Tyrese Haliburton, Jayson Tatum, Damian Lillard. Trois gros noms fauchés par une rupture du tendon d’achille durant les dernier playoffs et comme souvent une même question : faut-il raccourcir la saison ?
Ça y est, la saison NBA 2024-2025 est terminée. Même si elle a été marquée de nombreuses surprises et rebondissements, elle a surtout été entachée par les blessures. Qu’elles soient longues ou courtes, en saison régulière ou en playoffs personne n’a été épargnée.
Par conséquent de plus en plus de joueurs et de fans réclament des aménagements, passant par une réduction de matchs. Mais, pour la NBA, pas question de toucher aux 82 matchs par saison pour plusieurs raisons, notamment traditionnelles et économiques.
Une augmentation inquiétante des blessures
Depuis plusieurs saisons, la NBA fait face à une véritable épidémie de blessures, touchant aussi bien les stars que les role players. Cette saison n’a pas été épargné et de nombreux joueurs ont eu de grave blessures notamment en playoffs avec trois rupture du tendon d’Achille.
Damian Lillard, Jayson Tatum et Tyrese Haliburton ont été touchés et, sauf miracle, ils ne devraient pas fouler les parquets la saison prochaine. De quoi lancer des “what if” sur un autre potentiel champion NBA qui aurait pu être désigné si tout le monde avait pu jouer à 100%.
Lillard : crédit :Stacy Revere, Getty Images
Tatum : crédit: Vincent Carchietta-Imagn Images
Haliburton : crédit : Matthew Stockman, Getty Images
Lors de la deuxième année de la politique de participation des joueurs de la NBA (Player Participation Policy), les stars sont en passe de manquer plus de 1 000 matchs cette saison, avec une augmentation de 24 % des matchs manqués par les stars par rapport à la même période l’an dernier.” selon Tom Haberstroh pour Yahoo! Sports.
Les joueurs ont raté 686 rencontres pour blessures, contre 507 en 2023 du début de saison. Soit une augmentation de 35% en un an sur la période du début de saison jusqu’au mois de novembre.
Seuls onze joueurs cette année ont disputé les 82 matchs de saison régulière. Seulement 169 d’entre eux ont passé la barre des 65 rencontres nécessaires pour être éligible aux récompenses de fin de saison, soit environ 36% de la ligue.
Cette tendance montre bien que la plupart des joueurs manque une grande partie de la saison soit pour cause de blessure soit par fatigue tout simplement. Avec quasiment quatre matchs par semaine et avec de longs road-trip cela use les joueurs petit à petit.
“Aujourd’hui, avec un match tous les deux jours, la journée sans jouer est une journée de repos… J’aime ce que fait la NBA, mais personne ne m’écoute quand je suggère une saison plus courte”, déclarait Steve Kerr en 2024.
Mais alors comment expliquer cette augmentation ? Car même si ces problèmes de calendrier ne datent pas d’hier, cela n’explique pas totalement les raisons de pourquoi les joueurs se blessent de plus en plus.
Une chose à changer ces dernières années : l’intensité des matchs. Les joueurs n’ont jamais autant couru. Selon le graphique juste au dessus l’ensemble des joueurs de la ligue couraient un peu moins de 1300 miles (2092,147 km) dans les années 80 contre plus de 1500 (2414,016 km) aujourd’hui.
Si on ramène cela individuellement, un basketteur en NBA courait en moyenne 4.45 km par match dans les années 80 comparé à 5.13 km aujourd’hui. Une différence de 0.68 km qui paraît anodine mais si l’on compte sur l’ensemble des 82 rencontres de la saison cela représente plus de 56 km, soit plus qu’un marathon.
Les raisons qui poussent la NBA à maintenir une saison longue
Le format de 82 par saison reste ancré dans l’ADN de la NBA depuis sa création. Si l’on change celui-ci c’est toute une floppée de records qui ne pourront plus être battus, des calculs de stats sur la durée qui devront être changés, une méthode de comparaison qui sera difficile entre les époques.
Changer cela s’est changer tout un système auquel propriétaires, joueurs et fans sont habitués depuis plus de 50 ans. Si on touche au nombre de matchs, comment battre le record des Warriors de 73-9 ? Celui de Westbrook avec 42 triples-doubles en une saison ? Comment rattraper les records sur les stats (points, rebonds, passes…) avec moins de matchs au terme d’une carrière ? Cela soulève beaucoup d’interrogations qui divisent.
Or, la principale raison pour laquelle la NBA refuse de réduire le nombre de matchs reste économique. Chaque rencontre génère des revenus significatifs, que ce soit via la billetterie, les droits TV, les sponsors ou la vente de produits dérivés. Plus on retire de matchs, plus la ligue risque de perdre de l’argent et c’est un risque qu’elle ne veut pas prendre déjà que les audiences sont en baisse, -28% cette année selon ESPN.
L’argent entre en ligne de compte, c’est évident. Nous sommes une entreprise. Cela dit, je ne vois pas vraiment l’intérêt de réduire le nombre de matchs. On disait autrefois que cela permettrait de réduire le nombre de blessures. Nous n’avons absolument aucune donnée qui le confirme » nuançait Adam Silver juste avant les Finales NBA.
Mais pourquoi 82 matchs ? A l’époque ce qui rapportait le plus était la vente de billets et il y avait d’autres ligues concurrentes à la NBA (NCAA, ABA, ABL) c’était donc un moyen d’inonder le marché. 82 matchs était vu comme le compromis idéal entre revenus et repos des joueurs selon ce podcast de Basket USA.
Or les besoins d’aujourd’hui ont changé, que ce soit au niveau des joueurs et même des revenus qui proviennent majoritairement des droits TV aujourd’hui comme on peut le voir avec le récent deal de 76 milliards de dollars conclu avec Prime Video, Disney+ et NBC.
Réduire ou élargir le calendrier causerait également d’autres problèmes dont la NBA aimerait bien se passer. Avec un calendrier sportif américain surchargé : NFL, MLB, NCAA, MLS, la ligue ne souhaite pas empiété sur les autres au risque de perdre des parts de marché.
Les alternatives étudiées et les perspectives d’évolution
Nul doute que le format de 82 matchs était peut-être le plus adapté à l’époque. Mais les temps changent, le jeu évoluent et il faut s’adapter à celui-ci. Des tentatives pour éviter les blessures ont pourtant vu le jour mais en vain comme la Player Participation Policy.
Cette loi effective depuis la saison 23-24 avait pour objectif d’éviter le load management, c’est-à-dire d’éviter de reposer les meilleurs joueurs de son équipe certains soirs, afin qu’ils arrivent en forme pour les playoffs. Une solution qui devait être juste, entre santé des acteurs de ce sport et rentabilité pour la ligue.
Pourtant après deux saisons cette règle stricte ne porte pas ses fruits et est plus un échec qu’autre chose : “Au début de la saison 2023-2024, les stars ont foulé le parquet plus souvent que lors des saisons antérieures. […] À la pause du All-Star Game, les absences ont commencé à exploser. En mars, la participation des stars est passée sous la barre des 70 %.” selon Yahoo Sport.
Et cette saison, comme on l’a déjà vu, la situation est similaire. Les stars ont loupé plus de matchs à partir du All-Star Game. D’autres méthodes ont été mises en place afin de trouver un équilibre comme les 65 matchs d’éligibilité pour les distinctions de fin de saison.
Là aussi compliqué de dire si cela a été efficace, au final les joueurs récompensés sont les plus en forme plutôt que les meilleurs. Est-ce que Jared McCain méritait le titre de Rookie de l’année avant sa blessure ? Très certainement. Est-ce que Victor Wembanyama était DPOY à l’unanimité avant sa thrombose veineuse ? Évidemment. Malheureusement pour eux le seuil de match n’a pas été respecté, bousculant ainsi tous les autres candidats plus haut.
La ligue privilégie pour l’instant l’optimisation du calendrier (moins de back-to-backs, gestion des déplacements). On parle aussi de réduire la présaison et de terminer la la saison légèrement plus tard sans empiéter sur les autres compétitions, laissant ainsi plus de repos aux équipes.
Une autre idée est de réduire la durée des matchs de 48 à 40 minutes. Une idée validée par LeBron James dans son podcast : Un match de 40 minutes est intrigant. Les matchs vont tellement vite, et il n’y a pas de période d’adaptation dans un match international. Ça donne un sentiment d’urgence un peu plus fort. Donc c’est quelque chose dont on pourrait discuter. Ce serait difficile, parce qu’une fois qu’on commence à toucher à l’histoire du jeu… Mais c’est un sujet qui peut aussi être mis sur la table”
Quand on voit le “big 3” des Sixers cette saison, on ne peut rien espérer quand l’équipe n’arrive qu’à les alignés 15 fois ensemble en 82 rencontres alors que pourtant ce n’est pas le talent qui manque. Pareil à l’époque des Nets en 2021 : Kevin Durant, Kyrie Irving et James Harden n’ont joué que 16 matchs ensemble.
Aujourd’hui, on a l’impression que c’est l’équipe qui arrivera avec le moins de blessés en finale qui gagnera et pas la meilleure ce qui peut être frustrant. Quand on voit le potentiel de certaines équipes et même de certains joueurs gâchés par les blessures, on ne peut pas s’empêcher de se demander ce que ça aurait été si tout le monde était en forme.
Les blessures font partie intégrante du sport quoi qu’il arrive mais il faut préserver un maximum les artistes. Alors si une réforme de la NBA permet ça il faut le faire dès que possible afin de profiter des talents le plus longtemps possible.