À seulement 27 ans, OG Anunoby est considéré comme le meilleur joueur britannique de l’Histoire de la NBA. Cela peut s’expliquer par le palmarès et les performances du Britannico-Nigérian, mais également du faible nombre de joueurs Britannique ayant évolué et brillé en NBA. Mais comment OG, un joueur qui entre à peine dans son prime, peut-il avoir ce statut, surtout en étant ressortissant d’un pays reconnu pour ses résultats sportifs globaux.
Pourquoi les Britanniques ne s’imposent pas en NBA ?
La Grande-Bretagne et le basketball entretiennent une relation assez surprenante. En-dehors des parquets, c’est l’un des plus gros marchés en Europe pour la NBA. Cette affirmation se base sur plusieurs éléments. Tout d’abord, le nombre d’abonnés au NBA League Pass, la Grande-Bretagne est première en Europe, devant des pays comme la France, l’Allemagne ou l’Espagne. On peut aussi citer la rapidité des Britanniques pour remplir leurs stades lors des London Games , matchs de saison régulière délocalisés à Londres. De 2011 à 2019, il y a eu 9 matchs NBA qui se sont déroulés à Londres, et à chaque fois, les 19 000 places de l’O2 Arena se sont remplies intégralement en moins d’une heure.
La Grande-Bretagne est connue pour être un territoire de sports, où ses ressortissants excellent dans de nombreuses disciplines. C’est d’ailleurs en Grande-Bretagne que des sports comme le Football et le Rugby ont vu le jour, et ce sont des sports collectifs où ils excellent. Les Britanniques montrent également leur passion et leurs performances lors des Jeux olympiques, où ils figurent à chaque édition parmi les nations les plus médaillées. Mais alors, pourquoi les Britanniques restent en marge des autres nations lorsqu’on parle de basketball et de talents en NBA.
Tout d’abord, il faut regarder plus bas pour essayer de comprendre d’où vient le problème. La première chose qui est marquante, c’est le manque d’infrastructures. Même si cela évolue depuis quelques années, il est toujours difficile d’accéder à des terrains de basketball en Grande-Bretagne. Peu de gymnases sont équipés de paniers de basketball, et les seuls terrains qui existent sont rarement accessibles pour le plus grand nombre. Ils sont souvent réservés pour les clubs, ou accessibles à des prix qui ne permettent pas aux jeunes pratiquants d’y accéder.
ll n’y a tout simplement pas assez d’endroits pour jouer. Il n’y a pas assez d’infrastructure dans le coaching à travers les systèmes scolaires »
Nick Nurse, ancien coach d’OG, et champion NBA avec les Toronto Raptors, qui a passé de nombreuses années en Grande-Bretagne, avait déclaré ceci en parlant du basketball britannique.
Ce manque d’infrastructure, de clubs et d’encadrement n’aide pas à recruter et développer des jeunes licenciés. À titre de comparaison entre deux pays qui ont quasiment le même nombre d’habitants, la Grande-Bretagne compte environ 55 000 licenciés, tandis que la France en compte environ 715 000. L’écart entre les deux pays est colossal. Pourtant, les jeunes Britanniques s’intéressent énormément à la NBA.
Il y a toujours eu une attirance en Grande-Bretagne, notamment chez les jeunes, pour la culture américaine, et cette tendance en est la preuve. En Grande-Bretagne, plus de 60% de ceux qui suivent la NBA ont moins de 35ans. Cela montre un réel intérêt des nouvelles générations pour la grande ligue américaine. Pas de doute avec le fait que si les infrastructures étaient meilleures, des clubs plus accessibles et un encadrement structuré, le nombre de licenciés augmenterait significativement.
« C’est frustrant quand on voit que la France réussit si bien, d’autres pays européens si bien, maintenant le Canada le fait si bien et tous expriment le point de vue d’anciens joueurs ou de personnes qui ont gravi les échelons ou qui sont de la même formation ».
Luol Deng sur le manque de reconnaissance des joueurs britanniques par la fédération.
L’autre facteur qui nuit au basketball en Grande-Bretagne est son manque de visibilité dans les médias. En effet, et comme évoqué précédemment, la Grande-Bretagne est un pays de sport, mais pas encore un pays de Basketball. Berceau de sports collectifs très populaire comme le Football ou le Rugby, les Britanniques sont très attachés à cet héritage.
Ces sports raflent tout au niveau des droits TV, pubs, sponsoring… Culturellement, le football et le rugby ont une place tellement importante dans le cœur des Britanniques qu’il est difficile de s’y faire une place, d’autant plus que d’autres sports sont également extrêmement populaires, comme les sports de raquette, les fléchettes, la boxe anglaise…
Le basketball pâtit de plusieurs facteurs, c’est un sport qui n’a pas été créé par les Britanniques, et donc pour lequel ils sont moins attachés. À cause des précédents facteurs évoqués, c’est un sport qui n’a pas de résultats permettant aux amateurs de sport de s’y intéresser. Si on prend l’exemple de la France, des sports sont également beaucoup plus populaires que d’autres. Mais les résultats sportifs, d’équipes ou de sportifs français, attirent forcément de nouveaux amateurs qui vont suivre les performances, et cela va donner envie de s’inscrire dans des clubs.
Les équipes nationales britanniques de basketball n’arrivent pas à faire des bons résultats lors des compétitions internationales, ce qui est loin d’être surprenant. Le championnat local a beaucoup moins de visibilité que les principales compétitions des autres sports, et les basketteurs britanniques qui réussissent et performent en NBA sont trop peu nombreux.
Malgré ces constats, il existe tout de même des motifs d’espoir et des courbes positives. Tout d’abord, la sélection nationale masculine est en progrès. Malgré un manque de résultats positifs, qui est logique vu le manque de joueurs de très haut niveau et de structures, la sélection masculine s’est qualifié à 5 des 6 dernières éditions de l’Eurobasket, ce qui lui offre plus de visibilité. Elle sera d’ailleurs présente lors du prochain Euro qui se déroulera en août 2025, et espère pourquoi pas sortir de sa poule pour la première fois.
La British Basketball League, le championnat britannique de basketball, a réalisé des records d’audience et d’affluence ces dernières années. On voit également le développement de l’équipe des London Lions, qui a participé pendant 3 saisons à L’EuroCup, et a même été jusqu’en demi-finale lors de l’édition 2023-2024, éliminée par le Paris Basketball (vainqueur de la compétition cette année-là).
Malheureusement, l’ascension des London Lions a été freinée à cause de grosses difficultés financières. Le Club a été exclu de l’EuroCup pour la saison 2024/2025, mais a été sauvé de la faillite par l’actionnaire des Zalgiris Kaunas, club lituanien présent en Euroleague. Ce rachat pourrait aider encore plus les Lions à se développer, comme l’ont exprimé les nouveaux actionnaires :
« Prendre part à la direction des Lions donne au Zalgiris de nouvelles opportunités pour faire grandir son nom en Europe, pour se rapprocher des jeunes talents londoniens, et pour assurer le développement à long-terme de ce milieu […] Les London Lions, qui vont participer aux tournois du plus haut niveau international, vont devenir une autre plate-forme pour attirer et développer des jeunes joueurs prometteurs du monde entier. Dans le même temps, le club pourra apprendre des méthodes de management et d’organisation du Zalgiris, renforçant son potentiel sportif et sa fanbase. »
Déclaration de Dainius Liulys, nouveau directeur du Zalgiris Group.
Ce rachat, n’est pas anodin, et permettra donc à de jeunes talents de se développer et d’aller continuer leur progression dans un club de plus haut niveau, qui participe à la plus grande compétition européenne. Les propriétaires des Zalgiris connaissent le potentiel et le vivier de nouveaux talents qui peuvent émerger en Grande-Bretagne. C’est un pari sur l’avenir, qui peut être bénéfique pour les deux partis. Cela permettra également de mieux structurer le club et de le développer, pour pourquoi pas, le faire atteindre l’élite européenne.
Ces points positifs de développement nous portent à dire que le basketball britannique se développe et est sur la bonne voie. Mais c’est le cas depuis peu d’années, et les gros talents ont du mal à émerger, pour devenir les figures du basketball en Grande-Bretagne.
Grande-Bretagne – NBA : un petit historique
Malgré son retard sur d’autres pays, la Grande-Bretagne a fourni quelques talents à la NBA, mais peu ont réussi à vraiment perdurer dans cette ligue. Parmi les joueurs britanniques passés par la NBA, on peut tout d’abord citer Steve Bucknall, premier joueur formé en Grande-Bretagne à intégrer la NBA en 1989. Malheureusement, il n’est resté qu’un an dans la grande Ligue avant de revenir en Europe.
Quelques noms ont également fait le grand saut de l’autre côté de l’Atlantique, comme Jhon Amaechi, Robert Archibald ou encore Tosan Evbuomwan. Mais ces noms ne sont pas très connus et ne vous disent sûrement pas grand-chose. C’est souvent le cas pour les joueurs Britanniques, qui ne font que des courts passages en NBA avant de retourner en Europe pour la plupart.
Mais, avant OG Anunoby, deux Britanniques ont tout de même réussi à se faire un nom en NBA. Tout d’abord, Ben Gordon, drafté en 3e position en 2004, a passé plus de 11 saisons en NBA. Il est notamment le seul joueur à avoir remporté le titre de 6e homme de l’année lors de sa saison rookie. Joueur reconnu en NBA pendant des années, il a fait des saisons à plus de 21 points de moyenne.
Enfin, Luol Deng, toujours considéré comme le plus grand joueur britannique de tous les temps. Il a été drafté également en 2004, en 7e position. En plus de ses 16 saisons en NBA, Luol Deng est devenu NBA All Rookie First Team, ainsi que deux fois all-star. C’est un joueur reconnu et très apprécié par les fans des Chicago Bulls, pour qui il a joué plus de 10 saisons.

Ce sont ces deux joueurs qui au début du 21e siècle ont permis de mettre la Grande-Bretagne sur la carte basketballistique. Malheureusement, leur longévité et leur réussite en NBA ont eu du mal à être capitalisés par l’arrivée de nouveaux talents britanniques. Si on compare avec la France, depuis l’arrivée de Tony Parker en NBA, le quota de joueurs français en NBA n’a cessé d’augmenter saison après saison. Il aura fallu attendre 2017 pour voir leur successeur enfin arriver dans la Ligue.
OG Anunoby, Britannique et l’une des références à son poste en NBA
Drafté en 23e position par les Toronto Raptors en 2017, OG Anunoby s’impose rapidement dans la franchise canadienne comme un élément indispensable. Son physique, 2,01 m pour 105 kg, en fait un ailier costaud et un profil très recherché en NBA. OG s’est d’ailleurs imposé comme un défenseur élite dans la ligue, notamment récompensé en 2023, où il finit meilleur intercepteur de la NBA, et dans la sélection All-Defensive Second Team.
Ses qualités défensives ne sont pas uniquement physiques, mais aussi sa puissance et sa vitesse. Anunoby est un joueur très intelligent, avec une lecture du jeu et des déplacements qui en font un véritable poison pour les attaques adverses.
En dehors de ses qualités de défenseur élite, OG Anunoby, c’est également un très bon shooteur à 3 points. OG n’est pas le joueur qui va se créer son propre tir, beaucoup dribbler, mais il peut sanctionner efficacement à 3 points lorsqu’il reçoit le ballon. Il tourne à plus de 37,5% d’adresse à 3 points en carrière, ce qui en fait un profil « 3&D » très recherché dans la NBA actuelle.
Son rôle est à la fois de défendre le plomb, d’être l’un des leaders défensif de son équipe, mais également de scorer de loin. Les équipes s’arrachent ce type de profil, et payent souvent très cher pour les acquérir dans leur équipe.OG Anunoby est considéré depuis quelques saisons comme l’un si ce n’est le meilleur défenseur extérieur de la ligue.
L’aventure d’OG chez les Raptors a été une réussite, avec en point culminant ce titre de champion NBA en 2019, le premier dans l’histoire de la franchise canadienne. Il devient par la même occasion le premier Britannique champion NBA.

OG Anunoby a fait partie des cadres de cette équipe, et est devenu le chouchou des fans, grâce à son dévouement pour l’équipe. Malheureusement pour lui, OG a raté l’entièreté des playoffs 2019 dû à une appendicectomie. Il a tout de même participé à la très bonne saison régulière des Canadiens cette année-là. Sa moyenne de points a par la suite été en constante augmentation, avec notamment les départs de plusieurs cadres, il s’est imposé comme l’un des leaders de ses Raptors, avec des saisons au- dessus des 15 points de moyenne depuis la saison 2020-2021.
En 2023, les Raptors commencent un nouveau cycle de reconstruction autour de jeunes joueurs. Après plus de 6 saisons de bons et loyaux services, un titre NBA en poche et un CV plus que reconnu dans toute la ligue, OG attire la convoitise de bons nombres de franchises.
En 2023, il quitte les Raptors et rejoint les New-York. L’ailier britannique rejoint une équipe ambitieuse, qui vise le titre, autour d’un 5 titulaire talentueux et expérimenté. OG Anunoby vient apporter ce qu’il sait faire de mieux, et est amené à encore progresser aux côtés de grands joueurs, avec un potentiel offensif qui peut encore se développer. Anunoby est un joueur essentiel dans une équipe qui vise un titre. On l’a vu lors de son départ, il était courtisé par énormément de franchises.
Les Knicks n’ont d’ailleurs pas hésité à le prolonger à l’été 2024, et à sécuriser son contrat pour 5 ans, avec un énorme salaire de 212,5M de dollars. La somme déboursée par les New-Yorkais montre à quel point le profil d’OG Anunoby est rare et recherché. Son profil, ses performances et son implication font du Britannique l’un des joueurs les mieux payés de la ligue (31ème pour la saison 2024-2025), ce qui accentue son rôle et son statut de star.
OG Anunoby et les Knicks doivent désormais concrétiser leurs deux dernières bonnes saisons régulières et leur statut d’équipe favorite pour le titre. Ils doivent notamment passer un cap à l’EST, après avoir été éliminés par les Indiana Pacers en demi et en finales de conférence ces deux dernières saisons. C’est tout un peuple et une « Knicks Nation » qui attendent de vivre les premières finales NBA de la franchise depuis 1999.
OG réussit donc à s’imposer en NBA en mettant en lumière le basketball britannique. Pour nuancer le sujet, on peut souligner que le joueur à tout de même fait toutes ses classes dans le cursus universitaire américain. À cause des faibles infrastructures, des difficultés d’organisation dans la fédération, il est difficile pour les jeunes Britanniques de se faire une place dans le basketball. La solution de s’exporter aux Etats-Unis paraît comme la plus fiable, mais peu de joueurs y accèdent.
C’est pour cela que le développement de certaines équipes, comme les London Lions, va être utile pour développer des talents, et servir de passerelle pour qu’ils aillent faire leurs gammes dans les meilleurs clubs européens. Quand on voit la trajectoire de tous les jeunes Français, qui sont restés dans le championnat de France avant de prendre leur envol pour la NBA, on se dit qu’avec les jeunes talents britanniques, cela peut le faire également.
OG Anunoby, qui semble impliqué dans le développement du basketball en Grande-Bretagne, avait investi dans le développement des London lions.
C’est formidable de voir tout ce qui se passe dans le basketball britannique en ce moment, c’est pourquoi je suis vraiment excité de rejoindre les London Lions. Je veux juste faire ma part en tant que modèle pour tous les jeunes joueurs à Londres et dans tout le Royaume-Uni. » avait déclaré OG Anunoby lors de son achat de part des London Lions
Comme l’a dit Luol Deng il y a quelques années, il faudrait que la fédération britannique travaille en étroite collaboration avec les joueurs ou ex joueurs de haut niveau, car ce sont eux qui peuvent apporter des idées neuves et faire bouger les choses. Quand on voit le manque de structure, de financement, ou de contact entre la fédération et les joueurs, on se dit que le mal est quand même bien profond.
Le paradoxe est total, quand on voit qu’OG, par ses déclarations et ses actions semble motivé pour développer les basketball britannique, mais qui dans le même temps n’a encore jamais porté la tunique de l’équipe nationale de Grande-Bretagne. Alors qu’on le sait, un si gros joueur qui participe à des matchs/compétitions avec son équipe nationale, va forcément attirer les regards sur l’équipe. De nouveaux joueurs vont sûrement faire le choix de venir en sélection nationale, et les jeunes joueurs auront un modèle de réussite et d’implication.
Le basketball britannique part donc avec un retard conséquent sur ses homologues européens, mais la dynamique de ces dernières années reste très positive dans le développement du basketball. La Grande-Bretagne, grande place européenne pour la NBA, peut encore accentuer ses efforts pour continuer dans la bonne dynamique de développement et devenir désormais un grand fournisseur de talents.