Recruté en juin dernier contre Cole Anthony, KCP et cinq tours de draft, Desmond Bane doit apporter le shooting qui manquait tant à Orlando la saison dernière. Comment Jamahl Mosley réussira à intégrer sa nouvelle star dans son système aux côtés de Paolo Banchero et Franz Wagner ?
L’attaque sans magie d’Orlando
Le Orlando Magic est historiquement une équipe très mauvaise offensivement, ayant fini par exemple douze fois dans le dernier tiers à l’efficacité offensive sur ces treize dernières années. Et clairement l’équipe de la saison dernière n’a pas dérogé à la règle en terminant avec le 5e pire offensive rating de toute la ligue !
Bien évidemment le souci majeur de l’équipe floridienne a été son incapacité à inscrire le moindre tir, terminant la saison avec seulement 31,8% de réussite à trois points, la pire moyenne depuis les Lakers en 2016. Autant dire qu’il n’est pas très rassurant d’être comparé à l’équipe du Farewell Tour de Kobe Bryant, surtout que le volume de tirs extérieurs n’a rien à voir entre les deux équipes puisque la ligue a bien évolué en presque dix ans.
On peut justifier cette faible efficacité au tir par le profil des joueurs associés ensemble sur le terrain. Neuf des dix joueurs ayant joué au moins 1000 minutes la saison dernière étaient à moins de 36% de réussite à trois points en carrière, qui est la moyenne générale de la NBA. Kentavious Caldwell-Pope fait figure d’exception avec son 37% de réussite de loin depuis sa draft en 2013, même s’il a connu un début de saison compliqué au tir jusqu’à la fin de l’année civile (29% sur 4,8 tentatives) avant de retrouver son réel niveau en 2025 (36% sur 4,2 tentatives à partir du 1er janvier).
Mais un joueur à lui tout seul ne peut pas faire le spacing, d’autant plus que KCP n’est pas un shooteur avec une grande gravité en raison de son volume de tir, son jeu off-ball et sa réussite historique en carrière. On l’a d’ailleurs vu en playoffs où il n’a jamais réussi à trouver de l’adresse contre les Celtics, finissant la série à 6/23 de loin. L’intéressé expliquait durant les playoffs que « Boston a fait un bon travail pour m’empêcher d’avoir la balle la plupart du temps. Quand on faisait circuler le ballon, ils étaient sur les lignes de passe, mais je pense que je dois être plus agressif, essayer de me démarquer pour trouver des tirs ouverts ».
Pour compenser le manque de tir extérieur, Jamahl Mosley a mis en place un système offensif axé sur la pression au cercle, notamment en termes de tirs pris près du panier et de rebonds offensifs. Cela leur a d’ailleurs permis de générer davantage de lancers, finissant deuxièmes au FT Rate. L’objectif était donc clair : chercher à prendre les tirs les plus rémunérateurs près du panier, que ce soit en attaque directe sur drive, ou avec le mouvement offensif.
Mais pour contrer cela, leurs adversaires n’ont pas hésité à venir surcharger la raquette, limitant un peu plus cet accès au panier, et forçant ainsi à prendre des mi-distances peu rémunérateurs. Ainsi, même si Mosley a cherché à pallier les limites structurelles de son équipe, il partait de trop loin pour espérer avoir une efficacité offensive proche de la moyenne de la ligue.
D’autant plus qu’il y a eu pas mal de blessures, que ce soit Paolo Banchero en début de saison (46 matchs joués), Franz Wagner autour de Noël (60 matchs) ou Jalen Suggs (35 matchs) qui a dû mettre un terme à sa saison en mars afin de subir une arthroscopie du genou gauche pour le soulager de douleurs récurrentes qu’il traînait depuis plusieurs semaines.
Desmond Bane, le connecteur par le shooting
Arrivé en NBA avec une étiquette de shooteur (43% de loin sur 575 tentatives en quatre saisons à l’université), Desmond Bane a confirmé qu’il l’était, tournant à 41% de loin en carrière sur presque 2000 tentatives. Mais au-delà des chiffres, il est efficace dans différents registres, que ce soit à la fois off-ball où il est un monstre sur les C&S de loin (43% de réussite en carrière) qu’on-ball où il est l’un des meilleurs joueurs de toute la ligue sur pull-up (39% en carrière), notamment en transition.
On remarque d’ailleurs qu’il prend de plus en plus de pull-up extérieurs au détriment des C&S, preuve de son développement offensif. Il n’est en effet pas un shooteur qui dépend de la création des autres, mais qui peut se créer son propre tir, notamment lorsqu’il reçoit des ballons en mouvement après des zoom actions. Il peut déclencher son tir de très loin, peu importe qui est sur lui, obligeant les défenses à se montrer agressives et offrant ainsi des espaces pour les autres grâce à la gravité qu’il crée.
Sauf que même là, on peut voir un joueur qui a progressé, notamment dans son handle, pour sortir de ce profil de shooteur pur. Bane est aujourd’hui très bon pour attaquer les closeouts, mais également pour driver sur des actions statiques, notamment lorsqu’il attaque sur sa main droite. Il a cette capacité à ne pas se limiter au tir pur, mais bien à être une menace aux trois niveaux dès qu’il reçoit le ballon.
S’il ne sera jamais un joueur mettant une énorme pression au cercle, la faute à une petite envergure et tout de même des limites dans son handle, il offre de la diversité dans son jeu. Ce n’est d’ailleurs pas étonnant que l’on ait assisté à une hausse conséquente de son usage, passant de 15% lors de son année rookie à 29% en 2024 lorsque les Grizzlies tankaient.

Au-delà du scoring, Desmond Bane a développé un passing game plutôt intéressant. Il a montré qu’il pouvait être intéressant pour ressortir la balle sur des drive-and-kick ou même en transition où il était super dans le jeu rapide des Grizzlies. Pour autant, il n’est pas non plus un playmaker d’élite, la faute à une taille et une vision de jeu qui le restreignent sur demi-terrain. Il a tout de même montré quelques passages intéressants sur PnR ces deux dernières années dans le Tennessee qui laissent penser qu’il pourrait apporter à la création sur certaines séquences.
L’intéressé lui-même ne nie pas qu’il est un joueur assez complet offensivement. Il y a quelques semaines, lors du Media Day, il expliquait notamment que « C’est en quelque sorte ce que les dernières années avec Memphis m’ont appris : peu importe la situation, je serai capable d’avoir un impact ».
Pas étonnant que son transfert en Floride ait été célébré non pas uniquement par les fans, mais également par tous les observateurs de la Grande Ligue.
Quel va être son rôle dans l’attaque d’Orlando ?
Récupéré en juin dernier contre KCP, Cole Anthony et 5 first-round (dont un pick swap), Desmond Bane arrive avec le statut de joueur qui doit en quelque sorte révolutionner l’attaque morose floridienne.
Par sa simple présence, l’ancien guard de Memphis devrait améliorer le spacing de sa team, lui qui est capable d’assumer un plus gros volume offensif que KCP. On l’a vu dès le premier match en présaison avec une feinte de PnR pour Banchero et un stagger à l’opposé pour offrir un tir ouvert à Bane.
Cela pourrait être particulièrement efficace sur transition, un aspect où le Magic manquait de solutions par le passé. Ses pull-up rapides pourront être létaux, lui qui était dans le 96e centile en termes de points par match sur fastbreak la saison dernière parmi les joueurs ayant joué au moins 30 matchs. Nul doute que Mosley exploitera au maximum les qualités de son nouvel arrière. Il expliquait durant le training camp que « Ma consigne, c’est juste : sois toi-même. Et sur le terrain : espace le jeu, prends les bons tirs, prends des décisions rapidement et défends fort. Car c’est ce qu’on fait ici ».
D’autant plus qu’il est un bon passeur en mouvement, en particulier lorsqu’il sort d’un écran, que ce soit sur un pindown ou une zoom action. Il pourrait notamment débloquer davantage le passing de Paolo Banchero, et plus globalement le jeu du 1er choix de la draft 2022. Si ce dernier a longtemps été critiqué pour son inefficacité offensive (moi le premier), on peut également nuancer les propos en expliquant qu’il a été surutilisé offensivement, ou du moins un peu trop responsabilisé à la création offensive de sa franchise.
L’arrivée de Desmond Bane pourrait lui permettre de développer son passing sur short-roll, quelque chose qu’il n’a jamais réellement montré sur ces trois saisons dans la Grande Ligue. Il était par exemple dans le 10e centile en fréquence de touches de balle inférieures à 4 secondes l’année dernière. Et on a déjà pu voir en présaison que l’ancien prospect de Duke était utilisé différemment, même si cela demande encore du développement.
Par ailleurs, si Franz Wagner a montré qu’il s’était bien développé la saison dernière, l’arrivée de Bane devrait lui permettre de gagner en efficacité au scoring, lui qui semble avoir modifié sa forme de tir durant l’été et qui sort d’un EuroBasket très réussi (21 points, 6 rebonds et 3 assists en 27 minutes).
Plus globalement, l’arrivée de Desmond Bane va permettre de décharger les deux stars offensives du Magic en étant le playmaker secondaire de l’équipe lorsqu’il est sur le parquet, voir même l’initiateur dès qu’il sera aligné avec la seconde unit. N’oublions pas que le Magic était la 10e pire équipe au pourcentage de ballons perdus la saison dernière. Jamahl Mosley ne s’y trompe pas puisqu’il déclarait cet été au micro de NBA TV que son nouvel arrière a « non seulement la capacité de shooter, mais aussi de créer son propre tir. C’est également un bon playmaker ».
L’arrivée de Desmond Bane peut-elle permettre à Orlando de rêver grand à l’Est ?
Dans une conférence Est plus qu’affaiblie en raison des blessures de plusieurs stars (coucou Tyrese Haliburton et Jayson Tatum) et de projets compétitifs qui arrivent à leurs termes (coucou Philadelphie et Milwaukee), le Magic fait figure de place forte derrière Cleveland et New York.
La franchise floridienne a sûrement l’un des meilleurs mercatos en récupérant Bane. Une opportunité de marché assez incroyable permise par la radinerie des propriétaires de Memphis qui refusent de payer la taxe. Ce move est d’autant plus intéressant qu’il s’inscrit au bon moment dans le projet d’Orlando puisque la rookie extension max de Paolo Banchero ne va kicker que l’été prochain. C’était le moment parfait pour faire un trade aussi important, surtout que la contrepartie envoyée est loin d’être aussi équivalente, du moins à court terme.
Même si cela peut faire grincer des dents de se séparer de quatre premiers tours non protégés pour un arrière de 27 ans qui n’a jamais été All-Star, on peut tout de même le nuancer en disant que ce seront des picks de fin de premier tour. D’autant plus que le Magic n’est plus dans une phase de reconstruction, et cherche à être compétitif dès à présent malgré la jeunesse de ses stars.
C’est à nous de déterminer la valeur de ces choix de Draft, nous parions sur nous-mêmes. Nous pensons que nous allons être une bonne équipe et, l’autre aspect unique dans le fait qu’un joueur comme Desmond soit devenu disponible, c’est qu’il va à peine avoir 27 ans. Donc, si nous devenons une bonne équipe, alors nous espérons le rester pendant longtemps. En espérant garder ce groupe sous le maillot du Magic durablement. C’est ce qui déterminera la valeur de nos choix de Draft et c’est ce que représente la NBA : parier sur soi-même, se mettre la pression et élever ses standards.
Jeff Weltman, président des opérations basket, via Orlando Sentinel
Avec cette arrivée, les dirigeants sécurisent leur Big Four (Sugg-Bane-Wagner-Banchero) pour les quatre saisons à venir. Avec 168 millions de salaires cumulés en 2029, ils représenteront certes environ 85% du salary cap, laissant peu de flexibilité financière. Pourtant ce move reste intéressant puisqu’il offre également au front office la possibilité d’avoir un ou plusieurs assets à échanger si une superstar venait à être disponible sur le marché.
Toute la question sera maintenant de savoir quel sera le pivot à associer à ce quatuor. Si Wendell Carter Jr semble être destiné à être le cinquième titulaire du Magic, il est loin de faire l’unanimité, la faute à un tir extérieur qui peine à se développer et une défense pas aussi bonne que les attentes que l’on pouvait avoir au moment de sa draft. Goga Bitadze a été très intéressant sur quelques séquences, mais des questions se posent quant à la viabilité avec les autres titulaires.
Moritz Wagner et Jonathan Isaac pourraient également être des solutions, pourtant elles présentent certaines limites également. Le premier est actuellement en train de se remettre d’une rupture des ligaments croisés au genou gauche, et semble être prédestiné à un rôle en sortie de banc en raison de l’intensité qu’il apporte dès qu’il est sur le parquet. Tandis que le second a montré des limites dans sa capacité à réitérer les efforts, lui qui n’a joué que 276 matchs en 8 saisons NBA.
Avec la signature de Desmond Bane, Orlando s’offre le luxe d’avoir constamment au moins un All-Star ou potentiel All-Star sur le parquet. Et dans une conférence Est assez faible sur le papier, Orlando a toutes ses chances de créer la surprise. Si l’arrière parvient à électriser l’attaque floridienne comme il a dynamité les défenses à Memphis, Orlando pourrait enfin retrouver sa magie.