Game 7 Finales 1994
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Houston Rockets VS New York Knicks : le match 7 des finales 1994

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Seules Finales de la décennie 90 à se jouer sur la septième et dernière manche, l’acmé de cet été 1994 verra les Houston Rockets sacrés pour la première fois de leur histoire, aux dépens des New York Knicks. Retour sur les Finales 1994 et cette dernière rencontre décisive, marquée par la contre-performance historique d’un arrière à la fine moustache.

Les forces en présence : New York Knicks

John Starks, Patrick Ewing et Charles Oakley lors du All-Star Weekend de février 1994 à Minneapolis, les seules sélections en carrière pour Starks et Oakley, la huitème pour Big Pat. NBAE via Getty Images

Seulement vingt-et-unième attaque de la ligue (98,5 points marqués en moyenne), le New York de Pat Riley brille par sa défense, de loin la meilleure de la saison (moins de 92 points encaissés). Ces Knicks 1993-94 sont une belle équipe de ferrailleur avec un bilan de 57 victoires en saison régulière, le meilleur bilan à l’Est avec Atlanta. Oubliez le showtime des Lakers sous Riley: à joueurs différents, jeu différent. L’entraîneur Riley n’a que 48 ans en 1994 mais déjà sept finales NBA au compteur, dont quatre gagnées.

Au matin de ce 22 juin 1994, avec un septième match décisif à jouer, cette équipe de vétérans, 29 ans de moyenne d’âge, se prépare pour son vingt-cinquième match de playoffs, record pour l’époque, après deux séries éprouvantes coup sur coup, en sept manches également, face aux Bulls d’abord lors de la demi-finale de conférence, puis face aux Pacers. New York, emmené par un Patrick Ewing de 31 ans et son armée de soutiers, retrouve les finales pour la première fois depuis le titre de 1973.

Les forces en présence : Houston Rockets

Olajuwon, Kenny Smith, Robert Horry, Vernon Maxwell et Otis Thorpe. NBAE via Getty Images

Pour sa troisième année sur le banc, Rudy Tomjanovich mène ces Rockets comptant 58 victoires en championnat, deuxième meilleur bilan à l’Ouest derrière Seattle. Dix ans en tant que joueur dans les années 70 (cing fois All-Star), neuf ans assistant-coach, Rudy T. est le régional de l’étape, Houston est sa seule franchise. Tout comme Hakeem Olajuwon, au sommet de son art, 31 ans et fraîchement élu MVP de la saison (Ewing finira lui cinquième au vote final), et meilleur défenseur de l’année pour la deuxième fois d’affilée. L’occasion de prendre sa revanche après la finale perdue en 1986, face aux Celtics de Bird et consorts.

L’avant-match

Les bookmakers de l’époque annoncent une finale serrée, avec une légère avance pour les Rockets, ayant l’avantage du terrain et plus de repos avant d’attaquer les finales. Charles Oakley était quant à lui plus que confiant, comme il le raconte dans sa biographie The Enforcer :

« Je pensais sincèrement que nous étions assez bons pour sweeper les Rockets. Cela peut paraître fou, car ils avaient Olajuwon. Mais nous pensions que si Patrick pouvait lui tenir tête, nous nous occuperions du reste ».

Et c’est un peu l’état d’esprit général des analystes de l’époque, que l’on peut résumer ainsi  :

  • Ewing et Olajuwon sont deux superstars d’un niveau à peu près équivalent
  • New York a le meilleur effectif et le meilleur entraîneur
  • Si les deux pivots se tiennent mano à mano, l’avantage sera pour les Knicks

Il en sera évidemment tout autrement, et le pragmatisme des bookmakers l’a emporté sur l’analyse des journalistes sportifs.

Aucune rencontre de ces finales ne verra une des deux équipes atteindre les 100 points, et les six premières auront été de belles batailles de tranchées, aucun écart n’excédant les 9 points au score final. Chaque équipe a gagné un match à l’extérieur.

La sixième manche fut la plus serrée : victoire 86-84 des Rockets à domicile lors du fameux « OJ game », la course poursuite entre la police et OJ Simpson étant diffusée en simultanée du match, en écran partagé, au grand dam de David Stern, déjà meurtri par la retraite de Jordan quelques mois plus tôt. Et pour cause: les audiences de ces finales étaient les pires depuis 1981! Olajuwon décisif, contre du bout des doigts la dernière tentative de John Starks pour le shoot du titre. Tomjanovich exultera comme s’il venait de gagner le trophée de champion. Trois jours à attendre entre le sixième et septième match. Pour rappel, le format des finales en 1994 était encore en 2-3-2. Les Knicks décident de rester sur place, à Houston.

Manny Millan pour Sports Illustrated

Le match 7 des Finales 1994

Dans une salle bouillante, le jeune sophomore Robert Horry lance la partie de suite après l’entre-deux avec un violent poster dunk sur Big Pat, trébuchant et manquant même de se retrouver au sol. Les 16 000 supporters texans présent au Summit, la salle des Rockets de 1975 à 2003, exultent. Presse tout-terrain, des deux côtés. La zone étant illégale à l’époque, personne ne peut se cacher. De l’indiv’ de grognard, du hand-check en veux-tu en voilà, on est pas là pour enfiler des perles. Derek Harper est même sanctionné dans ce premier quart-temps tant l’utilisation de ses bras sur Kenny Smith est jugé abusive (hard hand-check).

Difficile de servir les pivots stars. Ewing marque son premier panier au bout de six minutes, suivi par Olajuwon sur l’action suivante. Les seconds couteaux assurent le scoring: Vernon Maxwell, Derek Harper, Charles Smith, Kenny Smith. Il y a du rythme, mais peu d’adresse, chaque tir est parfaitement contesté.

22-21 pour les locaux à la fin de ce premier quart.

Ewing en échec face à Olajuwon. NBA TV

Sam Cassell, sortant du banc, prend les commandes au début du deuxième quart. Anthony Mason assure le répondant pour les Knicks. Ewing, emprunté, n’y arrive pas, perte de balle, contré par Hakeem, faisant même un vilain « marcher » sur une attaque de cercle. Horry remet ça sur Ewing, avec cette fois un dunk à une main, pleine tête. Starks force, c’est court, lorsqu’à l’inverse Kenny Smith lance une prière sur une fin de possession : 3 points, avec la planche. Vernon Maxwell plante 11 points sur cette première période, tandis que Derek Harper en met 13. Ewing ne prend que 6 tirs (2 marqués), Olajuwon, bien défendu, en est à 4 sur 12.

Score serré à la mi-temps, 45-43 pour Houston.

Une mi-temps de ferrailleurs, sans surprise : grosse défense, du bully ball, et un Ewing trop discret, prenant peu d’initiatives. Si Olajuwon ne brille pas beaucoup plus en attaque, il a le mérite de tenter et de peser en défense.

Le naufrage de Starks est en marche. NBA TV

Au retour des vestiaires, changement de plan : des deux côtés, on cherche davantage à servir les pivots au poste bas. Ewing est en échec dès qu’il veut aller vers le cercle, mais réussi quelques jump shots à 4-5 mètres. Big Pat se venge à moitié d’Horry en venant contrer un lay-up. Mais sur la remise en jeu, Horry réalise un spectaculaire alley-oop sur la passe de la remise en jeu, surprenant Oakley. Harper, sur sa lancée, termine une contre-attaque entouré de 3 Rockets. Dunk d’Hakeem sur Ewing.

On voit une prise à 3 sur Olajuwon sur une des actions suivantes, Riley panique, d’autant que Ewing enchaîne en suivant : brique, tir trop court et gamelle. Houston ne presse plus tout terrain, à l’inverse des Knicks. Starks fantomatique, enchaîne les tirs ratés, et voit sa tentative de lay-up contrée pleine main par Olajuwon. Harper marque le premier 3 points des visiteurs, sur la lancée de sa bonne première mi-temps.

Carl Herrera clôture ce troisième quart-temps avec un bras roulé peu esthétique mais efficace: 63-60 pour les Rockets.

Olajuwon prend petit à petit l’avantage sur son rival. NBA TV

Spécialité des new-yorkais, le quatrième et dernier quart-temps de cet affrontement commence d’emblée par la quatrième faute d’un Starks à la mine fermée, sachant bien quelle copie il est en train de rendre. Ewing rentre enfin un shoot dans la raquette face à Hakeem. Cassell rentre les 6 premiers points des Rockets, dont 4 sur lancers-francs. Les matchs sept, il connaît : face aux Suns en demi-finale de conférence un mois plus tôt, le rookie de Florida State seconda parfaitement son pivot avec 22 points (dont 9 dans le quatrième quart), 4 rebonds, 7 passes et 2 interceptions en 29 minutes. Sam I Am a du cran !

Ewing rentre un deuxième fade-away. Mais Starks sombre, ne marque que sur lancers-francs et 2 points sur un rebond offensif, mais rate des tirs ouverts. Et force comme un cochon à 3 points. Oakley et Greg Anthony prennent le relais d’Ewing pour rester collés au score. Mais le naufrage Starks plombe trop de possessions new-yorkaise. Moins de 3 minutes à jouer, Houston mène, temps mort.

Olajuwon sur Ewing, 2 points, Ewing sur Olajuwon dans la foulée : rebond défensif. Vernon Maxwell plante un 3 points à 2 minutes du terme, sur une passe d’Hakeem. Maxwell considère ce panier comme le plus important de sa carrière. +8 pour Houston, et les joueurs commencent à exulter, Rudy T. compris. Un écart de + 8 dans ce type de match sonne le glas, d’autant que Starks persiste derrière la ligne à 3 points.

Fin du match, 90-84, les Rockets sont champions NBA pour la première fois de leur histoire, commencée à San Diego en 1967, puis à Houston en 1971.

Houston est champion. NBA TV

Les Knicks n’ont jamais su trouvé leur rythme, plombés par l’historique contre-performance de Starks : 2 sur 18 aux tirs, dont 0 sur 11 à 3 points. Après son non-match lors de la défaite du match 1 (3 sur 18 aux tirs), l’arrière new-yorkais avait pourtant rendu de bonnes copies sur les cinq suivants (21 points à 49% aux tirs et 45% à 3 points), notamment dans les derniers quart-temps, suppléant parfaitement un Ewing en grande difficulté dans son duel face à Olajuwon.

Mais son insomnie avouée après le match six et son échec pour le tir de la gagne pèsera lourd dans la balance. Malgré ce raté complet du deuxième meilleur joueur de l’équipe, couplé au fait que la star Ewing se fera dominer par son rival sur la série, New York n’était pas si loin du Graal.
Scott Brooks, meneur remplaçant des Rockets, analyse le match depuis le banc:

« Starks est notre meilleur joueur en ce moment. Au bout d’un moment, son tir ressemblait plus à un medecine ball, tant il avait du mal à tirer. Nous tous sur le banc – joueurs, entraîneurs – attendions, pensions que Riley allait utiliser Blackman. Car pendant des années, avec les Mavericks, il nous a tués et nous n’avons pas pu l’arrêter, quels que soient nos efforts »

Nous reviendrons sur le cas Rolando Blackman un peu plus loin.

Sans surprise, Olajuwon est élu MVP des finales. 26,9 points / 9,1 rebonds / 3,6 passes / 1,6 interceptions / 3,9 contres, le tout à 50% de réussites aux tirs, le MVP en titre a surtout réussi à mettre dans sa poche le pauvre Pat Ewing, réduit à moins de 20 points de moyenne sur la série, avec un dramatique 36% de réussite aux shoots. Tant et si bien qu’en cas de victoire finale des Knicks, c’est très probablement Derek Harper qui aurait raflé le titre de MVP, le meneur vétéran ayant parfaitement pris le dessus sur Kenny Smith, auteur d’un bon match 7 mais globalement d’une série décevante, heureusement bien supplée par l’étonnant rookie Sam Cassell, révélation de ces playoffs 94.

John W. McDonough pour Sports Illustrated

Les regrets de Pat Riley

Sa première erreur, admettra t-il une dizaine d’années plus tard, a été d’écarter Doc Rivers de la liste des joueurs pour les playoffs, alors qu’il s’était blessé à la jambe en début de saison.
Mais la seconde, probablement celle qui revient le plus sur le tapis lorsque l’on évoque ce raté du match 7, concerne le quadruple All-Star Rolando Ro Blackman, arrivé un an plus tôt à New York, pour le dernier contrat de sa carrière en NBA, avant de rejoindre l’Europe et l’AEK Athènes.

« J’aurais dû faire jouer Blackman, sans aucun doute. À l’époque, Starks, dans les matchs 3, 4 et 5, nous a portés en deuxième mi-temps. Lors du sixième match, il a réalisé un incroyable quatrième quart-temps. Mais dans le match décisif… »

Blackman ne peut qu’acquiescer :

« Mon point de vue est que nous aurions dû me faire entrer en jeu, ou faire entrer Hubert Davis, juste pour que John puisse se poser. Il avait besoin de sortir un peu pour arrêter ce qui se passait. Il avait besoin de temps. Mais je ne veux pas critiquer, parce que c’est fini. C’est du passé. Nous avions encore d’autres problèmes – comme Olajuwon… »

Pour Oakley, même constat, avec peut-être un début d’explication :

« J’ai trouvé que Pat Riley avait fait une grosse erreur lors de la victoire des Rockets au match 7. Ro était un excellent shooteur, et si John était en difficulté, il me semblait logique de lui donner quelques minutes. S’il avait réussi quelques tirs, la pression aurait été moins forte pour tout le monde. Je sais pourquoi Ro n’a pas joué. Riley le punissait parce que, plus tôt dans les playoffs, Ro avait défié la demande de Riley de ne pas emmener les épouses pendant les déplacements. Sinon, pourquoi n’aurait-il pas joué ? C’est l’une des plus grosses erreurs de la carrière de Riley. »

Houston, renforcé par l’arrivée en cours de saison de Clyde Drexler, fera le back-to-back l’année suivante, face au Magic d’Orlando de Shaquille O’Neal et Penny Hardaway, tandis que New York attendra 1999 pour une nouvelle présence en finale, sans Ewing, blessé, lors d’une nette défaite 4-1 face aux Spurs de Tim Duncan et David Robinson.

Boxscore du match. BasketballReference

Merci à l’artiste SLip pour pour la réalisation du visuel en tête d’article !

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