Parmi les phrases les plus connues du basket “La saison régulière c’est bien, mais les playoffs, c’est une autre saison”. A cela, on ajoute également le fameux “Avec l’avantage du terrain, tout est plus simple”. Mais à l’heure où les dynamiques collectives, l’expérience et l’efficacité à trois points semblent prendre le dessus, la pertinence de l’avantage du terrain interroge. Est-il encore aussi important, décisif ? Ou n’est-ce plus qu’un héritage psychologique d’une époque révolue ?
Rien que dans le deuxième tour, les exemples sont déjà nombreux : La défaite des Cavaliers face aux Pacers, la grosse surprise des Knicks face à Boston. Ensuite la surprenante victoire des Nuggets face à OKC puis les Wolves qui s’inclinent face aux Warriors malgré l’absence de Stephen Curry. C’est simple, toutes les têtes de séries ont perdu le premier match à domicile.
Cette année, les équipes NBA affichent un bilan de 26 victoires pour 24 défaites à domicile en playoffs. C’est tout simplement le pourcentage de victoires le plus faible en playoffs parmi les équipes à domicile depuis 1981. Comme le rappelle The Athletic, en 1981, les équipes à domicile affichaient un score inférieur à 50%. Mais ce fut qu’un léger accident, car l’année suivante les équipes ont remporté environ 60% de leurs matchs en playoffs jusqu’à augmenter chaque année.
Ces dernières années, gagner un match à la maison a été plus compliqué. Les équipes à domicile n’ont pas franchi la barre des 60% de victoires depuis 2018. Les games 7 ont été également impactés par ce bouleversement. Durant les 73 premières saisons de la NBA, 79.1% des games 7 étaient gagnés par l’équipe à domicile. Depuis 2021, les équipes à domicile n’affichent qu’un piètre bilan de 5 victoires pour 10 défaites. Cette année encore ce cas s’est produit avec la victoire des Warriors à Houston lors du game 7.
Le tir à 3 points la cause de ce changement ?
Comme l’explique Steve Kerr (coach des Golden State Warriors), l’avantage du terrain n’est plus aussi puissant qu’avant, et le tir à longue distance pourrait être la cause. “Je ne pense pas que ce soit aussi important… Je pense que le tir à 3 points est une variable essentielle. On dirait qu’avant, c’était un jeu de combat acharné à 2 points.”
Prendre plus de tirs à 3 points à l’extérieur, a été synonyme d’un plus haut pourcentage de victoires. Cette année, les équipes à l’extérieur qui ont pris au moins 1 tir du parking de plus que l’équipe à domicile montrent un bilan de 12 victoires pour 9 défaites.
L’évolution du style de jeu a eu un gros impact statistiquement ces dernières années. Même principe qu’avant, l’équipe à l’extérieur ayant pris au moins 1 tir à 3 points de plus que l’équipe à domicile a remporté 46.2% de leurs matchs entre 2011 à 2014. De 2016 à 2019, ce pourcentage est monté à 55% de victoires. Mais depuis 2022 le pourcentage grimpe à 60.9% de victoires.
Une affaire de mental plus que de parquet
Le vrai avantage du terrain est peut-être devenu moins tangible et plus psychologique. Les jeunes équipes inexpérimentées, souvent galvanisées par leur public, y trouvent un soutien émotionnel. Mais les équipes chevronnées, comme les Warriors face aux Rockets, ont prouvé qu’il est possible de gagner une série en allant chercher plusieurs victoires loin de chez soi.
De plus, la pression se retourne parfois : jouer un match 7 à domicile peut aussi être anxiogène. On se souvient des Rockets de 2018, qui se sont écroulés dans leur salle face aux Warriors, ou encore des Suns en 2022, humiliés par Dallas lors d’un game 7 pourtant à Phoenix.
Une NBA plus homogène, des séries plus imprévisibles
Autre facteur à considérer, celui de la parité grandissante entre les équipes NBA. Le niveau général s’est resserré, et il n’y a plus de fossé béant entre une tête de série et un cinquième ou sixième. Des joueurs All-Star peuvent également se retrouver dans des équipes mal classées à cause de blessures ou d’un calendrier défavorable en saison régulière.
Notamment dans la conférence Ouest cette année, le niveau est énormément resserré. Résultat : les confrontations sont plus équilibrées dès le premier tour, et l’avantage du terrain ne suffit plus à compenser un déséquilibre de forme ou de momentum. Dans cette NBA ultra compétitive, chaque possession compte, et le poids symbolique du parquet s’efface derrière l’exécution, la profondeur d’effectif et la capacité à s’adapter. Le terrain n’est plus une forteresse, juste un point de départ.
Un bonus mais plus une garantie
Faut-il conclure que l’avantage du terrain ne sert plus à rien ? Certainement pas. Il reste un avantage mais pas une assurance. Dans des séries serrées, il peut faire pencher la balance. Il permet aux équipes de se mettre dans les meilleures dispositions, surtout pour bien démarrer une série. Mais il n’est plus le rempart que les coaches brandissaient il y a vingt ans.
L’important n’est plus seulement où on joue, mais comment. L’identité de jeu, la cohérence tactique, la gestion des temps faibles, l’impact du banc ou la lecture des match-ups sont aujourd’hui des facteurs au moins aussi importants.