Pour ce 5ème épisode de la série « The Mavs Legacy », nous revenons avec vous sur une épopée aussi décevante que divertissante. Les « Three Js », un nom tape-à-l’oeil pour trois joueurs qui l’étaient tout autant, ont captivé l’imagination de nombreux fans avant de rapidement s’effondrer dans les bas-fonds de la Conférence Ouest à cause de fiascos à n’en plus en compter. Nous vous racontons aujourd’hui comment en quelques mois, tous les espoirs et la construction d’une franchise ont été réduits à néant par trois égos surdimensionnés.
Un peu de contexte : les Mavs avant les Three Js
Les playoffs 1988 avaient laissé de lourds espoirs aux fans des Mavericks. L’équipe menée par Mark Aguirre et Rolando Blackman avait poussé les invincibles Lakers de Kareem Abdul-Jabbar et de Magic Johnson dans un jolie game 7 qui tournera finalement à l’avantage des californiens. Mais Aguirre devenu ingérable sera tradé à la deadline de la saison 1988-1989 contre Adrian Dantley et un premier tour de draft, une contre-partie bien faible qui va marquer le début de la fin pour cette génération des Mavericks.
En effet, en un peu plus de 2 ans tout l’effectif des Mavericks sera renouvelé, laissant place à des joueurs peu prometteurs. Du côté des départs Rolando Blackman partira en 1991 chez les Knicks, Detlef Schempf aux Pacers et Sam Perkins chez les Lakers. Tandis que du côté des arrivées, nous avons Alex English, joueur en fin de cycle qui a divisé par deux ses statistiques après son arrivée à Dallas, Fat Lever qui a connu une grosse expansion à Denver, mais lui aussi ratera son passage chez les Mavs et Adrian Dantley, un joueur qui fût la superstar du Jazz au début des années 80 mais une nouvelle fois, un échec cuisant où le joueur laissera de nombreuses plumes dès son arrivée dans le Texas.
Au final, ces 3 joueurs ne resteront que 2 ans chez nos Mavs qui entameront une reconstruction avec le très surprenant Roy Tarpley en chef de file. Surprenant oui, car l’homme est plus connu pour avoir été exclu de la ligue pour consommation répétitive de cocaïne plutôt que pour une quelconque performance sportive. Misé sur cet homme était une folie et résultat Dallas commence sa descente dans les bas-fonds de la ligue. Pendant la saison 1990-1991, les Mavs ne passeront pas le cap des 30 victoires terminant juste devant Orlando et Minnesota (les deux nouvelles équipes de la ligue).
Toujours sans Tarpley qui alterne les problèmes de genoux et les suspensions pour ses addictions, ce dernier se fera exclure au tout début de la saison 1992 après avoir refusé de passer un de ces tests. La ligue a considéré cet acte comme un nouvel échec et une 3ème récidive et a décidé de le bannir de la ligue. Sans Tarpley, les Mavs sont tombés en 22-60 à la fin de la saison 1991-92 et il était clair qu’une reconstruction complète était nécessaire, mais ils ont choisi une très bonne année pour échouer…
Dans une draft 1992 débordante de talent, les Mavs doivent entamer le début de leur reconstruction. Avec des pivots aussi prometteurs qu’Alonzo Mourning ou Shaquille O’Neal, le moment semblait idéal pour relancer la franchise. Mais en ayant obtenu simplement le 4ème pick de cette draft, derrière une équipe comme les Hornets terminant à 34 victoires, les texans devront se contenter de Jim Jackson, un ailier explosif avec lequel il était compliqué de bâtir les fondations d’une équipe, obtenant ainsi son premier J.
Un tanking assumé et la construction de ce trio légendaire
Les Dallas Mavericks de 92, c’était une machine à tanks comparable à celle des redoutables 76ers de 1972. Sans intention de rivaliser avec quiconque, cette équipe comportait 19 joueurs qui était pour la plupart des joueurs sans avenir dans la grande ligue. En effet parmi eux, 14 étaient des jeunes joueurs qui ne feront que quelques années en NBA, 3 autres étaient des joueurs mid qui feront une carrière tout juste convenable à l’ouest de l’Atlantique, un meneur vétéran (Derek Harper), et un jeune espoir du nom de Jim Jackson, qui ne mettra qu’une vingtaine de fois les pieds sur les parquets en raison de divergences contractuelles entre le joueur et la direction.
Des divergences qui vont pousser le 4ème choix de la draft 1992 à faire une déclaration plus qu’étonnante au Seattle Times dans laquelle il explique d’une part les noeuds de ce conflit mais également le fait qu’il ne jouera jamais pour l’équipe qui l’a drafté:
Les Dallas Mavericks ne veulent pas m’offrir un contrat de 6 ans. Ils m’ont traité comme si j’étais un choix basique de la NBA. Je pense maintenant qu’il est nécessaire de mettre publiquement un terme à toutes les spéculations selon lesquelles je pourrais un jour être prêt à signer avec Dallas. Je ne jouerai en aucun cas, ni à aucun moment, au basket-ball avec les Dallas Mavericks.
Son entourage lui a bien fait comprendre que son attitude plus que gamine ne lui permettrait pas d’avancer dans sa carrière d’autant plus que tout le monde sait que les jeunes joueurs arrivent très facilement à retrouver un contrat et cela surtout quand ils sont draftés aussi haut. Après négociations, il obtiendra finalement le contrat qu’il avait prévu (22 millions de dollars sur 6 ans). Un incident qui en dit long sur la complexité du personnage. Il laissera Dallas seul et les Texans termineront la saison avec l’un des pires bilans de l’histoire, un bien pauvre 11-71.
Saison suivante, les Mavs retrouvent logiquement la loterie mais une fois encore, pas de first pick. 4ème derrière les Warriors, le Magic et les 76ers, Dallas avait pourtant le profil parfait pour obtenir ce first pick, mais c’est bien le Magic qui a fini en 41-41 l’année passée qui l’obtiendra. Pistant d’abord Chris Webber qui sera le choix d’Orlando, Norm Sonju et le Front Office opteront pour le deuxième prospect de cette draft, Jamal Mashburn. Un poste 2 qui basculera évidemment en 3, étant donné que le peu de talent qui réside dans cette ville se trouve être un autre poste 2. Dallas obtient ainsi son 2ème J.
En ce début de saison, le duo Jamal Mashburn – Jim Jackson est bien le seul à sortir la tête de l’eau. L’association fonctionne bien mais Dallas croupie toujours dans les bas-fonds de la ligue. Le nouveau coach Quinn Buckner n’a pas su apporter un vent de renouveau et sa méthode perçue comme trop dure par les joueurs, a complètement désuni le groupe Mavericks. Une méthode que beaucoup d’entraineurs de l’époque utilisaient mais lorsque vous n’avez pas le respect de par votre prestance ou vos accomplissements, il est clairement infaisable de la faire appliquer, si bien que les Mavericks commenceront avec un misérable bilan de 2 victoires pour 39 défaites.
En vrai borné, Buckner se met à dos ses 2 stars et son seul vétéran. En effet, il n’hésite pas à laisser Derek Harper sur le banc, et ce dernier commence à le descendre dans toutes ses conférences de presse. On ne sait pourquoi, le Front Office, malgré les résultats catastrophiques donnera raison à Buckner et Harper sera trader aux Knicks contre Tony Campbell. Les Mavs finiront la saison avec 13 victoires, encore une saison catastrophique qui marquera cette fois la fin de Quinn Buckner. Et pour la suite, c’est un visage bien familier qui le remplacera, Dick Motta, le tout premier coach de la franchise.
Dans ce grand schéma d’échec, deux points positifs pouvaient tout de même être tirer, le premier étant l’obtention du second pick de la draft 1994 et le deuxième est le développement des deux premiers Js qui ont eu un temps de jeu très conséquent et un bon développement, Jim Jackson : 37,4 minutes, 19,2 points, 44,5 % aux tirs, 4,7 rebonds par match, 4,6 passes décisives par match et Jamal Mashburn : 36,7 minutes, 19,2 points, 040,6 % aux tirs, 4,5 rebonds par match, 3,4 passes décisives par match.
Trois joueurs se démarquaient pour la draft de 1994, et il s’agissait de Glenn Robinson, Grant Hill, et Jason Kidd. Glenn Robinson était de loin le meilleur prospect, Grant Hill la meilleure assurance de réussite mais les Mavs étaient bien remplis sur le poste 3 et depuis le départ de Derek Harper, le poste 1 restait vacant. Le choix se tournera assez logiquement sur Jason Kidd, celui qu’on appelait le mini Magic quand nous regardions ses statistiques universitaires. Avec Kidd, les Mavs obtenaient donc leur 3ème J, et c’était donc le début de ce fameux trio, les Three J’s.
Saison 1994-1995 : l’orée du trio et la promesse d’un futur contender
Pour la première fois depuis 5 ans, l’espoir renaissait dans le nord-est du Texas. Entre la draft de Jason Kidd, le changement de coach mais aussi le retour inattendu de Roy Tarpley (en bonne santé), les fans pouvaient enfin voir la lumière au fond du tunnel. La direction avait misé en début de saison sur 25 victoires, ce qui aurait déjà conclu une belle amélioration par rapport aux 2 années passées. Libérées des systèmes absurdes de Buckner, les trois stars de Dallas se voyaient enfin libérées et étaient prêtes à tout exploser.
Les Mavs n’étaient pas géniaux mais ils jouaient avec respect. JJ et Mashburn devenaient de plus en plus efficaces dans le scoring. Kidd de son côté avait du mal de ce côté-là mais faisait littéralement tout le reste. Passeur intraitable, il organisait le jeu des Mavs à merveille et gérait la première ligne de défense de son équipe. Dallas a commencé a joué de manière très compétitive retrouvant pour la première fois un bilan positif depuis novembre 1990. Ils finiront le mois de décembre avec un bilan de 13-12.
Malheureusement fin janvier, Jim Jackson se foulera gravement la cheville marquant une fin de saison pour lui. Nous ne savions pas à ce moment que ça serait l’une des toutes dernières fois que ce trio jouerait ensemble. Après cette blessure, les Mavs vont quelque peu baisser de rythme mais cela aura au moins permis à Jason Kidd de s’affirmer dans le scoring. En co-rookie de l’année, le meneur originaire de San Francisco rayonne et finit la saison à 15 points et 8,8 passes de moyenne par match. De leur côté, Jackson et Mashburn scorent respectivement 25,8 et 24,4 points par match.
Les rôles players commencent eux aussi à s’affirmer, Tarpley retrouve un rôle central avec une moyenne de 12,4 points et 8,2 rebonds tandis que l’excellent Popeye Jones (24 ans) est quant à lui en double double de moyenne. Car la vraie force des Mavericks est bien là cette année, le rebond. Avec Popeye Jones qui était leader par le fameux Lorenzo Williams, autant vous dire qu’en face, les box outs devaient être bien sécurisés face à la 5ème meilleure équipe de la ligue à ce niveau-là.
Mais malgré tout cet espoir, l’été 1995 est plus tendu que jamais. En effet, bien que Tarpley semble avoir été calme, c’est dans ces moments de liberté que les rechutes sont les plus fréquentes pour les sportifs. Sans réel back-up pour le suppléer, l’été de la direction s’annonçait déjà chargé pour lui trouver un remplaçant digne de ce nom doté de meilleures compétences offensives que Tarpley. Mais il y avait toutes les raisons de croire que les Mavs, avec les bons mouvements pendant la pré-saison, pourraient passer à l’étape suivante, c’est-à-dire les playoffs.
Ego et histoire de coeur : les débuts de l’explosion du vestiaire Texan
Sans cap, la seule possibilité qu’a Dallas pour renforcer sa raquette est de passer par la draft, eux qui ont acquis le 24ème pick mais aussi le 12ème (issue du trade avec Rolando Blackman). Dallas devait drafter deux big men pour remplacer Williams et, peut-être, Tarpley. Pour le 12ème choix , les Mavs ont pris le pivot de Duke, Cherokee Parks et, au 24ème choix, ils ont pris le pivot d’Iowa State, Loren Meyer. Deux talents qui pouvaient largement faire le travail dans la rotation mais Dick Motta ne leur laissera jamais leur chance et ils seront tradés l’année suivante.
Pour couronner le tout, Tarpley a échoué à un test de dépistage de drogue lorsqu’il a été testé positif au début de la saison 1995-96. Tarpley a affirmé que le test positif résultait de la prise de NyQuil. Il a été suspendu et n’a plus jamais joué en NBA après la saison 1994-95. Les Mavs malgré leur problème vont bien démarrer leur saison en la débutant avec 4 victoires de rang grâce à un duo Kidd-Mashburn qui fonctionne merveilleusement bien. Mais les choses vont rapidement se détériorer.
Et oui, après une série de 4 victoires assez surprenante, la tendance va rapidement s’inverser, passant d’un 4-0 à un 8-22 à la fin de l’année 1995. Une terrible descente aux enfers qui va mettre en lumière une première rupture entre les 3 hommes. Chaque J avait un peu sa version de l’histoire mais il n’empêche que le point de rupture a commencé en décembre.
Etait-ce dû à un changement de propriétaire: les Mavs ont été vendus, en l’espace de quelques années, par leur patron de longue date Don Carter à Ross Perot Jr, qui a reconnu très tôt qu’il ne connaissait rien au basket. Etait -ce dû aux blessures : Jackson a souffert d’une grave entorse à la cheville en 1995, Mashburn n’a joué que 18 matchs lors de la saison 1995-1996 avec un genou gauche douloureux. Etait-ce changement de coach permanent et cette obstination du jeu en triangle qui a si peu marché.
Les raisons pourraient être nombreuses mais est-ce que finalement cet échec n’est pas venu des J eux-mêmes. Si ils revendiquent d’un côté avoir toujours conservé une bonne entente dans le groupe, l’impression était largement différente. Chacun semblait vouloir trouver sa voie pour devenir une star et leur entourage (famille, amis, agent) semblait davantage vouloir booster l’égo de leur petit protégé en lui répétant qu’il était le meilleur des Three Js.
Le dénouement de cette histoire est probablement venu d’une légende de la culture basket urbaine, la fameuse et prétendue querelle entre Jim Jackson et Jason Kidd au sujet de la chanteuse de R&B, Tony Braxton. Une histoire qui a fait parler toute la ligue mais qui a tellement été déformée depuis qu’il est finalement très compliqué de savoir ce qui s’est réellement passé ce soir-là. Il y avait une limousine, elle était censée venir chercher Kidd, mais Jackson a posé un lapin à Kidd pour qu’il puisse aller chercher Braxton dans la limousine, mais tous deux démentent cela aujourd’hui et le démentaient déjà à cette époque.
Nous n’aurons probablement jamais la réponse à ce mystère mais tout ce que nous savons, c’est que Kidd et Mashburn détestaient le dernier J et que les Mavs vont poursuivre leur longue descente aux enfers terminant la saison en dehors des 8 et avec un bilan misérable de 26 victoires pour 56 défaites. Les Mavs étaient prêts à garder le noyau dur et à voir où cela les mènerait en 1996-97. À ce stade, il était clair que Kidd était une star. Mashburn était un point d’interrogation à sa sortie de blessure et Jackson un joueur qui avait montré le visage d’un rookie toute la saison.
Les Mavs ont ensuite complètement raté la draft, échangeant leur 6ème choix dans l’une des meilleures drafts de tous les temps contre Eric Montross et le neuvième choix. Au neuvième, les Mavs ont pris un bon remplaçant en Samaki Walker tandis que Boston a utilisé le choix de Dallas sur Antoine Walker, ce qui n’a pas aidé à renforcer ce noyau. Ensuite Dallas a laissé au trio une durée assez courte pour se remettre dans le droit chemin, enfin il semblerait plutôt que ce soit Jason Kidd qui l’ait décidé.
Cleamons, qui avait travaillé sous la direction de Phil Jackson à Chicago, utilisait les mêmes sets que Buckner et Kidd détestait ça. Après un début de saison à 9-17, Kidd a été échangé à Phoenix le 26 décembre 1996 principalement contre Michael Finley et Sam Casell. Le patron de l’époque nous révèlera d’ailleurs qu’il était en conflit permanent avec Jackson et que l’histoire ne pouvait pas aller plus loin.
Le 7 février 1997, les Mavs ont embauché Don Nelson pour diriger l’organisation. Sa première tâche a été de faire le ménage. Il a échangé Mashburn à Miami contre des débris et des débris le 14 février 1997. Jackson a été échangé trois jours plus tard dans le cadre d’un énorme transfert de neuf joueurs avec les Nets, où les Texans récupèreront notamment Shawn Bradley. Résultat le trio mythique a été transformé en Michael Finley et Shawn Bradley et ces trades ont mis un terme à l’une des histoires les plus regrettables de l’histoire des Mavericks qui devront attendre 4 ans supplémentaires pour enfin retrouver les playoffs NBA.