Un nom qui sonne mieux à l’oral qu’à l’écrit, un retour détaillé en quelques stats, images, mots sur la semaine passée en WNBA et une phrase d’intro trop longue : c’est le début de l’Hebdo’W.

Quelques jours après avoir découvert le championnat, voilà la suite de mes observations sur la ligue, moins subjectives et plus orientées tactiques. Pour ce premier hebdo, direction la capitale avec un focus sur les intrigantes filles des Mystics et leur coaching qui pose question avant d’aller se balader dans le désert du Nevada puis dans la grosse pomme.
Washington Mystics, qui doit mener le navire ?
L’équipe de la capitale a surpris plus d’un suiveur sur ce début de saison grâce à son bilan plus que correct : 3 victoires pour 4 défaites. Des résultats positifs pour cette franchise en reconstruction. En effet, Sydney Johnson n’a aucune pression liée aux résultats cette saison : personne ne s’attend à ce que les Mystics enchaînent les victoires et se qualifient en playoffs dès cette année. Alors, ce bon début de saison doit être une excellente nouvelle pour le Front Office non?
La situation n’est pas aussi simple. La manière dont joue Washington, de surcroît la hiérarchie au sein de l’effectif, pose question. L’effectif est un des plus jeunes de la ligue avec la présence de plusieurs rookies comme Kiki Iriafen ou Sonia Citron, mais aussi des joueuses encore en développement comme Shakira Austin, Aaliyah Edwards ou Jade Melbourne qui n’ont pas encore fêté leur 25 ans. En somme, un « young core » très fourni et ce sur plusieurs postes.
Qu’en est-il sur le parquet ?
Gonfle en main, les rênes de l’équipe sont données à Brittney Sykes, arrière expérimentée qu’on ne présente plus. Elle entame en 2025 sa neuvième saison dans la ligue et brille par ses qualités athlétiques notamment. C’est une formidable joueuse qui dénote des autres profils présents dans l’effectif. Sykes est, avec Stefanie Dolson, la seule joueuse à dépasser les 30 ans. Un différence d’âge qui n’a rien de problématique, sauf quand on envisage l’avenir de l’équipe à moyen et long terme. Les deux trentenaires n’ont pas vocation à s’installer durablement dans l’équipe compte tenue de la reconstruction.
Pourtant, Brittney Sykes est incontestablement l’option numéro une des Mystics sur ce début de saison. Sur le parquet, rien ne prouve que l’Américaine est en dehors du projet sportif de l’équipe. Elle n’a jamais eu de rôle aussi important dans sa carrière et semble avoir le champ libre dans sa sélection de tirs. Sykes possède un USG% de 32,3, seule Satou Sabally du Mercury fait mieux dans toute la Ligue. Le tout combiné avec une efficacité au tir plus que moyenne, malgré sa capacité à obtenir beaucoup de lancers.
Pour résumer, Sykes a un volume de superstar au sein de cette équipe de Washington mais n’en a pas l’efficacité. Depuis le début de sa carrière, elle n’a jamais marqué autant de points ni provoqué autant de lancers francs. Ca, c’est le côté face de la pièce. Côté pile, ce sont les pourcentages les plus bas et les taux de pertes de balle les plus hauts en neuf ans. Plus les paliers sont élevés, plus ils sont difficiles à atteindre. Miser sur elle pour remporter des matchs n’est, sur ce faible échantillon, pas une bonne idée. Alors pourquoi persister si le mariage semble voué à l’échec ?
Le Front Office des Mystics souhaite s’en servir de marchandises pour obtenir des picks ou des contrats plus intéressants pour eux. La joueuse devrait attirer des prétendants, à coup sûr. Le passage au révélateur du haut volume est compliqué, cependant un retour dans un rôle plus restreint pourrait satisfaire tout le monde, future équipe comme joueuse. La question désormais, c’est quand ? Puisque chaque match que Brittney jouera sous les couleurs de Washington sera une opportunité de moins pour les plus jeunes qui l’entoure.
Et ce constat vaut aussi pour Stefanie Dolson et Sug Sutton, respectivement 34 et 27 ans. L’intérieure et la meneuse occupent, tout comme Sykes, un poste de titulaire depuis le début de saison. Cette omniprésence de joueuses hors timeline dans le starting five, 3 sur 5, relaie logiquement des filles prometteuses sur le banc. Jade Melbourne et Shakira Austin notamment, les deux joueuses rongeant leur frein depuis sept matchs malgré des performances plutôt positives.

Maintenant que les perspectives d’avenir semblent claires pour les vétéranes, il est temps de se pencher sur les plus jeunes. Qui pour récupérer les places dans le starting five et le rôle de leader dans cet effectif ?
C’est une question qui ne nécessite pas de réponse immédiate. Le but d’une reconstruction est justement de prendre le temps, de laisser venir et d’observer. Les débuts de Sonia Citron sont très satisfaisants.
La rookie montre d’excellentes choses des deux côtés du terrain. Elle est capable de jouer sans ballon et de créer son propre tir malgré des qualités athlétiques loin d’être impressionnante. Défensivement, quelques protections de cercle suite à des rotations m’ont fait bondir de ma chaise, Citron est déjà impactante.
De même pour Kiki Iriafen, la rookie d’1m90 tourne en double double et possède déjà un rôle précieux dans le jeu des possessions du Mystics. Parmi les joueuses jouant plus de 20 minutes par match, seules Angel Reese et Jessica Sheppard ont un OREB% ( capacité à obtenir des rebonds en fonction des rebonds disponibles) plus élevé qu’elle.
Quand au rôle de leader, qui dans l’imaginaire collectif est souvent associé aux plus expérimentés, Jade Melbourne semble avoir le tempérament pour l’embrasser. Elle est souvent la première à encourager, à courir sur les ballons perdus et donner le ton en défense. Dans la mesure ou gagner des matchs basket n’est pas la priorité du côté des Mystics, en avoir l’envie peut suffire pour mener un groupe dans la bonne direction.
Il serait désormais temps pour Washington de laisser jeunesse se faire.
Elizabeth Kitley, l’anomalie statistique

Alors que je me baladais dans des outils statistiques, je suis tombé sur deux d’entre eux qui m’ont scotché. Les deux chiffres concernent la même joueuse, une certaine Elizabeth Kitley évoluant pour les Las Vegas Aces. J’ai poussé mes recherches plus loin, lu deux articles et regardé des images pour en arriver à cette conclusion : ces stats ne mentent pas. Avant de rentrer dans les détails, voici une courte présentation d’une joueuse encore méconnue.
Elizabeth Kitley possède un atout majeur pour exceller au basket-ball : sa taille. Elle mesure près d’1m98 avec une envergure de 2 mètres, des dimensions assez exceptionnelles. Logiquement, c’est une intérieure qui a évolué au poste de pivot durant son cursus universitaire chez Virginia Tech. Elle a brillé à l’université, devenant la détentrice du record de rebonds et de points de sa conférence sous le maillot des Hokies.
Les scouts WNBA se sont penchés sur son profil et ce sont ceux de Las Vegas qui ont obtenu gain de cause : Elizabeth est draftée en 24ème position par les Aces. Malheureusement, sa saison rookie se déroulera en dehors des parquets à cause d’une grave blessure aux ligaments croisés. Désormais rétablie, elle a joué ses premières minutes en WNBA le 17 mai dernier face au Liberty.
Maintenant, revenons en à nos moutons. Les statistiques en question concernent le Steal% et le Block% qui correspondent à la capacité d’un joueur à réaliser des interceptions et des contres. Combinés, ce sont des bons indicateurs du playmaking défensif à défaut de prouver le niveau réel d’un défenseur. Et ce sont dans ces deux catégories que brille Elizabeth Kitley. 3,5 pour le Stl%, 8,3 pour le Blk%, des chiffres ahurissants.
Bien entendu, les échantillons utilisés pour calculer ces statistiques sont très faibles étant donné le peu de matchs joués par Kitley, ces stats sont vouées à diminuer. Cependant, toute statistique existe pour donner une tendance ou la puce à l’oreille. En effet, Elizabeth est impressionnante par séquence, preuve en images.
Ce qui saute aux yeux au premier abord, c’est sa taille, elle est plus grande que les autres. Et ce qu’elle en fait est remarquable. Les mains sont actives, prête à dévier le ballon dès que l’occasion se présente. C’est plutôt pratique dans une couverture en drop qui consiste à rester assez bas pour protéger le panier suite à un écran. Ses longs segments dissuadent de passer au sol, en l’air même sur le côté comme dans le clip. Dans une ligue où le spacing n’est pas toujours optimal, avoir une joueuse capable de restreindre davantage l’espace de jeu est un vrai avantage. Kitley peut réduire un zone déjà restreinte.
En un contre un, elle a le mérite de ne pas donner ses appuis sur les close out, comme ci-dessus face à Dominique Malonga. La Française qui est une des rares joueuses à, presque, jouer dans sa cour en terme de taille. Pour autant, ça n’a pas dérangé Kitley qui a bien protégé son cercle face à la joueuse du Storm. Offensivement, Elizabeth est encore très brute. Malgré tout, quelques flashs peuvent laisser rêveur.
Les échantillons sont encore trop maigres pour tirer des conclusions, si ce n’est qu’il va falloir se brancher sur les matchs de Las Vegas ces prochains jours pour en savoir plus. Franchise des Aces à laquelle le profil de Kitley pourrait faire du bien dans la mesure ou l’actuelle titulaire au poste de pivot, Kiah Stokes ne réalise pas un excellente début de saison. La rookie pourrait être utile dès son année une dans cette équipe de stars qui doit encore trouver son rythme.
Le Liberty de New York parti pour marquer l’histoire ?
Les championnes en titre ont entamé la saison 2025 à un rythme infernal. Auréolées de leur première bague, on aurait pu croire que les filles de Sandy Brondello prendraient la saison régulière à la légère, ce n’est pas le cas. Après une entame parfaite contre les Aces, elles ont continué leur série de victoires pour afficher un bilan de 7-0 après un large succès 48 points (100-52) face au Connecticut Sun.
Au-delà des performances victorieuses, c’est la manière qui impressionne. Elles produisent un basket-ball plaisant et moderne. C’est une des équipes qui joue le mieux le jeu des analytics, à savoir prendre les tirs les plus rentables : le 3-points. Elles peuvent évoluer dans un five out efficace qui favorise l’accès au cercle et les shoots ouverts et ce grâce à la présence d’intérieures capables d’être des menaces au large, Jones et Stewart, et de shooteuses redoutables, Ionescu et Johannes en sortie de banc. Le Liberty semble parti pour une régulière sans accrochage, déroulant leur basket avec une certaine facilité. Pour preuve, voici les ratings qui sont unanimes :
New York possède la meilleure attaque et la meilleure défense de la ligue. Une performance qui montre la qualité du début de saison proposée par la franchise. Le tout donne un Net Rating, différence entre l’attaque et la défense, de + 19. Oui, +19. C’est tout simplement prodigieux. L’intégration de Natasha Cloud se passe à merveille, Breanna Stewart évolue à un niveau exceptionnel et Sabrina Ionescu peut se permettre un début plus en douceur. Tout se passe pour les mieux chez les championnes en titre.
Il faut cependant ajouter que leur calendrier leur a été jusqu’à présent plutôt favorable. En effet, les filles de Sandy Brondello ont affronté Las Vegas, Golden State deux fois, Washington, Chicago et Indiana. Dans le lot, on ne retrouve que 2 matchs contre des équipes compétitives. Pour que des conclusions puissent être tirées, il va falloir attendre de voir New York face à Minnesota ou Phoenix. Prochain choc face au Mercury le 20 juin.
Marine Johannes, la » gunwoman »
Un petit mot sur Marine Johannes pour terminer. La joueuse du Liberty, de retour sur les parquets WNBA après une année en Europe, a embrassé à nouveau son rôle en sortie de banc. Johannes débarque sur le parquet pour mettre des shoots de loin, quitte à arroser. Un rôle que l’on qualifie chez les garçons de » gunman » ou » beretta », alors j’utiliserai » gunwoman » ici.
La gunwoman vient sur le parquet dans un but précis, prendre des tirs et scorer grâce notamment à son shoot extérieur. Créer pour les autres n’est pas sa priorité. Et c’est en cela que Johannes remplit parfaitement sa fonction. La française n’est pas en reste en ce qui concerne la prise de shoot : 85% de ses points proviennent des 3 points, personne ne fait plus dans la ligue. Cette statistique ne signifie pas grand-chose seule, c’est pourquoi il faut la relier avec d’autres pour qu’elle prenne plus d’ampleur et révèle à quel point Marine Johannes tend à se restreindre dans un rôle de gunwoman cette année.
Lors de sept joués pour le moment, la Française n’a jamais réalisé si peu de passes ni pris si peu de tirs à 2 points. Tous ses chiffres de création et de scoring sont, pour le moment, en baisse. Par exemple, prenons le AST/TOV, un outil que j’apprécie qui mesure le passing d’une joueuse par rapport à son nombre de perte de balle. Et bien là encore, les chiffres sont assez claires : avec 0,6, Johannes fait pire que 80% de la ligue.

Encore une fois, rien d’alarmant ni même de définitif, c’est un simple constat sur un petit échantillon. De plus, cette nouvelle version de Marine Johannes s’accorde avec les besoins du Liberty. L’équipe n’a sans doute jamais été aussi forte et les besoins en création principale sont fournis par Sabrina Ionescu et l’arrivée de Natasha Cloud. En d’autres termes, avoir une Marine capable de prendre feu quand elle en est capable, quitte à connaître des soirs sans, suffit à Sandy Brondello. Jusqu’à présent, le Liberty possède une telle marge de manœuvre qu’il peut se permettre de compter dans ses rangs une Johannes à 37% au shoot.
Simplement, c’est assez frustrant de la voir sous utilisé quand on connait ses qualités qui ne se résument pas à son shoot extérieur. Espérons que cette tendance s’amenuise grâce à une meilleure intégration dans l’effectif. À suivre.