Tanguy Touzé

S’expatrier pour jouer au basket : ces Français qui construisent leur carrière loin de l’Hexagone

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La France, excellent pays de basketball, ayant consécutivement réalisé une finale lors des deux dernières éditions des Jeux Olympiques, offre la possibilité d’effectuer une éminente carrière dans son pays. Toutefois, une carrière de sportif peut très bien se construire ailleurs. Sans pour autant franchir l’Atlantique, le Vieux Continent, lui, regorge de clubs avec un niveau bien plus que pertinent. Qui plus est, chaque pays possède un style de jeu bien à lui, avec subtilités et variations. Énormément de Français ont fait ce choix, quitter leur terre afin d’en découvrir d’autres.

Des motivations différentes

Partir à l’étranger peut être une véritable chance de saisir une opportunité rare. Celles-ci peuvent demeurer de plusieurs ordres : sportif, familial, financiers, culturels ou autres… Parfois, certains clubs internationaux offrent simplement plus de garanties, ces dernières peuvent avoir leur rôle à jouer dans un choix. Comme m’a expliqué Hugo Sammartano, joueur de Basket Centro Ester, en 3ème division italienne : « L’offre en Italie est arrivée, j’ai réfléchi à l’offre italienne, financièrement c’était beaucoup mieux pour un même niveau, avec plus d’avantages. La motivation de progresser, découvrir une nouvelle culture, un nouveau jeu. » Être sportif demeure avant tout un métier, avec une rémunération à la clé, jouant sur l’attractivité éventuelle d’un club.

Cependant, d’autres raisons peuvent alimenter le choix de partir pratiquer à l’étranger, tel que « vivre une nouvelle expérience », ces expériences peuvent être enrichissantes et permettre de passer un réel cap professionnel. « Dans ma carrière pro, ça faisait 10 ans que j’étais dans le championnat de France Pro B », me raconte Anthony Racine, actuel joueur de Feyenoord.

« Je voulais découvrir autre chose, passer par un autre chemin. »

Puis, pour d’autres, plus jeunes, moins expérimentés, jouer à l’étranger peut être un moyen d’épanouissement, de changement, de découverte. Tanguy Touzé, à Cordoba en 3ème division espagnole, fait partie de ceux-là.

« J’avais l’envie de partir depuis longtemps parce que j’ai toujours pensé que le basket français ne me correspondait pas. Je suis passé par les États-Unis à l’université avant, et l’occasion s’est présentée de pouvoir repartir donc j’ai pris l’opportunité. »

Kevin Granzan, quant à lui, avait aussi une chance ailleurs, lui permettant de réaliser son rêve : signer professionnel. « Ce qui m’a motivé de quitter la France, c’est que je pouvais signer mon premier contrat professionnel assez jeune. » Ainsi, il a signé son premier contrat professionnel à 19 ans, avec le club de Tirana, en 1ère division d’Albanie.

S’expatrier afin d’exercer son métier peut s’avérer être un choix pertinent, pouvant offrir une nouvelle vie et des expériences uniques. Cependant, parfois l’adaptation peut toutefois être ardue, rendant le passage à l’étranger plus compliqué.

Nationale 1 M (play-offs, 8es de finale) : la folle soirée de Touzé avec le TMB à Pont-de-Chéruy
Tanguy Touzé, nouveau joueur de Cordoba. Crédit : Le Dauphiné

Les défis de l’adaptation

Dans un pays qui n’est pas le nôtre, plusieurs barrières peuvent apparaître, la plus connu est celle de la langue. « Le plus dur, c’est la barrière de la langue, ils ne parlent pas tous anglais », me dit Hugo Sammartano. Au-delà de l’aspect langagier, « s’adapter aux gens, au style de vie, au style de jeu » est complexe, chaque pays et région du monde possédant sa propre perception des choses. « Tout est différent, c’est vraiment une autre culture. » Cette « culture » est au cœur de chaque témoignage que j’ai pu recueillir. Tanguy Touzé me l’affirme aussi :

« C’est ma première saison professionnelle à l’étranger, c’est différent du contexte universitaire et pas encore le haut niveau auquel je veux me retrouver, mais c’est surtout une adaptation culturelle dans la vie de tous les jours. Mais avec les moyens de nos jours, ces soucis-là sont facilement réglables, d’autant plus que dans mon cas, l’Espagne reste relativement similaire à la France. »

Les recrues internationales sont catégorisées dans les effectifs et sont soumises à un règlement spécifique qui varie selon les championnats. Par conséquent, les équipes ne peuvent engager un nombre illimité de joueurs étrangers, ce qui amène les concernés à se démarquer. Cette démarcation catégorise fréquemment les joueurs d’« étrangers ». « Jouer face à des salles remplies de supporters qui insultent », me confirme Kevin Granzan. De plus, à la recherche de son premier contrat, il a dû quitter sa famille pour être seul dans un pays étranger et faire face à une nouvelle vie. Cependant, cette « casquette d’étranger » peut paraître affable pour d’autres, comme Anthony Racine, plus rodé et expérimenté :

« Il n’y a pas les mêmes repères, tu es vraiment un étranger, et cette casquette-là m’a vraiment plu. »

L’acclimatation dans une autre patrie est propre à chacun. Parfois, celle-ci peut se dérouler sans encombre. Toutefois, ces différentes expériences permettent à chaque sportif de se développer, aussi bien sportivement qu’humainement.

Un impact conséquent

La France, reconnue pour avoir un jeu oscillant entre physique et technique, est un exemple pour l’Europe. Pour autant, d’autres nations jouissent d’un style qui leur est propre, à l’image de l’Espagne. Tanguy Touzé y est confronté au quotidien :

« C’est un jeu qui ressemble bien plus à ce dont je veux me rapprocher en tant que joueur, donc j’espère que cette année me permettra de renforcer et surtout de mettre en avant mes qualités plutôt que de viser à travailler mes points faibles comme j’ai pu le faire ces dernières années. »

Ce style ibérique est parfois synonyme de transformation et surtout de formation, beaucoup de joueurs se sont formés en Espagne avant de devenir d’illustres basketteurs. Sekou Doumbouya, ancien joueur NBA, a récemment signé à Andorre afin de retrouver des couleurs. Quand les Castillans bénéficient d’un jeu technique et épuré, d’autres pays, comme l’Albanie, sont plus « physiques », comme me l’explique Kevin Granzan. En Italie, le physique est aussi primordial :

« Le style de jeu est différent, physiquement aussi, ça me fait progresser. »

Au-delà de ces différents aspects, plus globalement, émigrer fait évoluer dans tous les compartiments du jeu. « Jouer dans cette ligue (DBL LEAGUE) m’a confirmé que je n’ai pas peur d’exporter mon basket ailleurs », m’affirme Anthony Racine. « J’ai confiance en mon basket », dit-il, et cela lui a permis d’avoir un vrai rôle avec des responsabilités, comme on en donne aux Américains en France. « Je ne me vois pas si différent que ça, c’est ce que je suis, j’ai toujours eu cette mentalité. » Pour tous, pratiquer leur sport dans une ligue étrangère leur a permis de progresser dans différents domaines. Bien que ces progrès soient différents selon l’expérience de chacun, ceux-ci sont inéluctables.

Anthony Racine à la conquête des Pays-Bas
L’ancien de Pro B, Anthony Racine s’amuse aux Pays-Nas. Crédit : Guillaume Poumarede

Revenir à la maison

Si certains joueurs choisissent de bâtir leur carrière à l’étranger, cela reste un défi complexe, exigeant à la fois adaptation et persévérance. Retourner jouer en France, après avoir gagné de l’expérience ailleurs, peut s’avérer être pertinent. Revenir plus mature et posé dans son jeu, en ayant acquis les rouages des autres nations, peut permettre de marquer les esprits dans son propre pays. Pour Kevin Granzan, la possibilité existe :

« J’envisage de revenir jouer en France dans les prochaines saisons, mais pour l’instant, je compte rester dans la ligue albanaise cette saison »

Pas avant de « prouver ce que je sais faire ». Nonobstant, l’objectif principal est de faire une carrière qui perdure, et la meilleure si possible. Ainsi, Anthony Racine reste flexible :

« Je suis ouvert à tout, à partir du moment où c’est une ligue compétitive, j’ai encore mes objectifs, je ne lâche rien. »

Comme il nous le démontre, des ligues compétitives existent ailleurs que dans l’Hexagone. Tanguy Touzé est lui aussi dans la même ligne directrice et peut envisager de revenir en France « si j’ai un bon projet », mais son « objectif premier est de continuer à évoluer à l’étranger autant que possible, en Espagne ou ailleurs, et engranger des expériences différentes ». Hugo est quant à lui aussi flexible : « Je pense avoir envie de jouer en France », notamment pour revoir ses amis et sa famille, mais la possibilité de « rester en Italie » l’attire tout autant.

S’expatrier pour le basket est une aventure qui comporte des défis autant personnels que professionnels. Toutefois, ces expériences permettent aux joueurs de se forger une identité unique sur et en dehors du terrain. Qu’ils choisissent de revenir en France ou de poursuivre leur carrière à l’étranger, ces basketteurs témoignent tous d’une volonté de repousser leurs limites et de saisir chaque opportunité pour évoluer.

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Paul Candelier

Fan de la culture New Yorkaise, cependant je supporte la franchise de Minneapolis.

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