Est-ce que le Paris Basketball peut déjà rêver de playoffs dès sa première saison en Euroleague ? Crédit : Herve Bellenger via Getty Images
Est-ce que le Paris Basketball peut déjà rêver de playoffs dès sa première saison en Euroleague ? Crédit : Herve Bellenger via Getty Images

Comment le Paris Basket domine l’Europe ?

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Sur une série de 8 victoires consécutives, le Paris Basket trône fièrement en tête de l’Euroleague. Mais comment cette jeune équipe innove-t-elle pour arriver à cela ?

Une défense d’élite

Si le club de la capitale s’est installé sur le trône de l’Europe, c’est avant tout grâce à sa défense d’élite. Depuis le début de la saison, le Paris Basket est la 3e meilleure défense d’Euroleague, et même la meilleure sur les huit derniers matchs !

Cela s’explique avant tout par le fait que Tiago Splitter a mis en place des schémas en hedge visant à être très agressif sur les porteurs de balle. Cela permet ainsi de forcer les stars adverses à faire circuler le ballon, les empêchant de pouvoir s’exprimer librement. Le PBB est d’ailleurs la 5e meilleure équipe au turnover percentage provoqué, preuve que cette stratégie est une réussite.

De plus, on peut voir une réelle volonté chez les Parisiens de ne pas concéder un seul tir ouvert. Cela se matérialise notamment sur les close-out où ils n’hésitent pas à se jeter sur le moindre shooteur ouvert, cherchant de cette manière à faire baisser sa réussite. Il est d’ailleurs intéressant de noter que les adversaires de Paris ne tirent qu’à 31,1% de loin, soit la 3e plus faible moyenne d’EL.

On pourrait alors se dire qu’ils concèdent dès lors plusieurs lignes de drives complètement ouvertes, or ce n’est pas du tout le cas. Paris est en effet une défense très organisée collectivement, avec énormément de rotations afin de protéger le cercle. C’est d’ailleurs la 7e meilleure équipe d’Euroleague en termes d’efficacité au panier accordé. L’objectif est ainsi très clair : empêcher l’équipe adverse d’être ouvert sur des spots rémunérateurs.

« On doit être plus alerte et plus agressif de ce côté-là du terrain (en défense). On doit mieux réussir sur les close-out. Le basket est un jeu de close-out. On doit aussi être plus intelligents sur notre manière de défendre, en s’adaptant aux joueurs qu’on a en face, si c’est un shooter, s’il a plutôt l’habitude de partir à droite ou à gauche, on doit faire attention à tous ces détails avec tout le staff. »

Tiago Splitter, après le match contre La Rochelle

Il faut mettre en avant les progrès réalisés depuis le début de la saison, concernant la défense du hedge. La défense du point-of-attack est notamment meilleure pour rester accrochée aux porteurs de balle adverses, facilitant ainsi le travail pour les joueurs qui doivent protéger le cercle. L’envergure et la mobilité de ces derniers est notamment très efficace pour gérer les situations de 4vs3 ou 3vs2, ce qui est un réel avantage !

Cette défense collective se matérialise également du côté de la gestion des switchs défensifs. En effet, l’équipe compte dans ses rangs plusieurs joueurs qui peuvent souffrir sur switch, ce que n’hésitent pas à attaquer les autres équipes d’EL. Or, pour contrecarrer cela, Splitter n’hésite pas à demander beaucoup de switch off-ball – surtout des post switch ou scram switch – dès qu’il y a un mismatch, en particulier avec TJ Shorts.

Malgré cette réussite visible, cette défense est encore loin d’être parfaite. En raison de ce système très agressif, Paris est l’une des équipes qui concède le plus de lancers (14e sur 18 au FT rate adverse) et de rebonds offensifs (14e au pourcentage de rebonds offensifs adverse). Ce dernier point est souvent le résultat du switch concédé, qui offre à l’intérieur adverse un avantage physique en cas de rebonds.

Le collectif parisien fonctionne à merveille sur ce début de saison. Crédit : Julie Dumélié via Getty Images
L’intensité défensive de Paris détonne en Euroleague. Crédit : Julie Dumélié via Getty Images

Une attaque up-tempo difficile à suivre

S’il y a bien quelque chose à retenir visuellement de l’attaque parisienne, c’est bien le rythme de jeu proposé. Les hommes de Tiago Splitter n’hésitent pas à courir constamment en transition de manière à trouver des tirs ouverts très rapidement. Ils possèdent cette saison la 3e pace la plus élevée d’Euroleague (73,1 possessions par match), ce qui représente une hausse au classement par rapport à la saison dernière où ils étaient 10e sur 20 en EuroCup (74,4) et 12e sur 18 en Betclic Elite (71,8).

On peut voir également que c’est une équipe qui prend énormément de tirs à trois points (43% de leurs tentatives, soit la 5e fréquence), surtout sur pull-up. En effet, les joueurs prennent beaucoup de tirs en premières intentions, n’hésitant pas à insister de loin malgré leurs échecs. Ce n’est d’ailleurs pas surprenant si le Paris Basket est devenu l’équipe à prendre le plus de tirs lointains sur une rencontre (52) face à la défense en zone de l’ALBA Berlin.

Pourtant, le PBB ne possède que la 12e efficacité lointaine d’Euroleague avec un très moyen 34,8%. Au-delà de la réussite, ce volume de tir à trois points permet de créer une menace suffisamment importante pour ouvrir les lignes de drives. C’est également une réponse aux nombreux stunts adverses sur les porteurs de balles parisiens puisque 72% de leurs tirs à trois points sont pris à 45 degrés.

Pourtant Paris est loin d’être une équipe stéréotypée en attaque. Au contraire, il y a énormément de mouvements off-ball et une superbe occupation de l’espace (géométrie du terrain) qui crée des casse-têtes aux coachs adverses. On le voit notamment sur les nombreux Iverson cut qui permettent de créer un premier décalage off-ball, amplifié ensuite par la force de drive et de pull-up des joueurs de la capitale.

Car oui, c’est une équipe qui prend également beaucoup de tirs près du cercle (45% de leurs tentatives selon 3steps) avec 30,3 tentatives par match, soit le 5e plus haut total en EL. Pourtant, si l’efficacité n’est pas bonne (55,2%, soit la 3e pire efficacité), cette stratégie n’en reste pas moins intéressante, car cela reste des paniers rémunérateurs qui permettent également d’obtenir des lancers. On peut néanmoins regretter le manque de réussite extérieure qui, dans ce cas précis, permet aux adversaires de venir surcharger dans la raquette, rendant ainsi compliquées les finitions au panier.

L’attaque parisienne repose énormément sur la créativité de ces arrières. Il y a dès lors un mouvement de balle qui est assez pauvre comparé aux autres équipes (dernier à l’assist percentage), mais qui permet néanmoins de réduire les pertes de balles (2e plus faible turnover percentage derrière Monaco).

C’est une volonté assez claire de la part de Splitter qui, si elle a ses avantages, présente également quelques inconvénients. C’est notamment le cas en fin de match quand ces créateurs sont justement sur-responsabilisés et ciblés par la défense adverse. Ce n’est d’ailleurs pas étonnant si on a vu Shorts avoir un peu plus de mal en fin de match contre le Panathinaikos par exemple.

Fun fact : Paris n’a que le 13e offensive rating dans le quatrième quart-temps cette saison !

La communion entre les joueurs et le KOP Parisii après la victoire contre le Zalgiris Kaunas. Crédit : Herve Bellenger via Getty Images
La communion entre les joueurs et le KOP Parisii après la victoire contre le Zalgiris Kaunas. Crédit : Herve Bellenger via Getty Images

La création offensive dans les mains des leaders

Cela n’a échappé à personne, mais TJ Shorts évolue cette saison à un niveau MVP, alors même qu’il ne joue que sa première saison en Euroleague (18,1 points et 7,8 assists en 27 minutes). Le meneur macédonien montre soir après soir qu’il est tout juste l’un des meilleurs joueurs d’Europe sur pick-and-roll. Il possède en effet un excellent handle qui lui permet d’accéder aisément à la raquette (paint touch), créant alors des décalages dans la défense adverse. Il est d’ailleurs le joueur qui crée le plus de points par match cette saison !

On peut certes lui reprocher un certain manque d’efficacité au scoring, notamment en raison de sa maladresse près du panier (54% de réussite ; 39e centile) et de son irrégularité à trois points. Pourtant, il est excellent pour provoquer des lancers, notamment en coupant la course de son défenseur, et ainsi obtenir des points faciles sur la ligne (malgré un faible 65% de réussite aux lancers).

En réalité, sa plus-value se porte surtout sur sa création pour les autres, où il montre depuis de nombreuses saisons qu’il est manipulateur de défense excellentissime. C’est un playmaker hors-pair dans la gestion des prises à deux pour faire la skip pass dans le corner opposé malgré sa petite taille. Il a d’ailleurs très peu de déchets compte tenu de sa responsabilité offensive. Ainsi, parmi les joueurs à minimum 25% d’usage, TJ Shorts est le meilleur au ratio de playmaking !

THREAD : TJ Shorts, petit par la taille mais grand par le talent

Lukas (@lukas-fkw.bsky.social) 2024-11-22T15:20:22.364Z

En sortie de banc, Nadir Hifi est doucement en train de monter en puissance. Si son efficacité au scoring laisse encore à désirer (91 de TS+, soit -9% d’efficacité par rapport à la moyenne), il n’en reste pas moins un joueur important grâce au punch offensif qu’il apporte. Il est en effet une véritable menace sur pull-up qui force les défenses à monter sur lui, malgré une réussite qui laisse encore à désirer (32,1%). Car au-delà de cet aspect, le volume qu’il prend représente une menace, d’autant plus qu’il est loin d’être un mauvais shooteur en carrière. On a d’ailleurs vu qu’il n’avait pas peur de prendre ces tirs, comme contre Berlin où il a fini à 7 sur 19 de loin.

Le meneur tricolore est dernièrement de plus en plus agressif vers le cercle, où il possède un assez bon handle pour être une menace sur drive. Ce n’est pas encore un réel point fort pour lui au plus haut niveau européen, mais cela reste tout de même une arme fatale à surveiller sur la suite de la saison. On peut néanmoins lui reprocher son manque de playmaking pour les autres, d’autant plus qu’il n’est pas encore assez efficace au scoring. Et son physique le limite grandement dans la défense off-ball, même s’il est plutôt intéressant pour défendre le point-of-attack grâce à la puissance du haut de son corps et à sa mobilité latérale.

Son association avec Maodo Lo pose néanmoins quelques questions concernant la compatibilité entre les deux. Il n’y a pas pour le moment de réelle alchimie lorsqu’ils sont ensemble sur le terrain, en jouant encore un peu trop chacun leur tour. Ils ont néanmoins réalisé un bon passage ensemble dans le 2e quart-temps lors de la victoire contre la Virtus Bologne. À voir désormais s’ils confirmeront cela dans les semaines à venir.

TJ Shorts et Nadir Hifi, les deux hommes forts du projet parisien. Crédit : Maison Transversale via YouTube

Des rôle-players excellents dans leurs missions

Derrière TJ Shorts, Mikael Jantunen est sûrement le joueur le plus régulier depuis le début de saison. Le finlandais a notamment montré qu’il pouvait sanctionner efficacement les stunts sur les créateurs parisiens, lui qui tourne à 43,1% à trois points sur 4,3 tentatives par match. En défense, sa mobilité latérale ainsi que sa taille (2,04m) et son envergure en font un élément essentiel de la réussite collective.

Son association avec Tyson Ward est très intéressante à observer, puisque ce dernier est le véritable couteau-suisse de son équipe sur les postes extérieurs. L’ailier américain excelle notamment dans la circulation des écrans, sans oublier qu’il utilise à merveille son envergure pour contester les shoots adverses et switcher sans offrir de mismatch. Cette polyvalence se remarque également en attaque, où il est utilisé à la fois en spot-up shooter et en screener, même s’il gagnerait à être plus efficace (-8% d’efficacité au scoring par rapport à la moyenne).

Kevarrius Hayes est quant à lui l’une des recrues les plus sous-estimées du mercato parisien. L’ancien intérieur de l’ASVEL affiche un profil défensif très intéressant à la fois en hedge et en drop, offrant de nombreuses diversités à son coach (3e au nombre de stocks par match). Si en attaque il est loin d’être un passeur hors pair sur short-roll, son activité aux rebonds représente une réelle plus-value à son équipe. Attention tout de même à ses fautes qui peuvent être problématiques par séquences.

Dans un tout autre registre, Collin Malcolm est également l’un des joueurs les plus sous-estimés de la réussite parisienne. En sortie de banc, l’arrière-ailier américain apporte une très bonne défense on-ball grâce à sa puissance physique et à sa mobilité latérale. Il est également un atout de poids dans le jeu de transition du PBB, lui qui est efficace à la fois près du panier et derrière la ligne à trois points.

Enfin, le duo Léopold Cavalière et Bandja Sy apporte une réelle plus-value sur de courtes séquences grâce à leurs envergures et à leurs mobilités qui permettent au Paris Basket de proposer des schémas encore plus agressifs. Cela permet notamment d’apporter pas mal d’intensité défensive avec beaucoup de rotations, tout comme pas mal de transitions, ce qui change de Leon Kratzer.

Le collectif parisien fonctionne à merveille depuis le début de saison. Crédit : Herve Bellenger via Getty Images

Est-ce que cela peut durer sur l’ensemble de la saison ?

C’est une réflexion que l’on a déjà entendue la saison dernière en raison du style de jeu parisien qui se veut très intense, mais donc très énergivore. Si l’année dernière cela leur avait réussi, on peut tout de même s’interroger sur la réussite de cette stratégie cette saison. En effet, avec la gestion de l’Euroleague et du championnat, le PBB va inévitablement jouer davantage de matchs. Mais il est intéressant de voir que le club est déjà dans la gestion en Betclic Elite, ouvrant davantage les rotations pour justement faire souffler les joueurs majeurs.

Paris est cette saison l’équipe qui réalise le plus de changements de joueurs par match, une stratégie qui fait écho à ce que faisait déjà l’année dernière Tuomas Iisalo. Sauf que, contrairement à son prédécesseur, Splitter n’hésite pas à alterner les cinq sur le terrain, là où le finlandais mixait davantage entre titulaires et remplaçants. Si cela semble fonctionner pour le moment, il faudra voir comment le tacticien brésilien s’adaptera dans les moments plus compliqués.  

Sur les huit derniers matchs, les adversaires du Paris Basket ne shootent qu’à 25,8% à trois points. Si la stratégie mise en place vise bien évidemment à réduire au maximum cette réussite, il convient tout de même de dire que cette maladresse ne tiendra pas sur l’ensemble de la saison. D’ailleurs, lors de sa dernière défaite contre le Bayern, les hommes de Gordon Herbert avaient shooté à un excellent 42,4% à trois points, sans que les parisiens ne trouvent la parade.

Par ailleurs, le manque de spacing pourrait bien faire défaut à cette équipe. On le voit notamment avec le cinq majeur qui excelle certes défensivement, mais qui apporte beaucoup plus de questionnements en attaque. La sur-responsabilisation des créateurs, et notamment TJ Shorts, pourrait être un point sur lequel les adversaires appuieront. On se souvient par exemple que le Fenerbahçe avait fait déjouer Monaco en playoffs la saison dernière en réduisant l’impact de Mike James.

Annoncé de retour début novembre en début de saison, Daulton Hommes n’a pour l’instant toujours pas repris la compétition officielle. Le club n’a pas communiqué depuis sur l’évolution de la santé de l’ailier américain, qui, on le rappelle, avait connu une saison quasi-blanche l’année dernière en raison d’une blessure au genou gauche en mai 2023. L’ancien joueur de Baskonia pourrait avoir un réel apport à cette équipe en raison de son excellente adresse à trois points (42,1% de loin durant la saison 2022-2023).  

Paris a déjà dépassé toutes les attentes de début de saison en étant leader de l’Euroleague après la 12e journée. Si David Kahn se voulait mesurer sur les attentes sportives, nul doute que le club commence à rêver grand. À voir maintenant s’ils parviendront à garder cette cadence dans les semaines à venir, eux qui auront deux gros chocs contre l’Olympiacos et le Fenerbahçe au mois de décembre.

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