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Retour sur la saison 2019-20 : la NBA et les fans à l’épreuve du Covid

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Successivement orphelins de l’ancien commissioner David Stern et du Hall of Famer Kobe Bryant, nous savions, nous autres, fans de Basket, que cette année 2020 n’allait pas être une bonne année. Et les semaines qui suivirent ces deux disparitions n’allaient pas infléchir ce sentiment.

Nous sommes le 10 mars 2020, aux alentours de 6h du matin, heure de Paris. En me déconnectant de mon League Pass après une énième purge de mon équipe favorite, battue 131 à 107 par les Los Angeles Clippers, rien ne me laissait imaginer qu’il s’agissait du dernier match de la saison 2019-2020 des Golden State Warriors. Avec le recul, peut-être aurais je davantage su apprécier à sa juste valeur les 23 points du talentueux Dragan Bender, pour qui ce fut d’ailleurs le dernier match en NBA . Quelle ne fut pas ma surprise quand, le lendemain, en allant consulter les résultats des matchs de la nuit comme à chaque fois que je ne restais pas éveillé, je vis “match reporté” sur l’ensemble des rencontres prévues. C’est en allant scroller sur Google que ce titre du site de BasketUSA : “Rudy Gobert testé positif au coronavirus, la saison NBA est suspendue !”

Il s’agissait alors d’une décision sans précédent qui répondait à un impératif exceptionnel, et dont on ignorait les conséquences sur le reste de cette saison régulière 2019-2020. Les plus pessimistes allaient jusqu’à parler d’une potentielle annulation de la saison, tandis que les plus optimistes tablaient sur un retour probable dans quelques semaines. Plus globalement, c’est le monde du sport qui emboîte le pas de la NBA, que ce soit la NFL, la MLS, la Ligue 1, la Premier League.. Et avec la fermeture des écoles et des lieux publics décrétés quelques jours plus tard, les temps s’annonçaient difficiles à vivre pour les amateurs de sports. Si le confinement et ses conséquences sociales (mais aussi sanitaires et économiques) n’ont malheureusement pas été bien vécus par tout le monde, nous sommes quelques uns à éprouver une forme de nostalgie pour cette période si singulière de nos vies.

L’adolescent de 17 ans que j’étais à l’époque avait semblé trouver une sorte de routine. La fermeture des lycées oblige, il fallait bien occuper ses journées dans cet appartement de 70M² qui était celui de ma famille, sans jardin pour s’aérer et jouer au basket. Ce n’était pas ce qu’il y avait de plus productif, mais passer des heures sur le mode MyCareer de NBA2K la journée, attendre la sortie des deux épisodes hebdomadaires de The Last Dance le soir et en discuter avec la twittosphère, tout cela fait partie de mes meilleurs souvenirs de cette période si étrange où le temps, et le monde, semblaient comme suspendus. Soyons clair : 2K17 est le meilleur 2K, mais 2K20 s’est révélé à la hauteur et nous a permis, à beaucoup d’entre nous, de mieux vivre cet enfermement. En quelques mois, je n’avais probablement jamais autant joué à un jeu vidéo, au point qu’aujourd’hui le nombre total des mes heures passées sur NBA 2K20 s’élève à 1609.5 heures.

Quant à la diffusion de The Last Dance, initialement prévue pour juin mais finalement proposée dès le 19 avril, elle provoqua les passions et les débats les plus enflammés. Des extraits inédits, des confidences, des témoignages sur l’une des plus grandes dynasties de l’Histoire, les fans de basket ne pouvaient pas rêver mieux, sauf peut-être d’un peu plus d’objectivité et de distance vis-à-vis de certains aspects de la carrière de Michael Jordan. Distillés par deux chaque semaine de manière à nous tenir en haleine, les épisodes de ce mini documentaire alimentaient les discussions autour de débats plus ou moins stériles comme celui du plus grand joueur ou de la plus grande équipe de tous les temps, et si nombreux furent ceux qui critiquèrent une vulgaire propagande servant les intérêts de Sa Majesté, nous étions nombreux à savourer chacun de ces épisodes qui nous permettaient d’oublier notre quotidien et la réalité de nos situations.

Et il faut dire que la NBA ne nous a pas laissé tomber non plus. Si le League Pass a été accessible gratuitement pour plusieurs semaines, entre mars et juin le compte YouTube de la ligue a rendu disponible l’entièreté de 65 matchs ayant marqué l’Histoire, les #NBATogetherLive Classic Game, avec notamment la performance de Larry Bird dans le Game 5 face aux Pistons en 1987, le “Game 6 Klay” face au Thunder de Westbrook et KD, le duel Paul George/LeBron James au Game 2 des finales de conférence EST 2013, ou encore les 32 points 21 rebonds et 5 contres de Kevin Garnett au Game 7 des demies finales de la conférence Ouest 2004 face aux Kings. D’autres chaînes YouTube ont également continué à produire du contenu de qualité sur le basket, et certains joueurs NBA ont même été interviewé par des créateurs de contenus. Souvenons nous par exemple de ce live Instagram improbable entre Denis Brogniart et l’arrière du Magic, Evan Fournier.

Et puis la NBA a repris, dans ce contexte de tensions sociales aux Etats-Unis, marqués par l’assassinat de George Floyd à Minneapolis et les manifestations Black Lives Matter auxquelles de nombreux joueurs NBA se sont rendus, notamment Kyle Lowry, Tobias Harris, DeMar DeRozan ou encore Jaylen Brown. Dans une ligue composée à 80% de joueurs noirs, où le sport représente très vite pour ces jeunes athlètes une porte de sortie de situations de misère extrême, la politique occupe une place très importante. Mais rarement la ligue n’aura été autant politisée et engagée que sur cette période de conscientisation, au point que le Président Trump accuse la NBA d’être devenue une organisation politique. La ligue a, en effet, autorisé les joueurs à inscrire des messages et des slogans engagés sur le dos de leur maillot comme Black Lives Matter, Say Their Names, Justice, Power to the People, How Many More, etc…Le point d’orgue de cette mobilisation des joueurs est le boycott du Game 5 contre Orlando entrepris par les Milwaukee Bucks à la suite de l’affaire Jacob Blake.

La saison NBA a donc repris à la fin du mois de juillet, à Disneyland, Orlando. Mais quelques équipes manquaient à l’appel, celles qui étaient d’ores et déjà éliminées de la course aux Playoffs. Et avec un bilan de 15-50, je savais que je ne reverrais pas les Warriors avant le mois d’octobre. Cela ne m’a pas empêché de prendre du plaisir devant le basket qui m’était proposé. Bien au contraire. Comment ne pas commencer par TJ Warren. L’ancien des Suns nous a gratifié de performances mémorables comme ses 39 points à 15/22 aux tirs dans une victoire face aux Lakers ou encore 53 points face aux Sixers. Il était tout simplement le deuxième meilleur scoreur de la reprise avec 34.8 points par match. Hallucinant. Quand on voit le triste tournant qu’a pris la carrière du natif de Caroline du Nord les deux années suivant la bulle, on ne peut que dire qu’il fallait y être pour y croire.

Malgré les coups de chauds de Warren, c’est bel et bien Damian Lillard et ses 37.6 points/8 passes par matchs qui est élu MVP de la bulle, lui qui a su porter ses blazers vers la 8e place de l’Ouest. Il s’agissait alors (et il s’agit toujours) du deuxième trophée de sa carrière, derrière le Rookie de l’année 2013. Le play-in tournament, cette nouvelle invention décriée par le King, nous offre sur un plateau un bel affrontement entre les Blazers et les jeunes Grizzlies, préfigurant les magnifiques playoffs qui s’ensuivront. Les Clippers de Kawhi Leonard et Paul George se heurtent au génie slovène puisque le néo-all star des Mavs égalise la série au Game 4 avec un step back three synonyme de Game winner, et la planète basket assiste aux premiers Playoffs de l’ancien joueur du Real Madrid. La série Jazz-Nuggets qui, si elle paraissait de prime abord comme l’une des moins sexy, va se révéler être pleine de rebondissement avec, en perspective, le duel Donovan Mitchell-Jamal Murray. Les deux jeunes Guards vont réaliser, à eux deux, quatres performances à 50 points dans la même série. Le Jazz prend une avance de 3-1, mais Murray sonne la révolte pour renverser une situation périlleuse avec 42 points dans le Game 5 et 50 dans le Game 6 pour forcer un Game 7 que Utah perd sur un trois point manqué de Mike Conley.

Toujours à l’Ouest, la série Houston/Oklahoma City était tout aussi passionnante. Chris Paul, Shai Gilgeous-Alexander et…Lugentz Dort emmèneront les rockets en 7 matchs à l’issue d’un game 6 où Russell Westbrook livra son meilleur match sous les couleurs du Thunder depuis au moins deux ans, le seul hic étant qu’il n’en portait plus les couleurs depuis l’été dernier. Il n’empêche que le dénouement de cette série est assez singulier : après un match horrible mais représentatif de la baisse de ses performances dans les moments qui comptent, James Harden se distingue par ce qui est probablement la meilleure action défensive de sa carrière, en contrant le tir de Lu Dort à deux secondes de la fin du Game 7.

Autre série de playoffs qui a particulièrement retenue mon attention : Raptors/Celtics. Avoir l’avantage du terrain dans la bulle n’avait aucune importance, puisque les équipes jouaient toutes deux loin de leurs bases et qu’elles n’avaient pas le loisir d’avoir leur supporters pour les encourager. Cela n’empêchera pas la ligue de mettre le logo de l’équipe ayant l’avantage du terrain sur le parquet ainsi que d’installer une sorte de public virtuel projetés sur des écrans, donnant des allures futuristes aux salles. On aurait dit une salle de classe connectée sur Zoom. Quoiqu’il en soit, les Raptors, perdants de leurs deux premiers matchs à domicile, vont retrouver de la ressource grâce à l’un des Game winner les plus incroyables qu’il m’ait été donné de voir en direct, celui d’OG Anunoby, de sorte que les Raptors survivront jusqu’au Game 7. Mais à l’est, la sensation du moment était du côté du Miami Heat de Jimmy Butler, qui semblait marcher sur l’eau avec, déjà à l’époque, des Playoffs exceptionnels, bien épaulés par Tyler Herro, Duncan Robinson et surtout Bam Adebayo. C’était l’époque où Giannis était considéré comme un joueur de saison régulière incapable de mener son équipe à la victoire, qu’est-ce que les avis peuvent changer du tout au tout en un an quand même…

Enfin, la série Clippers/Nuggets, censée précéder “The Battle of LA” tant attendue en finale de Conf’. Cette remontada historique des Nuggets, la deuxième consécutive, ce choke monumental des clippers, et on peut se demander si la fenêtre du titre de cette équipe ne s’était déjà pas refermée au moment où Doc Rivers sert la main de Michael Malone quelques secondes après la fin du Game 7.

Oui, ce n’était pas la même chose qu’une saison classique en raison de l’absence de réel avantage du terrain et de l’absence de public. Oui, certains joueurs comme Paul George ont très mal vécu le fait d’être éloigné aussi longtemps de leur famille. Mais il serait faux de dire que le basket pratiqué dans la bulle d’Orlando n’était pas du beau Basket. Des jeunes joueurs comme Devin Booker (même s’il n’a pas qualifié les Suns en Playoffs), Donovan Mitchell, Jamal Murray, Jayson Tatum et surtout Luka Doncic ont montré qu’ils étaient capables de porter leurs équipes, un joueur sorti de nulle part comme TJ Warren s’est imposé comme l’un des meilleurs joueurs de la ligue pour une courte période, mais la belle histoire de la bulle reste celle du Miami Heat. Les deux triples doubles de Jimmy Butler en finale face aux Lakers auront eu le mérite de rendre cette finale compétitive (40 points, 13 passes, 11 rebonds au Game 3, 35 points 12 passes 11 rebonds au Game 5).

Toutes ces séries ont la particularité d’avoir déjoué les pronostics et de nous avoir offert un maximum de divertissement. Lou Williams suspendu pour s’être rendu dans un stripclub en dehors de la bulle, le trashtalking entre Lillard, George et Beverley après une victoire des Clippers sur les Blazers, Kyrie Irving qui déclare à la presse que ses coéquipiers des Nets ne seront pas tous là la saison prochaine, et qui quitte le groupe WhatsApp de l’équipe après ses déclarations…Suivre la NBA en été et en septembre, sans les contraintes liées au travail ou à l’école, s’est révélé être quelque chose d’incroyable.

Fan des Warriors et de NBA en général.
Admirateur numéro Un du Chef et de son accolyte du backcourt.

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