Le All-Star Game est le rendez-vous de mi-saison où la NBA fait son show. Plus qu’un match d’exhibition, c’est aujourd’hui un week-end entier de divertissement et de promotion de la ligue. Dans cet article, on remonte le temps pour découvrir les origines de cette rencontre et pourquoi c’est en particulier l’année 1951 qui voit naître cet événement.
Contexte
Nous sommes donc au début des années 50, la NBA n’en est encore qu’à ses balbutiements. Le championnat nord-américain est à des années-lumière de ce qu’il est aujourd’hui. Pourtant, on y pratique déjà un basketball essentiellement, voir intégralement, basé sur le pick n’roll. Les écrans s’enchaînent en quantité incalculable, tout comme les coups. Les hommes sont brutaux, les fautes pleuvent, les bagarres sont monnaies courantes, les techniciens adeptes du beau jeu trop peu nombreux.
Voici en substance l’ambiance qui règne dans le white-basketball à ce moment-là, cette ère préhistorique où les athlètes noirs commencent à peine a être autorisés à se mêler aux blancs. George Mikan, domine avec son physique et sa technique largement au-dessus du lot et Joe Fulks vient tout juste d’inventer le jump-shot (à deux mains). Chez les meneurs, seul Bob Cousy et Bob Davies sont capables de poser des dribbles dans le dos ou faire des passes spectaculaires en contre-attaque.
Plus généralement, la NBA se cherche et cherche son public. Si les Royals, les Knicks ou les Lakers offrent un jeu agréable pour l’époque, pour le reste de la ligue c’est plus compliqué. On sort d’une saison où 17 équipes sont engagées dans la course au titre. Beaucoup de ses franchises sont médiocres et disparaissent aussi vite qu’elles ne sont apparues. En 1951, il ne reste plus que 11 d’entres elles, avec le même souci, se trouver une audience. La NBA n’est que la cinquième roue du carrosse, le baseball, le football, la NCAA, la boxe sont plus populaires qu’elle.
Le basketball n’est pas un sport majeur, et quand il est plébiscité c’est par le biais du tournoi NCAA. Les fans et observateurs ne montrent pas de grands intérêts pour le monde professionnel et cette rugueuse NBA. Les Knicks n’ont accès au Garden que 18 fois, le reste du temps ce sont les universitaires qui occupent ce lieu mythique. Cependant, un événement change la donne et offre une opportunité à la NBA de gagner en renommée.
Le scandale du Point Shaving
En 1950, le pari sportif connaît déjà une grande popularité. Une des variantes préférées des flambeurs et de miser sur les scores. C’est ainsi que des joueurs universitaires sont approchés et payés pour influencer le résultat de certaines rencontres. Cette pratique se nomme le point shaving, et cela est un scandale retentissant dans le monde de la NCAA, mais aussi dans tout le pays.
L’image du College basketball prend un sérieux coup et le public commence à bouder cette compétition. Les salles déprogramment les matchs et libèrent de la place pour la NBA. Des joueurs pros comme Alex Groza ou Ralph Beard se voient être bannis à vie pour leur implication dans cette triche lorsqu’ils évoluaient à Kentucky. La grande ligue montre patte blanche, et se débarrassera de tous ceux qui ont trempé de près ou de loin dans ces affaires.
Toute l’organisation NBA se rassemble pour savoir comment profiter de cette aubaine et siphonner de l’audience à la NCAA. Nous sommes dans les années 50, une réunion avec tout le staff est en réalité une discussion entre deux personnes. Puisque la NBA c’est uniquement, le commissionnaire Maurice Podolloff et son directeur des relations publiques Haskell Cohen ainsi que quelques secrétaires.
Toutefois, ils ne sont pas seuls puisque Walter Brown, propriétaire des Boston Celtics, est également présent. C’est Haskell Cohen qui suggère d’imiter la MBL (ligue de baseball), et de créer un All-Star Game. Podolloff, n’est pas très convaincu par cette idée. Ce n’est pas le cas de Walter Brown qui propose d’accueillir le match des étoiles à Boston afin que tout se passe au mieux. Cependant, son engagement et son enthousiasme n’effacent pas les inquiétudes.
Une semaine avant la rencontre il est question de tout annuler. On craint que le public ne boude ce match, on a peur qu’il ne s’enflamme pas pour ce spectacle. Le All-Star Game du baseball est jugé ennuyeux bien que soit le sport numéro un, alors pourquoi il en serait autrement avec le basketball. Maurice Podolloff est fébrile, il veut arrêter les frais, mais bien lui en a pris de ne pas le faire.
All-Star Game, le succès
Le niveau inégal de la NBA cache un secret, cette ligue est composée de joueurs formidables. Grâce à ce match d’exhibition, le grand public peut s’en rendre compte. C’est même mieux que cela, puisque la foule s’est présentée en masse et ce sont 10 094 personnes qui assistent au premier rendez-vous des étoiles. Les deux équipes ne vont pas les décevoir, la rencontre est un succès.
Le format East Vs West est déjà de rigueur, chaque effectif est composé de 10 joueurs. La sélection de l’ouest est grande favorite, avec l’ogre Mikan dans ses rangs, rien de plus normal. Pourtant, ce n’est pas le géant à binocles qui l’emporte. La conférence Est gagne sur le score de 111 à 94. George Mikan finit avec un faiblard 4 sur 17 aux tirs, la défense de ses opposants a été collective et parfaitement exécutée.
Son adversaire Ed Macauley en profite pour être nommé MVP du match. Un titre remis à « Easy Ed » seulement trois ans plus tard ! Les organisateurs de l’événement n’ont pas un court instant imaginé accorder un prix au meilleur joueur de la rencontre. Haskell Cohen, et l’unique personne à se demander s’il ne faut pas donner un cadeau aux participants. Podolloff accepte à condition que cela ne dépasse pas les 2,25 dollars par tête. On pense d’abord à une bague ou une médaille, c’est au final une télévision qui est offerte. On note également la présence d’Alex Groza, pas encore exclu de la NBA, un de ceux par qui le scandale arrive est ironiquement un des acteurs de cette première historique.
Ed Macauley apprend rétroactivement qu’il est MVP de cette première édition avec trois ans de retard, mais ce n’est rien en comparaison de l’obtention de son prix. C’est pendant une interview à la radio qu’un journaliste est stupéfait d’entendre qu’aucun trophée ne lui a été remis. La NBA est contactée, et finalement le Hall of Famer peut soulever celui-ci lors d’un banquet organisé à Saint-Louis 52 ans plus tard ! Mieux vaut tard que jamais.
Pendant des années ce match devient une véritable vitrine pour la NBA. De nos jours, il a un peu perdu de sa superbe. Pourtant, il est pendant longtemps le moment où les stars peuvent révéler leur talent aux yeux du grand public. La rencontre est engagée et la ligue a tout à gagner avec cet événement hors compétition. Les trophées, les récompenses ne sont que secondaires, on cherche à montrer que la NBA c’est le haut niveau. Avec le temps, nul besoin de le prouver encore et encore. L’intensité laisse place au divertissement, au désarroi des fans qui regrettent le manque d’investissement des joueurs, malgré les primes importantes aujourd’hui proposées.
Merci