Si nous savions que les chances pour Thomas Heurtel de faire partie du groupe France cet été était presque compromise, on avait tout de même le mince espoir de voir son nom se glisser dans la liste de Vincent Collet. Car si le joueur vieillit, son talent reste et il est toujours ce meneur gestionnaire et complet qui a tant marqué l’Europe. Son profil semblait essentiel pour les JO au vu des récentes déceptions pour l’équipe de France sur ce même poste. De plus, les deux monstres qui occuperont notre raquette auront certainement besoin d’un joueur capable d’organiser le jeu autour d’eux. Une décision qui fait d’autant plus débat quand on sait que d’autres sportifs français pourront participer aux JO, alors que ces derniers ont également des contrats en Russie.
Thomas Heurtel, un parcours exemplaire et un coéquipier modèle
Thomas Heurtel, l’enfant de Agde, a débuté le basket alors qu’il n’avait que 7 ans, et il n’attendra pas longtemps pour voir ses ambitions décollés. En effet, alors que le meneur n’a que 12 ans, il est déjà repéré par le club de Pau, et est sélectionné par les coachs pour faire partie d’une équipe avec un objectif Sport-étude pour les minimes, un moyen de développer son jeune talent rapidement. Il réalisera toutes ses années juvéniles à Pau qui ont été couronné d’une grande réussite, en y remportant notamment le championnat de France Cadet en 2006 avec son club, battant notamment Rodrigues Beaubois et le Cholet Basket en demi finale, puis Nancy en finale. Il est alors déjà considéré comme un meneur très prometteur alliant vista et efficacité mais aussi une fougue et un culot qui le caractérise encore.
Après un passage juvénile qui s’est révélé très convaincant, son club lui laisse logiquement une place et une opportunité chez les pros. Il y passera encore 2 ans, et se verra lors de sa deuxième année remettre le trophée de meilleur espoir du championnat de France Elite, avec une moyenne 10 points et 6 passes décisives en 27 minutes de jeu. Après une relégation de son club formateur à l’échelon inférieur, le natif de Béziers décidera de quitter son club et obtiendra une offre de l’ASVEL qui le prêtera à la SIG de Strasbourg afin qu’il puisse poursuivre son développement. Une année très décevante pour lui, à qui on avait promis plein de responsabilités et qui aura finalement un temps de jeu plus limités, malgré que ses performances suivent. De plus une 14ème place en championnat le convainc alors de tenter l’aventure étrangère.
Il choisira l’Espagne où il gravira les échelons pendant 5 ans, d’abord à Alicante, puis à Baskonia. Ses performances ont plu et le meneur français va pouvoir gouter pour la première fois à l’Euroligue, lorsqu’il rejoindra le club d’Efes basé à Istanbul. Là encore, il deviendra un cadre indispensable et appréciera particulièrement le parfum de l’Euroligue. La suite de sa carrière en club sera marquée par des performances toujours aussi constante mais aussi par des conflits avec les différents clubs par lesquelles il est passé, notamment à Barcelone et à Madrid. Ce qui ne l’a pas empêché d’être un élément important de ces derniers clubs. Un joueur qui a donc réussit à conquérir tous les clubs dont il a porté le maillot, autant par son intelligence dans le jeu que par le sérieux et la cohésion qu’il est capable d’apporté à un vestiaire.
Effectivement si on reprend toute sa carrière, Thomas Heurtel semblait être un élément idéal pour l’Equipe de France, si cette dernière manquait d’un meneur gestionnaire, notamment dans les moments chauds, durant la dernière coupe du monde, Thomas Heurtel semblait être l’homme de la situation, et on pouvait penser déjà qu’il serait le joueur qui pourrait combler cette sérénité dans le money time. Mais évidemment ses qualités et son utilité ne s’arrêtent pas là…
Globalement, c’est un joueur qui possède une très bonne vitesse, des compétences en dribble superbe et efficace, et surtout un passeur hors pair qui a le sens du jeu avec lui. Il est également un scoreur régulier, et un joueur difficile à contenir et à défendre surtout quand il est en confiance, tant il est imprévisible et à un panel de jeu large. Si on pouvait critiquer un physique un peu faible et une défense assez légère, il revendique qu’il a fait de gros progrès dans ses secteurs depuis son arrivée au Zenith.
Il remercie le championnat russe pour cela, qui est réputé pour être un championnat particulièrement dur physiquement, à défaut d’un sens tactique moins important qu’en Euroligue. Ce championnat s’endurcit encore de plus en plus grâce à une arrivée récente et massive de joueurs américains qui n’ont pas eu leur chance dans leur pays.
Mais au-delà de toute la dimension sportive du joueur, il est décrit notamment en Equipe de France comme un coéquipier modèle, notamment par l’ancien capitaine et légende des Bleus, Tony Parker :
« Un vrai bosseur, perfectionniste qui cherche a impliqué chaque joueurs dans le projet Bleu. C’est évidemment un gars plus qu’essentiel à l’équipe. »
Quand on voit tous ses accomplissements avec les Bleus (champions d’Europe en 2013, médaille de bronze à la coupe du monde 2014, médaille d’argent aux JO de Tokyo en 2021), son expérience (99 sélections avec les Bleus), l’apport qu’il peut apporter de part son profil, son talent qui reste toujours immense, et sa mentalité de gagnant qui entraîne tous ses coéquipiers, on a du mal a trouver une raison purement sportive à sa non-sélection, et les raisons politiques défendues par la Fédération française de basket et le Ministère des sports sont très controversées…
Transfert au Zénith Saint-Pétersbourg, la source majeur des nombreux conflits pour l’international français
Depuis sa signature officielle en automne 2022, au Zénith Saint-Pétersbourg, Thomas Heurtel n’est donc plus sélectionnable avec l’Equipe de France. Cela a donc été l’origine majeur de ses conflits et il dénonce un double discours des dirigeants de la Fédération française de basket concernant sa future situation en Russie. La Fédération lui avait annoncée qu’elle prendrait son parti et le défendrait coûte que coûte contre les critiques de ce transfert. Malheureusement pour lui, ça a été tout le contraire et il a dû essuyer les critiques sans rien dire, pendant plus d’un an et demi.
Un épisode compliqué pour lui, qui n’aura pas été sans conséquence. Car oui, au-delà de cette absence en Equipe de France, il signale en outre des critiques et des menaces qu’il a pu observer et endurer sur ses réseaux sociaux. Il accuse ici les médias d’alimenter une parole et une pensée fausse sans avoir tous les éléments de sa signature.
En premier lieu, son départ vers le Zénith, et donc vers la Russie a été fait à contrecœur. Car oui le meneur français avait été libéré par la Real Madrid, après qu’il est décidé de sortir en boite de nuit, la veille d’un match face à l’équipe du Panathinaïkos d’Athènes. Une erreur qui le ronge encore de l’intérieur, contient d’avoir détruit une situation rêvée, dans un grand club comme le Réal Madrid, il est évident qu’il aurait certainement pu continuer voir finir sa carrière là-bas, avec une situation plus que stable où il aurait pu également jouer enfin le final four de l’Euroligue, l’un de ses plus grand regret.
Après cet évènement Thomas Heurtel sera mis à l’écart du groupe et ne jouera quasiment pas une minute jusqu’à la fin de la saison. À la fin de cette dernière, le club met officiellement un terme à sa relation avec l’enfant d’Agde. A la suite de cet erreur et de cet échec, Thomas Heurtel doit retrouver un nouveau club et il recevra de nombreuses offres, notamment de clubs d’Euroligue. Mais alors pourquoi a-t-il choisi le Zénith ?
Les raisons sont assez simple, la première, et il ne l’a jamais caché, ni démenti, est économique. En effet se sachant en fin de carrière, il expliquait vouloir « mettre sa famille à l’abri », et ça se comprend. Dans un reportage qu’il avait accordé au média « Deux nuits avec », il avait expliqué qu’il voulait conserver un rang économique égal à ceux qu’il touchait avant, dans les différents clubs d’Euroligue par lesquels il est passé. Il avait spécifiquement déclaré que l’offre du Zénith était environs 2 à 3 fois plus importante que ce qu’on lui avait proposé autrement.
Et seconde raison, Xavi Pascual, le coach du Zénith. Un tacticien réputé en Europe qui a notamment gagné l’Euroligue avec Barcelone en 2010. Un discours et une personnalité qui l’a attiré et a conforté son choix de se tourner vers la Russie et la VTB ligue. Les discussions sont donc entamées en juillet, et Thomas Heurtel est alors convaincu qu’il signera en Russie la saison prochaine, ce qui pose problème en vu de la mise en place d’une charte qui interdit les joueurs sélectionnés en Equipe de France de jouer dans des clubs russes ou biélorusses.
Alors que l’Euro 2022 approche à grand pas, Thomas Heurtel lui ne cache rien, et explique directement au staff et à la direction de l’Equipe de France qu’il compte signé au Zénith. Une discussion qui embarrasse ces derniers et ne s’attendaient pas à une annonce de la sorte. Il refuse donc de signer cette fameuse charte, et la direction s’oppose d’abord à sa venue dans le groupe.
Suite à cette décision, Evan Fournier décide de prendre la défense de Thomas Heurtel, en expliquant que si son coéquipier ne jouait pas l’Euro, il ne signerait également pas la charte et ne rejoindrait pas le groupe. Et bien évidemment, le staff sachant qu’il ne pourrait pas se passer d’un joueur aussi important qu’Evan Fournier, les coachs mettent la pression à la Fédération pour passer l’éponge et protéger son joueur, ce qui sera fait dans un premier temps jusqu’à son départ officiel vers Saint-Pétersbourg.
Car oui dès que sa signature fût officialisée, il s’en est pris plein la figure que ce soit sur les réseaux sociaux ou sur les médias français, étant décrit comme un traitre à sa nation. Il a reçu énormément d’insultes et de harcèlement car ces derniers estimaient qu’il cautionnait tout ce qui était fait par le gouvernement russe en participant à l’économie du pays.
Thomas Heurtel a démenti toutes ses accusations en expliquant que la plupart des russes ne cautionnent pas ce qu’il se passe dans cette guerre, et que lui de son côté a pris la meilleure situation et la meilleure option pour sa famille malgré qu’il aurait préféré signer en Euroligue. Alors que la Fédération avait promis de protéger son meneur, elle a fait tout le contraire. Ces relations ne sont guères améliorées depuis, et c’est dommage tant on aurait aimé qu’il ait sa chance pour les Jeux Olympiques.
Thomas Heurtel poursuit donc sa route en Russie. Il lui reste encore une année en option pour laquelle il attend des potentielles offres alléchantes venant de l’Euroligue, avant de décide de son avenir. La Fédération française de basket a malheureusement refusé sa présence pour les JO, et c’est fort regrettable quand on voit que des terrains d’ententes ont été trouvé dans d’autres fédérations. C’est le cas notamment du volley-ball, avec Jenia Grebennikov, cadre et libéro de l’équipe de France de Volley, il pourra donc bien participer aux JO, et tenter de conserver ce titre prestigieux. Il ne nous reste plus qu’à espérer le revoir sur les parquets européens (notamment d’Euroligue), pour qu’on puisse encore admirer le talent du meneur de 35 ans.
