En 1984, Michael Jordan a démontré son immense potentiel. Crédit : Corbis/VCG via Getty Images

Jeux Olympiques de 1984 : la révélation Jordan

Les Jeux Olympiques de 1984 à Los Angeles ont offert une scène inoubliable pour le basketball masculin, marquée par des performances spectaculaires et la domination de jeunes américains. Dans un contexte de boycott soviétique et des pays du bloc de l’Est, les États-Unis ont su capitaliser sur l’opportunité pour réaffirmer leur suprématie dans ce sport.

Contexte historique

Après le boycott des Jeux de Moscou en 1980 par les États-Unis et d’autres nations occidentales, les Jeux de Los Angeles furent à leur tour marqués par un boycott de l’Union Soviétique et de ses alliés du bloc de l’Est. Quinze pays ont participé au boycott des Jeux olympiques d’été de 1984 sous l’égide de l’Union soviétique. L’Afghanistan, l’Allemagne de l’Est, l’Angola, la Bulgarie, la Corée du Nord, Cuba, l’Éthiopie, la Hongrie, le Laos, la Mongolie, la Pologne, la Tchécoslovaquie, l’Union soviétique, le Viêt Nam et le Yémen du Sud

L’Albanie, la Haute-Volta (devenue Burkina Faso le 4 août), l’Iran et la Libye ont également boycotté les Jeux olympiques de Los Angeles pour des raisons politiques, mais ces pays ne faisaient pas partie du boycott mené par l’Union soviétique. L’Albanie et l’Iran sont les deux seuls pays à avoir boycotté les Jeux d’été de 1980 et de 1984.

La compétition de 1984

Le tournoi de basketball masculin s’est tenu du 29 juillet au 10 août 1984, avec la participation de 12 équipes. Les matchs eurent lieu au Forum d’Inglewood, une arène légendaire, celle des Los Angeles Lakers de 1967 à 1999. La qualification automatique a été accordée au pays hôte, ainsi qu’aux vainqueurs des médailles d’or et d’argent des Jeux olympiques précédents dans le tournoi masculin. Les places supplémentaires pour le tournoi masculin ont été attribuées lors des championnats continentaux organisés par la FIBA. 3 pour l’Europe, 3 pour les Amériques, 1 pour l’Asie, 1 pour l’Afrique et 1 pour l’Océanie.

Steve Alford recalls ending MJ's college career, winning Olympic gold with him
L’équipe américaine de 1984 était une très talentueuse. Crédit: USAB

Les États-Unis, dirigés par l’entraîneur Bobby Knight, alors double champion NCAA et coach de l’année 1975, alignèrent une équipe des meilleures équipes de jeunes talents universitaires de l’histoire, parmi lesquels Michael Jordan, meilleur joueur universitaire en 1984 et futur sextuple MVP, Patrick Ewing, futur septuple membre d’une équipe All-NBA et Chris Mullin, futur quadruple membre d’une équipe All-NBA. Cette équipe était vue comme l’une des plus prometteuses, malgré leur relative jeunesse, et comptait récupérer leur médaille d’or après une non participation en 1980.

Les champions olympiques en titre, la Yougoslavie, comptent bien conserver leur titre à Los Angeles. Cela dit, sans Dragan Kićanović, nommé dans l’équipe du mondial 82, parti à la retraite, cette tâche s’annonce difficile. La pression est sur Dražen Dalipagić, le meilleur joueur yougoslave des derniers JO, pour porter cette équipe vers les sommets. L’Italie, médaillée d’argent aux derniers Jeux et championne d’Europe en titre, arrive en 1984 avec le statut d’outsider. Avec des joueurs comme Antonello Riva, meilleur marqueur italien à l’EuroBasket 1983, Renato Villalta, exceptionnel durant le dernier carré et meilleur marqueur italien aux derniers Jeux ainsi que l’incontournable Dino Meneghin, l’équipe d’Italie est très forte sur le papier.

Enfin, l’Espagne, 4e en 1980 finaliste en 1983, joue aussi le rôle d’outsider en 1984. Avec le MVP de l’EuroBasket Juan Antonio Corbalán et Juan Antonio San Epifanio qui était également nommé dans l’équipe du tournoi, la nation ibérique avait de belles armes pour faire mal.

Les moments clés

Dès le début du tournoi de 1984, les États-Unis démontrèrent leur supériorité, remportant leurs matchs de phase de groupes avec des marges confortables. Leur style de jeu rapide, leur défense rigoureuse et leur cohésion d’équipe firent d’eux les favoris pour la médaille d’or.

USA's Patrick Ewing and Michael Jordan take a break during an exhibition game with Indiana in Bloomington, Ind. in preparation for the 1984 Olympics in Los Angeles.
Patrick Ewing et Michael Jordan, les deux figures principales de la Team USA 1984. Crédit : Bob Langer – Chicago Tribune

Ces jeux furent la révélation au monde entier de Michael Jordan. Entre belles performances offensives, finissant notamment meilleur marqueur de son équipe, gros dunks et jeu hyper spectaculaire, Jordan a marqué les esprits de tout le monde durant la compétition. Son coach Bobby Knight, aussi dur soit-il, n’hésitera pas à dire qu’il est le meilleur joueur que j’aie jamais vu. Mais le meilleur joueur de l’équipe était peut-être Patrick Ewing. Le pivot né en Jamaïque était sensationnel lui aussi, crucial à l’intérieur en attaque en défense, dominant les intérieurs adverses qui se mettaient sur son chemin.

En deuxième place du groupe B est l’Espagne. Les ibériques avaient commencé les olympiades de 1984 difficilement, avec une victoire 83–82 sur le Canada. Les espagnols avaient commencé en force, menant 45-32 à 1:45 de la mi-temps, mais les canadiens sont revenus, d’abord avec un run de 8-0 avant la pause, puis au cours de la deuxième mi-temps alors que les joueurs espagnols commettaient beaucoup de fautes, 4 se trouvant exclus dans la même rencontre.

Il reste 8 dixièmes, 83-79 au tableau d’affichage. Howard Kelsey marque le premier lancer franc et dans le second il lance une « pierre » intentionnelle et de derrière lui arrive Daniel Meagher à la vitesse de l’éclair qui attrape un rebond stratosphérique et marque à la stupéfaction de tout le monde. L’Espagne perd ensuite la balle sur la remise en jeu, une prière est lancée à 1 dixième de la fin, mais elle manque. Les espagnols survivent. Les 27 points et 6 rebonds de Fernando Martín et 20 points de San Epifanio ont été très précieux.

Leurs matchs suivants durant la phase de poule furent moins intenses, notamment la défaite face aux américains dans le match pour obtenir la première place. 101–68 comme score final. Le match était pourtant serré au début, avec un score de 46–41 à la mi-temps. Mais le score à la deuxième période fut de 55–27, avec Jordan qui termine la rencontre avec 24 points à 12-14 et 2 interceptions, Ewing avec 15 points, 9 rebonds et 2 contres et 12 points et 12 passes décisives de Leon Wood.

Le Canada quant à lui s’est remis de 2 défaites pour commencer les Jeux de 1984, contre l’Espagne puis les États-Unis après un 89–68 causé en partie par 20 points de His Airness, pour remporter les 3 matchs suivants et se qualifier en tant que 3e. Avec Gerald Kazanowski, Jay Triano, Gregory Wiltjer et Tony Simms qui se surpassent, le Grand Nord a une chance d’aller loin.

Enfin, la dernière équipe à sortir du groupe B en 1984 était l’Uruguay. Pour son grand retour après 20 ans d’absence, le vice-champion des Amériques a eu une phase de poule très mémorable. Pour le match d’ouverture du groupe face à la France, on a eu le droit à une remontada uruguayenne, une bagarre générale au Forum en fin de deuxième mi-temps, et une victoire en prolongations pour l’équipe sud-américaine.

Horacio López était impérial avec 30 points, 12 rebonds, 4 passes décisives et 3 interceptions… bon aussi 8 pertes de balle mais la victoire 91-87 était tout ce qui comptait pour l’Uruguay. Les 22 points de Wilfredo Ruiz, 10 points et 7 rebonds de Luis Pierri et Hébert Núñez et 9 points et 9 rebonds de Luis Larrosa ont aussi beaucoup aidé.

Après 3 défaites consécutives, arrive le dernier match de la phase de poule contre la Chine. Les deux équipes avaient le même bilan, et le vainqueur allait se qualifier en quart. Après un bon début de match pour l’Uruguay, les chinois sont revenus en deuxième mi-temps mais ne sont pas parvenus à égaliser. Victoire 67-74 des sud-américains, portés par le double-double de Núñez, 16 points et 13 rebonds en plus de 2 interceptions et 2 contres. Ajoutez à cela les 19 points, 8 passes décisives et 2 interceptions de López et les 17 points et 8 rebonds de Pierri, et vous avez une équipe qui rejoint la phase à élimination directe.

Le jeune Dražen Petrović aura été décisif face à l’Italie.

Pendant ce temps dans le groupe A, c’est la Yougoslavie qui a fini invaincu, confirmant son statut de tenant du titre en 1984. L’équipe n’a été inquiétée qu’à la dernière journée, où dans un match retour de la finale de 1980, la Yougoslavie a battu l’Italie 69-65, survivant à une remontée italienne en fin de match. Dalipagić a affirmé son statut de leader et, avec ses 19 points, a assuré la victoire de son équipe.

L’Italie quant à elle a fini 2e, mais s’est faite peur face à l’Allemagne de l’Ouest lors de la deuxième journée de la phase de groupe 1984. Menée 33-39 à la mi-temps, l’équipe parviendra à revenir pour s’imposer 80-72 grâce au duo Riva et Villalta qui ont combiné pour 33 points au total.

Pendant ce temps, l’Australie a obtenu la 3e place en 1984. 3 victoires, dont 2 qui ont été très stressantes. Le premier match face au Brésil a très mal commencé. Mené de 4 points à la mi-temps, les champions d’Océanie ont fini par gagner 76-72 grâce aux 22 points, 5 rebonds et 2 interceptions de Philip Smyth et 14 points, 5 rebonds et 2 interceptions de Wayne Carroll.

2 jours plus tard, une nouvelle remontée permet à l’Australie de l’emporter d’un point face à l’Allemagne de l’Ouest. Les 20 points, 6 rebonds et 2 interceptions d’Ian Davies, les 10 points, 7 rebonds et 5 passes décisives de Carroll et les 8 points, 9 passes décisives et 3 de Smyth ont permis à l’Australie de gagner 66-67. Avec une victoire supplémentaire la dernière journée contre l’Égypte, les Boomers atteignent les quarts.

Après 3 défaites, dont 2 très serrées, l’Allemagne de l’Ouest s’est rattrapée en battant l’Égypte, puis le Brésil lors de la dernière journée dans la bataille pour la dernière place qualificative en 1984. Une victoire 78-75, arrachée grâce aux 36 points d’un jeune Detlef Schrempf. Pour la première fois de son histoire, l’Allemagne de l’Ouest accède à la phase à élimination directe de la compétition.

American basketball player Michael Jordan (#9) in action for the United States team in their quarterfinal game against West Germany during the knockout stage of the Men's basketball tournament at the 1984 Summer Olympics at the Forum in Inglewood, California, USA on 6th August 1984. (Photo by Eileen Langsley/Popperfoto via Getty Images)
Michael Jordan a eu du mal face à l’Allemagne de l’Ouest. Crédit : Eileen Langsley – Popperfoto

Lors de la deuxième phase de la compétition de 1984, les États-Unis ont continué à dérouler leur jeu. Seule l’Allemagne de l’Ouest a mis légèrement la Team USA en danger avec un match qui s’est terminé sur le score 78-67. Steve Alford était le héros du match pour les américains avec 17 points et 4 interceptions. Jordan lui avait 14 points, mais aussi 6 pertes de balle. Après le match, Bob Knight était furieux, et l’a fait savoir.

“Tu devrais avoir honte de la manière avec laquelle tu as joué. Tu n’as jamais aussi mal joué” aurait déclaré Knight à MJ, sur le point de pleurer.

Jordan fait une performance plus discrète en demi-finale, avec 13 points et 1 perte de balle, et c’est alors que Mullin prit les choses en main avec 20 points, tandis que Ewing a 10 points, 7 rebonds, 2 interceptions et 2 contres dans une victoire 78-59. Les américains atteignent une nouvelle fois la finale en 1984. Le Canada quant à lui ira en petite finale, match qui sera perdu 88-82 face à la Yougoslavie. Fin de parcours amère, mais la 4e place a égalé ce qui reste encore à ce jour le deuxième meilleur parcours canadien de son histoire aux Jeux Olympiques.

La Yougoslavie se contentera d’une médaille de bronze en 1984 après avoir été éliminée par l’Espagne en demi-finale. Les champions olympiques en titre n’ont pas eu l’occasion d’affronter les américains pour la troisième fois en finale après que Josep Maria Margall, Andrés Jiménez et San Epifanio aient combiné pour 41 des 74 points espagnols contre 61 pour les yougoslaves. Pourtant, l’équipe des Balkans était bien partie avec une avance de 40-35, tandis que Dalipagić pouvait compter sur un autre Dražen, Petrović, qui à 19 ans était le lieutenant de cette équipe.

Margall a réalisé l’un des meilleurs matchs de sa vie. Sa précision a marqué les esprits. Fernando Romay a imposé sa taille sur les planches. Et José Luis Llorente a apporté la solidité nécessaire pour ne pas souffrir face à un adversaire qui a été battu par un score historique de 39-21 en deuxième mi-temps. Une victoire historique après celle contre l’Australie, qui fut définitivement le tournant du tournoi pour les espagnols.

San Epifanio et Martín ont combiné pour 50 des 101 points espagnols durant la rencontre pour contrer les 93 australiens. Après un pourtant bon départ de 33-18, les Océaniens étaient revenus dans la rencontre pour finir la première mi-temps avec le score de 45-38. Les Boomers ont ensuite maintenu cette pression, ne relâchant pas les opportunités. Hélas, une faute offensive d’Ian Davies sur Andrés Jiménez à une minute de la fin a apporté la tranquillité d’esprit nécessaire pour les ibériques.

La finale du tournoi, disputée le 10 août 1984, oppose les États-Unis à l’Espagne. Grâce à un jeu de tirs extérieurs qui avait été considéré comme inconstant auparavant et une défense acharnée et intense, très avancée pour l’époque, les américains ont complètement surpris une équipe qui était déjà entrée dans l’histoire.

Les Espagnols avaient réussi à mettre en place une défense de zone en première mi-temps de leur premier match durant les Jeux de 1984, et ont mélangé leurs défenses dans les premières minutes de la finale. Mais quand les tireurs américains ont eu autant de succès à l’extérieur, une zone est devenue inutile. Offensivement, le seul espoir de l’Espagne était d’essayer de ralentir le rythme autant que le permettait le chronomètre de 30 secondes. Mais ce rythme plus lent est inhabituel pour une équipe qui a connu le succès dans le jeu international en jouant à haut tempo.

L’Espagne, qui avait commencé le match avec un pourcentage de tir de 56,3, n’a réussi que 40 % de ses tirs à la mi-temps. Les Espagnols ont commis 15 pertes de balles pendant la mi-temps, dont 8 étaient des interceptions américaines. Même après avoir cessé de prendre des tirs à un rythme aussi élevé, les Américains ont terminé la mi-temps avec un pourcentage de 64,5, emmenés par Jordan, qui a réussi 7 de ses 10 tirs.

Michael Jordan (États-Unis) aux Jeux olympiques d'été de 1984
Même la détente de Michael Jordan est rentré dans la légende: Crédit : PCN Photography

Les Américains remportèrent une victoire éclatante avec un score de 96-65 et remporte la médaille d’or en 1984. Michael Jordan, avec 20 points et 3 interceptions, Sam Perkins, avec 12 points, 7 rebonds et 2 interceptions, et Wayman Tisdale, avec 14 points et 6 rebonds, furent les acteurs clés de cette victoire décisive.

Cette victoire marqua la huitième médaille d’or olympique des États-Unis en basketball masculin, réaffirmant leur place au sommet de ce sport. L’équipe de Team USA 1984 restera comme l’une des équipes les plus dominantes de l’histoire. L’équipe a remporté ses matchs par une moyenne de 32,1 points et a pris place aux côtés des champions olympiques de 1960, considérés par beaucoup comme la plus grande équipe de basketball amateur.

Elle restera aussi comme la dernière équipe amateur des États-Unis à remporter le titre olympique. La médaille d’argent en 1984 a marqué un avant et un après dans le basket espagnol. Un boom qui a marqué plusieurs générations. Un événement sans précédent qui ne se reproduira pas avant le XXIe siècle.

Impact et héritage

Les Jeux Olympiques de 1984 eurent un impact significatif sur le basketball masculin. La domination des États-Unis, malgré l’absence des grandes équipes du bloc de l’Est, montre la profondeur de talent et la qualité de formation des joueurs américains. Cette édition des Jeux contribue à populariser encore davantage le basketball aux États-Unis et dans le monde entier.

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La Team USA de 1984 est resté dans l’histoire. Crédit: Getty Images

Le basketball masculin aux Jeux Olympiques de 1984 à Los Angeles symbolise une période de transition et de consolidation pour les États-Unis dans ce sport. La victoire éclatante de l’équipe américaine et l’émergence de futures légendes du basketball ont laissé un héritage durable, inspirant des générations de joueurs et consolidant la position des États-Unis comme leader mondial du basketball. Mais seront-ils toujours les numéros 1 quand l’URSS reviendra ?