La Yougoslavie a fait son retour en 1995, et avait pour but de conserver son titre en 1997, comme ce qu’ils avaient réussi à faire plus tôt dans la décennie. Mais avec une équipe uniquement composée de Serbes et Monténégrins, peuvent-ils y arriver?
EuroBasket 1997, retour des deux phases de groupe

Après 1973, l’Espagne organise l’EuroBasket pour la deuxième fois de son histoire. 16 équipes se sont affrontées dans 3 villes différentes entre le 24 juin et le 6 juillet 1997 : au Palais Municipal des Sports de Badalone, avec 12 760 places, à Barcelone au Palais Sant Jordi, ayant une capacité de 17 00 places et à Gérone au Pavillon Municipal Gérone-Fontajau, pouvant accueillir 5 049 spectateurs.
Il convient de s’attarder brièvement sur le manque de fréquentation, dont un bon exemple est donné par le fait que les matchs de l’Espagne n’ont attiré qu’à peine 2 000 spectateurs dans les tribunes. Et la finale, officiellement 10 500, bien que ce chiffre semble gonflé. La Fédération catalane, organisatrice de l’événement, a été accusée de ne pas avoir suffisamment promu le tournoi et d’avoir fixé des prix trop élevés. On a parlé de pertes avoisinant les 1,2 million d’euros. Une banderole résumait bien la situation : « Quand commence l’Eurobasket ? »
Comme en 1993, les équipes ont été réparties en quatre groupes de quatre équipes chacune, où elles ont disputé un tournoi toutes rondes. Groupes A et B à Gérone, groupes C et D à Badalone. Les trois meilleures équipes de chaque groupe se qualifient pour la deuxième phase.
Lors de la deuxième phase, deux groupes de six équipes ont été formés et ont disputé un tournoi toutes rondes. Groupe E à Gérone, groupe F à Badalone. Les résultats entre les équipes qui se sont affrontées lors du tour préliminaire ont été reportés. Les quatre meilleures équipes de chaque groupe de la deuxième phase se sont qualifiées pour les quarts de finale à élimination directe afin de jouer le titre à Barcelone. Les vainqueurs des demi-finales se sont disputé le championnat d’Europe, tandis que les perdants des demi-finales ont disputé un match de consolation pour la troisième place.
Les perdants des quarts de finale s’affrontent dans un tableau séparé pour déterminer les places 5 à 8 du classement final, toujours à Barcelone. Les quatre équipes éliminées lors de la deuxième phase s’affrontent dans un autre tableau pour déterminer les places 9 à 12 du classement final. Les quatre équipes éliminées lors de la phase préliminaire s’affrontent dans un autre tableau pour déterminer les places 13 à 16 du classement final à Badalone.
Champion d’Europe en titre et finaliste des Jeux Olympiques de 1996, la Yougoslavie est l’équipe favorite de l’EuroBasket 1997. En raison d’une blessure, Vlade Divac ne peut pas se rendre en Espagne, mais l’équipe possède toujours un noyau très costaud, dont notamment Predrag Danilović, le meilleur joueur yougoslave à Atlanta l’été dernier.
Finaliste du dernier EuroBasket et médaillé de bronze en 1996, la Lituanie devrait être une équipe à surveiller en 1997. Mais, l’équipe n’est plus du tout la même. La Lituanie n’a conservé que deux joueurs principaux de l’équipe médaillée d’argent en 1995 : Artūras Karnišovas et Gintaras Einikis. La “génération dorée” a été remplacée par de jeunes joueurs prometteurs tels que Šarūnas Jasikevičius, Dainius Adomaitis, Virginijus Praškevičius et Eurelijus Žukauskas. De plus, Jonas Kazlauskas a pris la relève en tant qu’entraîneur. Cette coupure directe avec la génération précédente signifie que les attentes sont revues à la baisse pour cette édition. Le but est de se qualifier pour le Championnat du Monde en 1998 et prendre de l’expérience.
On pourrait donc croire que la Croatie, médaillée de bronze en 1995 et 7e des Jeux Olympiques auraient donc leur chance d’aller en finale, mais pour eux aussi l’équipe a grandement changé. Après une fin décevante à Atlanta, la Croatie a également décidé d’introduire une nouvelle génération. Fini Toni Kukoč, Dino Rađa ou même Arijan Komazec, qui avait eu un impact considérable lors des derniers Jeux olympiques. A leur place, Slaven Rimac, Siniša Kelečević, Nikola Prkačin, Davor Marcelić, Damir Mulaomerović et Josip Sesar allaient devoir s’imposer rapidement. Cela leur serait-il également profitable ?
Qui reste-il alors pour défier la Yougoslavie? 4e à l’EuroBasket 1995 et 5e aux Jeux Olympiques de 1996, la Grèce semble être l’équipe la mieux préparée pour réussir cette tâche. Fanis Christodoulou reste le patron de l’équipe, et il est accompagné par Panagiotis Giannakis… sur le banc cette fois-ci. Giannakis a pris sa retraite de l’équipe nationale grecque en tant que joueur après avoir représenté la Grèce aux Jeux olympiques d’été d’Atlanta. De manière peu conventionnelle, l’année suivant sa retraite, Giannakis a débuté sa carrière d’entraîneur en tant que sélectionneur de l’équipe nationale de basketball, en 1997.
La Yougoslavie conserve son titre
Pour la 3e fois de son histoire, la Yougoslavie parvient à conserver son titre à l’EuroBasket et confirme son statut comme étant la meilleure équipe d’Europe à cette époque. Et cette fois-ci, le sacre s’est fait sans véritable controverse… hormis la présence de la Yougoslavie elle-même.
Placée dans le groupe C, la Yougoslavie a commencé par une large victoire 104-76 sur la Pologne. Dejan Bodiroga et Željko Rebrača ont combiné pour 35 points durant cette rencontre où la différence s’est avant tout faite en deuxième période, avec un écart de 57-35 en 20 minutes.
Mais lors du match suivant, la douche froide. La Yougoslavie subit sa première défaite dans un EuroBasket depuis son retour en 1995, s’inclinant 74-69 face à l’Italie malgré les 29 points et 2 interceptions de Aleksandar Đorđević. Grâce à une défense acharnée, Carlton Myers provoquant des fautes à répétition et Alessandro Frosini réalisant sa meilleure performance du tournoi, les Italiens ont surpris les champions en titre.
Les Yougoslaves se sont rattrapés lors du match suivant, battant la Lettonie 108-89. Đorđević et Rebrača ont dominé la rencontre, le premier inscrivant 22 points à 8-10, 8 passes décisives et 2 interceptions, le second terminant avec 17 points à 6-7 et 8 rebonds. 2e de son groupe, la Yougoslavie se qualifie pour le deuxième tour dans le groupe F.
Dans cette deuxième phase de groupe, la Yougoslavie est invaincue. Son premier match était une victoire 88-73 contre l’Allemagne grâce à une excellente première mi-temps, 47-30 à la pause. Dans une très bonne performance collective, Rebrača s’est démarqué avec 12 points à 4-8, 8 rebonds et 3 interceptions.
Vient ensuite un match d’une haute importance : Croatie-Yougoslavie. La guerre dans les Balkans est toujours dans les mémoires, ainsi que le départ du podium des Croates au dernier EuroBasket. Pour la première rencontre de l’histoire entre ces deux pays, la tension était palpable. Grâce à un très bon Slaven Rimac, les joueurs du damier étaient devant 31-22. Mais les Yougoslaves, poussés par les efforts de Đorđević et Bodiroga, reviennent au score petit à petit. À quatre secondes de la fin de ce match tendu, l’équipe croate menait d’un point lorsque Aleksandar Đorđević a pris le ballon et marqué un tir à trois points, offrant ainsi la victoire 62-64 à la Yougoslavie.
Pour conclure cette phase de groupe, la Yougoslavie bat l’Espagne 79-70. Malgré les 20 points à 8-14 et 8 rebonds d’Alfonso Reyes, les champions en titre ont tenu bon, notamment grâce au surprenant Nikola Lončar qui a inscrit 17 points à 7-13 et 2 interceptions, ainsi que les contributions de Rebrača : 16 points à 6-9, 5 rebonds et 3 interceptions. Encore une fois, la Yougoslavie termine 2e derrière l’Italie, et se qualifie pour les quarts de finale où un adversaire particulier l’attend : la Lituanie.
Ce n’est pas la même équipe qu’en 1995 ou 1996, mais la Yougoslavie sait qu’il ne faut pas sous-estimer cette équipe. Dans un match maîtrisé qui a vu le retour de Danilović qui inscrit 21 points et 3 interceptions après avoir raté la deuxième phase, ainsi qu’un très bon Milenko Topić, qui avec 12 points à 4-5, 8 rebonds et 4 interceptions en 20 minutes, réalise son meilleur match du tournoi, les Yougoslaves l’emportent 60-75 et se qualifient pour les demi-finales.
La rencontre dans le dernier carré entre la Grèce et la Yougoslavie fait en quelque sorte office de finale avant l’heure. Dans une rencontre serrée de bout en bout, c’est Bodiroga qui est le héros pour l’équipe yougoslave. 22 points à 6-10, 6 rebonds et 5 passes décisives dans une victoire 80-88. Pour la 11e fois de son histoire, la Yougoslavie joue une finale d’EuroBasket.
De l’autre côté du terrain, c’est un adversaire que l’équipe connaît bien, la surprenante Italie, toujours invaincue jusqu’à présent. Grâce à leur excellente défense, les Yougoslaves ont totalement dominé une finale très physique. Bodiroga et Rebrača prennent le contrôle offensif et, avec Đorđević, remportant la victoire 61-49 et soulevant à nouveau la coupe. La Yougoslavie remporte l’EuroBasket 1997 en Espagne, comme en 1973, confirmant que son statut de favori était mérité.
Il n’y a pas eu beaucoup de points marqués lors de cette édition de l’EuroBasket. À l’époque, la mode dans le basket européen était d’allonger les temps de possession (l’horloge de tir n’était pas encore passé de 30 à 24 secondes) et de se concentrer davantage sur la défense que sur l’attaque. Les 110 points marqués en finale ont été le deuxième total le plus bas depuis l’introduction de l’horloge, dépassé seulement par le 58-49 dans le match URSS-Yougoslavie de 1965.

Après un tournoi aussi dominant, il est logique de retrouver 3 joueurs yougoslaves dans l’équipe type de l’EuroBasket 1997. Le MVP Aleksandar Đorđević est rejoint par Dejan Bodiroga et Željko Rebrača. Le reste du 5 majeur est composé du Polonais Dominik Tomczyk, qui a terminé 7e, et de Mikhail Mikhailov, qui a remporté la médaille de bronze avec la Russie.
Le retour de l’Italie
Après 2 EuroBaskets peu remarquables, l’Italie a fait son retour en finale. Certes, une nouvelle défaite face à la Yougoslavie n’est pas plaisante, mais ce fut un signe que le basket italien était toujours capable de jouer pour les trophées majeurs.
Ettore Messina en était à son troisième EuroBasket en tant qu’entraîneur. Jusqu’alors, son expérience n’avait pas été couronnée de grands succès. Mais s’il devait mettre fin à son aventure avec les Azzurri, il fallait que ce soit en beauté ; son tempérament n’aurait pas accepté autre chose. Il avait reconstruit l’équipe, pièce par pièce, et en cours de route, il avait également trouvé les hommes qu’il fallait pour relancer les Azzurri.
Cette fois-ci, les Azzurri étaient déterminés à obtenir un bon résultat. L’objectif, au moins la cinquième place, pour se qualifier pour les Championnats du monde à Athènes. Dès la phase de groupe à Badalone, ces ambitions ont été affichées à la face du monde.
Trois premiers matchs en trois jours, trois victoires. 75-85 contre la Lettonie grâce à un Davide Bonora en forme (15 points, 6-10 et 6 passes décisives) et plus tard 80-65 contre la Pologne grâce au duo Carlton Myers-Gregor Fučka (19 points, 6 passes décisives ; 18 points, 7-14, 8 rebonds, 2 interceptions). Entre les deux, la victoire contre la Yougoslavie, championne en titre et grande favorite. Premiers surprises du groupe, Gli Azzurri étaient en bonne position pour atteindre les quarts de finale. Ces matchs bizarrement n’étaient pas diffusés en direct en Italie.
Dans la deuxième phase, les joueurs italiens auront fait suer leurs supporters. Premier match contre l’Espagne, et les hôtes prennent une avance de 25-36 à la pause. C’est alors que Riccardo Pittis sort de sa boîte et réalise son meilleur match du tournoi. 7 passes décisives, 4 rebonds et 7 interceptions. Il fait le sale boulot tandis que Myers inscrit 20 points et 6 passes décisives pour faire une remontée spectaculaire et s’imposer 63-60
Le deuxième match a été moins dramatique, mais après avoir été mené 28-27 à la pause, l’Italie a fini par gagner 62-67 contre l’Allemagne. Le duo Bonora-Fučka a permis aux Azzurri de tenir la route même lorsque les tirs de Myers ont eu du mal à rentrer. Enfin, l’Italie a battu la Croatie 74-68, où cette fois-ci le duo Myers-Frosini a donné le ton pour l’équipe. Avec un bilan de 5-0 jusque-là, l’Italie continue son parcours sensationnel en terminant premier du groupe F.
Lorsque les Azzurri ont battu la Turquie en quarts de finale 43-66 après une nouvelle masterclass défensive, les supporters italiens ont vraiment commencé à rêver les yeux ouverts. Ils étaient déjà dans le dernier carré, avec la possibilité de remporter une première médaille en 6 ans. Contre la Turquie, c’est le jeune Denis Marconato qui a surpris tout le monde. 16 points à 6-7 et 12 rebonds en 22 minutes pour le joueur de 21 ans.
La RAI a ouvert les yeux et a décidé de diffuser les matchs à partir de la demi-finale. La victoire contre la forte équipe russe, entraînée par l’ancienne gloire Sergei Belov, qui comptait dans ses rangs deux nouveaux protagonistes, l’ailier Andrei Fetisov et le pivot Michailov. Encore une fois grâce à une défense serrée, et encore une fois grâce à un incroyable retour, le score final de 67 à 65 était en la faveur des Italiens. C’était au tour de Myers de faire sa meilleure performance, avec 19 points à 4-6 et 4 interceptions. Une fois de plus, Marconato a été décisif avec 14 points à 5-9 et 10 rebonds. Ensemble, ils ont permis à l’Italie de retourner en finale.

En finale attendait, avec un air vengeur, la Yougoslavie. Pour prendre leur revanche, les basketteurs yougoslaves ont misé sur le jeu dur, jouant des coudes avec les Italiens. Les Azzurri ont tenté de réagir, réalisant une fois de plus une défense magistrale, contraignant leurs adversaires à leur score le plus bas (61 points). Mais le problème venait de l’attaque, avec seulement 49 points. L’Italie devra se contenter d’une médaille d’argent, mais ce fut un beau pas en avant pour le basket italien.
Le début de la malédiction croate
En 1995, les joueurs Croates ont quitté le podium prématurément. Depuis, cette nation passionnée par le sport n’y est plus jamais retournée. L’EuroBasket 1997 marque le début d’une longue série de déception pour le basket croate. La jeune génération croate avait pourtant bien commencé son tournoi, avec une victoire 75-55 contre l’Allemagne. Siniša Kelečević avait commencé en force avec 19 points à 7-10 et 7 rebonds et avait donné de l’espoir pour les supporters croates. Mais la suite de la compétition sera marquée par des défaites difficiles à avaler les unes après les autres.
Tout d’abord, contre les hôtes espagnols, la Croatie menait 41-45 à la mi-temps grâce à de solides performances de Mulaomerović et Prkačin. Mais avec un très bon Mike Smith, qui inscrit 24 points à 9-12, 7 rebonds et 2 interceptions en 40 minutes, pour relancer l’équipe, l’Espagne finit par s’imposer 78-71.
Contre l’Ukraine, la Croatie était proche à plusieurs moments de revenir au score et n’a jamais lâché l’affaire, surtout Mulaomerović qui a réalisé son meilleur match du tournoi. 23 points, 8 passes décisives, 5 interceptions en 40 minutes pour maintenir son équipe à flot. Mais face à un Dmytro Bazelevsky qui n’arrêtait pas de provoquer des fautes (19 points, 3-5, 11-12 aux lancers francs, 4 interceptions), la Croatie doit s’incliner 88-95. Avec un bilan de 1-2, la Croatie termine 2e derrière l’Espagne invaincue, et devant l’Allemagne et l’Ukraine à la différence de points dans les rencontres directes.
Qualifiée pour le 2e tour, la Croatie a fait face à la Pologne pour le premier match du groupe F. A la mi-temps, les Croates menaient 38-50. Kelečević fait encore un bon match, lui qui va terminer avec 15 points à 6-9, 7 rebonds et 2 interceptions. Mais comme contre l’Espagne, l’équipe a craqué en deuxième période. Maciej Zieliński a guidé ses partenaires avec 16 points à 6-9, 6 passes décisives et 3 interceptions pour que l’équipe s’impose 77-76 aux dépens des Croates.
La défaite contre la Yougoslavie a été évoquée précédemment, et elle a fait extrêmement mal aux Croates. De cette manière, contre cette équipe, et un résultat qui avait pratiquement assuré que la Croatie n’irait pas en quart de finale. En effet, il fallait une victoire des Allemands sur les Polonais, et que les Croates aillent battre l’Italie pour pouvoir se qualifier potentiellement à la différence de points lors des rencontres directes. Hélas, aucun des deux scénarios n’a eu lieu.
En phase de classement, la Croatie va subir une nouvelle défaite sur un score serré, cette fois-ci contre la France. C’était au tour de Rimac de guider ses partenaires avec 19 points à 5-8 et 9-9 aux lancers francs et 4 interceptions. Mais il ne pouvait rien faire contre Thierry Gadou qui a réalisé la meilleure performance française de l’EuroBasket. 27 points à 8-10, 4 rebonds et 4 interceptions. Victoire des Bleus 84-79, et nouvelle désillusion pour les Croates.
La Croatie remporte sa deuxième victoire contre l’Allemagne, 93-100 dans un match où encore une fois, ils ont joué avec le feu. 41-59 en leur faveur en première mi-temps, 52-41 pour les Allemands en deuxième période. Mais Mulaomerović, avec 27 points à 8-15, 10 passes décisives et 2 interceptions, assure une victoire des Croates. L’équipe termine ainsi 11e de l’EuroBasket 1997.
La pire performance croate jusque-là, mais aussi le début d’une période de déclin pour la Croatie qui plus jamais n’obtiendra de médaille dans un tournoi majeur. La question se pose alors, qui pourra prendre sa place parmi les grands du continent?