aucune aide. C’est ce que l’on vient de voir plus haut : Mark sait faire des handoffs et ressortir dans le corner pour ses coéquipiers. Ensuite, il y a 2 autres parties : la troisième, c’est ce que Mark ne sait pas faire, peu importe si il a de l’aide ou non, pour le moment et on peut en parler dès maintenant.
Mark n’a pas cette capacité à lire le jeu et à comprendre ce qui se passe dans son dos. Tout ce qui est de l’ordre de la no-look pass ou des passes à l’opposé, que ce soit pour un cut ou un shoot, Mark ne les voit pas. Il y a des exemples de play flagrant pour l’illustrer.
— ☭ (@SapphireExtrait) December 30, 2024
Ci dessus, on voit bien que Josh Green est complètement ouvert dessous et qu’une passe un minimum puissante suffirait à offrir 2 points à l’équipe. Cependant, on voit aussi une limite plus globale de Mark ici : les limites de sa capacité à improviser. Ce qui se ressent sur ce play et sur d’autres, c’est qu’il a l’idée du play qu’il va jouer à ce moment et ne veut/peut pas s’en détourner. Ici, il décide que ce sera un handoff pour Bridges (qui fait n’importe quoi au passage) et est focus sur l’idée de réussir cette action et ne pas penser à autre chose.
Difficile de dire si Mark peut progresser là-dedans tant l’amélioration de ce genre de pratique est compliquée mais en l’état, Williams n’est pas du tout capable de réaliser l’action malgré le très bon jeu off ball de Josh Green sur ce play ou sur d’autres toute la saison.
Les axes de progression
La Zone Proximale de Développement est la zone présente entre les capacités autonomes d’une personne, c’est-à-dire qu’elle peut réaliser une action sans aide (en l’occurrence les handoffs et ressortir dans le corner sur short roll), et les non-capacités d’une personne (en l’occurrence, la capacité d’improvisation tactique).
L’axe de progression majeur de Mark sur son passing, c’est son jeu en high-post. Dû à son nombre colossal d’écrans posés depuis la ligne extérieure, Mark est quand même pas mal éloigné du cercle. Dans cette zone, il ne peut pas scorer en l’état (pas le shoot ni le dribble si contesté) donc progresser en high post pourrait être une vraie plus-value pour l’équipe. Surtout que l’on voit déjà des plays durant lesquels Mark Williams sait voir le cutter.
— ☭ (@SapphireExtrait) December 30, 2024
La passe n’est pas parfaite et on sent que Mark a besoin de reps pour vraiment trouver les bons angles et la bonne puissance de passe, mais l’idée est là et c’est le principal. Si Mark Williams, à force de répétition, peut faire des passes comme ça, alors le jeu des Hornets va grandement step-up étant donné que cela amènera des paniers plus faciles et comme l’équipe est dans le fond de la ligue en terme de réussite, d’efficacité et de volume au cercle, cela ne sera pas de trop.
On a aussi vu Mark capable de ressortir pour des shooteurs dans les corners. On ne parle pas encore de passe à l’opposé mais on voit que Mark sait faire une passe simple certes, mais longue et puissante.
— ☭ (@SapphireExtrait) December 30, 2024
Comment expliquer cette évolution ?
L’évolution de Mark Williams peut s’expliquer par 2 facteurs importants :
- Le premier, c’est l’évolution de la ligue. Aujourd’hui, on entre dans l’ère du passing big et du hub offensif. Si évidemment, on pense à Nikola Jokic quand on parle de ça, il ne faut pas oublier que ça se généralise à la NBA et que petit à petit, hormis quelques très rares spécialistes défensifs, tous les meilleurs bigs sont des bons passeurs : Jokic, Giannis, Embiid, Sabonis, Sengun, Vucevic, Jarrett Allen, Adebayo, Towns, Davis, Wendell Carter, Horford, Lively, Duren, Poeltl, Wemby, Plumlee, Randle, Hartenstein, Trayce Jackson-Davis ou encore Alex Sarr. Aujourd’hui, même des pivots considérés comme très légers comme le rookie des Suns Oso Ighodaro ont des skills de passeurs très bons. Mark Williams ne fait que suivre cette tendance pour progresser dans la hiérarchie des intérieurs de la ligue.
- Le deuxième facteur, c’est peut être tout simplement l’arrivée de Charles Lee à la tête des Hornets. Si j’ai fait cette longue liste des bigs avec des skills de passing, ce n’est pas pour rien. Quand on regarde le parcours de Lee, il a toujours été lié à l’un d’eux. Il commence à Atlanta en même temps que Budenholzer en tant qu’assistant. Là-bas, il découvre le pivot Al Horford et son acolyte de l’époque Paul Millsap. Deux excellents passeurs depuis les postes intérieurs. Lee suit Mike à Milwaukee où il découvre Giannis Antetokounmpo qui tourne alors autour de 7 assists par match. Si Charles Lee est critiquable sur pleins de points sur ce début de saison, on ne peut pas enlever que son arrivée aura surement aidé Mark a comprendre comment évoluer.
Evidemment, tout ça n’est basé que sur un petit volume donc on va voir comment ça évolue mais force est de constater que ce nouvel outil peut faire monter Mark Williams toujours plus haut et vu la vitesse à laquelle il progresse, on attend le tir à 3 points avec impatience (en espérant que ce soit mieux que Bam).