Wes Unseld

Wes Unseld est-il vraiment le meilleur joueur des Bullets titrés en 1978 ?

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Depuis la création du trophée de MVP des finales en 1969, le meilleur joueur de l’équipe qui remporte la série de finales obtient un titre individuel (à l’exception de la première édition où Jerry West est plébiscité malgré la défaite des Lakers). Ce titre est rarement remis en cause, mais la dernière controverse à ce sujet était le choix d’Andre Iguodala en 2015, préféré à Stephen Curry, le MVP en titre qui était de loin le meilleur joueur des Warriors sur la série. Mais un choix très contestable et plutôt méconnu avait déjà eu lieu en 1978 : celui de Wes Unseld plutôt qu’Elvin Hayes, qui a contribué à placer Wes Unseld comme meilleur joueur de cette équipe et de la franchise.

Les Bullets 1978 : un gros collectif

Au crépuscule de la saison 1977-78, les Bullets, coachés par Dick Motta présentent un effectif fourni avec pas moins de 3 futurs hall of famers pour composer le frontcourt de l’équipe ; le discret mais tellement efficace Bob Dandridge (n°10), un ailier bon scoreur et déjà champion avec les Bucks en 1971 qui vient disputer sa première saison dans la capitale. Le génial Elvin Hayes (n°11), joueur monstrueux trop souvent oublié aujourd’hui, est un des rares à pouvoir se targuer d’être dans le top 15 des meilleurs rebondeurs et des meilleurs scoreurs de tous les temps en NBA (4e aux rebonds et 12e au scoring). Enfin, la pierre angulaire du système défensif des Bullets, Wes Unseld (n°41), un pivot besogneux, très gros défenseur et rebondeur, surtout pour sa taille de tout juste 2 mètres, qui est aussi un des deux seuls joueurs à avoir été élu MVP dès sa saison rookie avec Wilt Chamberlain.

L’équipe compte également dans ses rangs Mitch Kupchak (n°25), qui apportait du scoring en sortie de banc au poste 4, ainsi que le all-star Phil Chenier (en bas à droite de l’image ci-dessus) au poste d’arrière. Malheureusement, Chenier se blesse au dos au bout de 36 matchs et est contraint de manquer le reste de la saison, play-offs compris.

Saison compliquée, play-offs maîtrisés

Malgré un effectif excitant sur le papier, les Bullets ont du mal à se lancer et perdent 6 de leurs 10 premiers matchs en saison régulière. L’équipe va par la suite parvenir à réaliser quelques petites séries de victoires au cours de la saison (jamais plus de 5 matchs) mais ne parvient jamais à obtenir des résultats vraiment réguliers. Au terme d’une saison régulière compliquée par les blessures, où aucun des joueurs de l’effectif n’est capable de participer aux 82 matchs, les Bullets parviennent tout de même à se hisser à la 3e place de la conférence Est avec un bilan de 44 victoires pour 38 défaites, suffisant pour avoir l’avantage du terrain au premier tour de la post season.

À l’époque, le format des play-offs était bien différent de celui d’aujourd’hui : les deux premières équipes de chaque conférence obtiennent un « bye » et sont directement qualifiées pour le deuxième tour. Ensuite, le 3e de conférence affronte le 6e (le gagnant de la série affronte le 2e) et le 4e affronte le 5e (le gagnant affronte le 1er) dans une série au meilleur des 3 matchs. Le deuxième tour, les finales de conférence et les finales NBA sont disputées au meilleur des 7 matchs.

Pour ce qu’il en est de nos Bullets, l’équipe est quasiment au complet et les joueurs peuvent enfin se montrer sous leur meilleur visage. Ils affrontent les Hawks d’Atlanta au premier tour, à la suite de deux matchs serrés, dont un qui va jusqu’en prolongations, l’équipe de la capitale se qualifie pour les demi-finales de conférence, où les Spurs les attendent.

Cette série face aux Spurs de George Gervin et Larry Kenon est très disputée également, mais Washington va finir par s’en sortir en 6 matchs, notamment grâce à un fantastique Elvin Hayes qui tourne score 25 points et prend 15 rebonds pour clore une série qu’il aura dominée des deux côtés du terrain.

Les Bullets ont désormais atteint la dernière marche avant les finales et ce sont les 76ers de Philadelphie qui se dressent sur leur chemin. Avec des joueurs comme Doug Collins, Julius Erving ou encore World B. Free, Philadelphie est clairement l’équipe la plus affutée que les Bullets ont eu à affronter jusqu’à lors. Une nouvelle fois, Elvin Hayes réalise une série époustouflante et hausse encore davantage son niveau de jeu : il tourne à 23 points, 16 rebonds et 3 contres de moyenne sur les 6 matchs de la série que Washington finit par remporter dans une fin de match 6 à couper le souffle, où c’est Wes Unseld qui capte un importantissime rebond pour sécuriser la victoire des siens 101-99.

Les Finales, puis le scandale ?

Portés par un Elvin Hayes qui marche sur l’eau, les protégés de Dick Motta retrouvent les SuperSonics de Seattle en finale. A l’aube de cette série, il est presque impossible de ressortir un favori tellement les deux effectifs sont denses. Effectivement, les Sonics ont la chance de pouvoir s’appuyer sur un trio de guards aussi talentueux que complémentaires : Gus Williams, Fred Brown et Dennis Johnson, avec Jack Sikma et Marvin Webster pour remplir la raquette d’une équipe qui posera bien des soucis aux joueurs de Washington.

Les premiers matchs sont à couteaux tirés, et les deux équipes se rendent coup pour coup. A 1-1 dans la série, les Bullets jouent et perdent le match 3 à domicile malgré une performance XXL une nouvelle fois de la part d’Elvin Hayes qui marque 29 points et capte 20 rebonds, tandis que Wes Unseld n’inscrit que 2 petits points à 1/4 au tir, et Washington perd ce match d’un point 92 à 93. Ils parviennent à rebondir lors du match 4 qu’ils remportent en prolongations et où tous les cadres répondent présent malgré l’expulsion d’Hayes pour 6 fautes.

Après une défaite dans un match 5 où personne n’est vraiment au niveau côté Washington, une victoire dans le 6e match à domicile est impérative. Dans le sillage d’un Elvin Hayes dominant à 21 points et 15 rebonds, malgré son pourcentage au tir d’à peine 40%, les Bullets étrillent les Sonics 117-82 dans le seul match de la série dont l’écart dépasse les 8 points au buzzer final.

La tension atteint ensuite son paroxysme, le très redouté match 7 va devoir départager les deux équipes. Au terme d’un match sous haute tension mais maîtrisé, les coéquipiers d’Elvin Hayes s’imposent alors que ce dernier réalise son pire match sur la série, et est une nouvelle fois expulsé pour 6 fautes. Tandis que Wes Unseld score 15 points, prends 9 rebonds et distille 6 passes. C’est très probablement ce match 7 abouti qui donne l’avantage d’une courte tête à Wes Unseld dans la course au MVP des Finales.

Néanmoins, sur l’ensemble de la série, il est tout à fait clair qu’Elvin Hayes était le meilleur joueur parmi les protégés de Dick Motta. Si on compare les statistiques individuelles : Hayes score deux fois plus que Wes Unseld (20.7 contre 9.0), prends plus de rebonds (11.9 contre 11.7) et intercepte plus de ballons (1.6 contre 0.6). Sans oublier que Wes Unseld ne contre qu’un seul tir sur toute la série, pendant qu’Hayes tourne à deux blocks par match. On pourrait même favoriser Bob Dandridge pour la récompense, lui qui était meilleur que son pivot dans toutes les catégories statistiques exceptés les rebonds.

Ce choix est très peu remis en cause aujourd’hui, et participe à l’oubli collectif de la légende Elvin Hayes, trop peu souvent cité parmi les meilleurs postes 4 de tous les temps en NBA, lui qui n’a jamais remporté un seul titre individuel (le titre de meilleur scoreur n’étant pas une récompense) alors qu’il en avait le talent et les épaules. De son côté, Hayes se focalise sur le titre remporté, plutôt que sur la récompense individuelle :

« Tu peux être aussi fort que tu veux, on te juge sur ta capacité à remporter un titre ou non. Tu dois avoir gagné un titre pour pouvoir dire que tu as réalisé ton rêve. »

Elvin Hayes

En résumé, en 1978, les Bullets de Washington ont un effectif bien garni, et malgré une saison régulière en demi-teinte, ils parviennent à atteindre leur meilleur niveau pour les play-offs. Notamment à l’image d’Elvin Hayes, qui va porter Washington sur toute la campagne de post season des deux côtés du terrain, en tournant à 22 points, 13 rebonds et 2.5 contres sur celle-ci. Une fois les finales remportées, son coéquipier Wes Unseld lui est préféré pour le titre de MVP des Finales malgré une ligne de stats beaucoup moins fournie et un impact défensif décevant pour un joueur comme lui. Cette absence de titre individuel est sans nul doute la raison qui évince Elvin Hayes de la mémoire collective, trop peu souvent cité parmi les géants du basket de nos jours.

Nicolas Bulach

19 ans - Celtics/Spurs (Wemby oblige) - rédac'
Grand fan de sport (foot et basket en particulier) et étudiant dans le management sportif. Je suis tombé dans le basket en regardant les vidéos de CodJordan23 sur 2K15 et de The Ball Never Lies. Admirateur des anciens comme Rodman, KG ou encore Gary Payton. Et amoureux de Tatum depuis son arrivée dans la ligue.
Parfois je dis et retweete des conneries sur Twitter aussi (@_n_bc__).

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