Restricted free agent cet été, les Bulls pourront s’aligner sur toutes les offres afin de conserver Josh Giddey. Mais avec sa fin de saison en feu totale, quelle est la réelle valeur de ce joueur atypique ?

Une fin de saison en boulet de canon

Arrivé durant l’intersaison en échange d’Alex Caurso, on ne peut pas dire que l’arrivée de Josh Giddey ait été célébrée en fanfare par les fans de Chicago. L’Australien sort à ce moment-là d’une saison très compliquée à OKC, tant sur le terrain qu’en dehors, qui l’a vu perdre sa place dans la rotation de Mark Daigneault seulement trois ans après sa draft. Il réalise néanmoins une bonne compétition lors des JO 2024 à Paris (17,5 points, 7,8 rebonds, 6,0 passes, mais 5,0 turnovers) qui laisse présager de belles choses du côté de l’Illinois.

Pourtant le début de saison est loin d’être idyllique. Alors qu’il se remet d’une rupture d’un ligament de la cheville – survenue en fin de rencontre du quart de finale perdu par l’Australie – Giddey connaît un début de saison compliqué.  Celui qui arrive dans un tout nouvel environnement a du mal à trouver sa place au sein d’un effectif qui peine à remporter des matchs. L’ancien d’OKC affiche alors toujours les mêmes limites que celles observées depuis le début de sa carrière. On se dit alors que Chicago a largement perdu le trade avec la franchise de l’Oklahoma, surtout que dans le même temps Alex Caruso s’épanouit dans sa nouvelle équipe.

Mais la saison de Giddey prend un tout autre tournant au moment du départ de Zach LaVine. Son coach Billy Donovan décide alors de le responsabiliser davantage en faisant de l’Australien une pierre angulaire du système offensif (très rapide) des Bulls. Associé sur le backcourt à Coby White, le sosie (non-)officiel de Timothée Chalamet prend alors une toute nouvelle dimension.

C’est simple, le joueur se métamorphose complètement, enchaînant les triples-doubles soirs après soirs (6 triples-doubles sur les 12 derniers matchs). Il tourne d’ailleurs à partir de ce moment-là à 20,2 points, 9,5 rebonds et 8,3 assists de moyenne jusqu’à la fin de saison. On a également le droit à des moments spectaculaires, dont cette fin de rencontre exceptionnelle contre les Lakers où Giddey enchaîne une interception décisive, et surtout inscrit un buzzer beater du milieu du terrain qui fait exploser le United Center !

Dans son sillage, Chicago se remet à gagner, finissant la saison régulière 9e de l’Est avec 39 victoires, soit autant que la saison dernière, alors même que les Bulls devaient être en rebuild sur la deuxième partie de saison. Pourtant cette éclaircie ne sera que de courte durée, puisque l’équipe de Giddey s’incline lourdement au play-in contre Miami, pour la troisième année consécutive.

Un scoreur vraiment efficace ?

Ce n’est une surprise pour personne, mais Josh Giddey est un joueur historiquement (très) inefficace. Pourtant cette saison, le joueur se situe presque au niveau de la moyenne de la ligue (99 de TS+), et se situe dans le 58e centile parmi les point guard à l’eFG% ! Faisons un profil rapide de son scoring.

Il est un joueur qui n’arrive pas à faire une grande différence en raison de son manque d’explosivité sur son premier pas. Cela le limite dans sa capacité à accéder facilement au cercle, malgré sa grande taille pour un ball-handler (2,03m et 203cm d’envergure). Or même quand il essaie d’accéder au cercle, il n’a pas une très bonne efficacité (58% ; 31e centile à son poste) en raison d’un manque de puissance du haut du corps qui l’empêche d’absorber le contact, mais aussi d’un toucher plus que discutable dans ses finitions.

Il faut tout de même mettre en avant ses progrès dans la provocation de lancers, lui qui cherchait auparavant à tout prix à éviter le contact. Il reste néanmoins un joueur qui se repose encore assez peu sur sa menace au cercle, privilégiant à l’inverse son floater qu’il a su développer pour en faire une arme importante. Il tourne par exemple à 48% sur les tirs au short-mi-distance, a.k.a. la zone des floaters (75e centile).

La shotmap de Josh Giddey cette saison. Crédit : Basketball Index
La shotmap de Josh Giddey cette saison. Crédit : Basketball Index

Concernant le shooting, on peut dire que Giddey a fait d’énormes progrès par rapport à ses débuts dans la Grande Ligue. Il tourne par exemple cette saison à 38% à trois points sur 4 tentatives par match. Pourtant les défenses ne sont pas encore ajustées pour autant, n’hésitant pas à lui laisser de l’espace pour prendre ces tirs extérieurs. Ces adversaires n’hésitent pas à passer sous les écrans sur pick-and-roll, lui laissant la place de pull-up de loin, sans pour autant être vraiment efficace. Il était tout de même à 36% sur les pull-up à trois points cette saison, contre 26% sur ses trois premières années à OKC, mais il reste tout de même majoritairement un shooteur en catch-and-shoot.

Au-delà de l’efficacité, qui est à nuancer en raison du petit volume et de l’espace que les défenses lui laissent, le problème de Giddey est qu’il n’est pas une menace suffisante au tir pour avoir de la gravité via son tir extérieur. Les défenses ne le craignent pas réellement puisqu’elles savent qu’il prendra peu de tirs extérieurs, permettant ainsi à ses défenseurs de dézoner afin de venir en aide.

Néanmoins, s’il y a bien un point sur lequel Josh Giddey est très bon, c’est bien par sa capacité à être efficace aux rebonds offensifs. Au-delà de sa taille, qui est bien évidemment un avantage, l’Australien possède un très bon sens du jeu qui lui permet d’anticiper les trajectoires, et ainsi bien se placer pour capter un tir manqué par un coéquipier, et donc dès lors scorer de nouveau.

L’Australien est surtout reconnu pour sa capacité à faire des différences sur transition, où il peut exploiter à merveille ses qualités techniques. Giddey se projette très rapidement vers l’avant, lui permettant de s’offrir des paniers rapides pendant que la défense se replie, comme en exploitant les mismatchs provoqués par ces situations d’urgences où il peut finir en coast-to-coast.

Mais au-delà du scoring, il y a un aspect en particulier que Giddey exploite à merveille sur transition, à savoir son passing.

Malgré une bonne saison au shoot, Josh Giddey doit encore prouver qu'il peut devenir une menace sérieuse et récurrente de loin. Crédit : Michael Reaves via Getty Images
Malgré une bonne saison au shoot, Josh Giddey doit encore prouver qu’il peut devenir une menace sérieuse et récurrente de loin. Crédit : Michael Reaves via Getty Images

Est-il vraiment un passeur d’élite ?

Comme évoqué précédemment, Josh Giddey est un joueur qui apprécie particulièrement le jeu en transition. Il a notamment cette capacité à très vite analyser le jeu dans ses situations rapides afin de faire le bon choix, et notamment de trouver un partenaire démarqué. Il s’épanouit d’ailleurs dans le système de Billy Donovan, qui mise particulièrement sur le jeu rapide, faisant de ces Bulls l’équipe avec la 2e pace la plus élevée de toute la ligue et la 8e fréquence de transition.

Mais pour ce qui est du jeu placé, le constat est différent.

Giddey est un joueur qui possède un vaste arsenal au passing. Sa taille est un réel avantage pour lui permettre de se créer des angles de passes qu’il utilise plutôt bien. Pourtant s’il a montré des flashes très intéressants, avec quelques passes spectaculaires, et qu’il possède bien évidemment ce sens pour chercher à faire briller ses coéquipiers, on ne peut pas non plus dire qu’il est un joueur faisant régulièrement des lectures d’élite. Il n’est pas un destructeur de défense via son passing, mais plutôt un joueur qui réagit plutôt bien aux mouvements de la défense adverse sur drive.

On le voit par exemple être énormément responsabilisé sur PnR, où il peut faire des différences. Mais pour autant, il ne sera sûrement jamais un joueur d’élite en raison d’un handle qui le restreint pour l’instant, même s’il faut tout de même noter les progrès au cours de la saison. Il apprécie tout particulièrement les skip pass vers le corner opposé pour punir les aides depuis le côté faible.

Les chiffres de playmaking de Josh Giddey cette saison. Crédit : Basketball Index
Les chiffres de playmaking de Josh Giddey cette saison. Crédit : Basketball Index

Mais s’il y a bien un problème dans le passing de Josh Giddey, c’est bien son penchant à perdre un trop grand nombre de ballons. L’Australien tourne en carrière à presque 3 turnovers par rencontre, alors même qu’il n’est pas un ball-handler dominant comme peuvent l’être des James Harden, Trae Young ou Cade Cunningham. Il tourne par exemple cette saison à 16,1% de turnover percentage (15e centile), soit sa deuxième pire moyenne en carrière depuis son année rookie.

Au-delà du handle, ce déchet dans la passe s’explique par la propension de Giddey à être beaucoup trop dans la recherche de la passe (ce que j’appelle la Rajon Rondo aigu) et à ne pas toujours faire les bons choix. En réalité, l’Australien n’est pas ce joueur qui va disséquer une défense par ses lectures, mais il pourrait plutôt l’amplifier par son bon sens du jeu.

Or dans les faits, ce n’est pas un passeur en mouvement. On ne l’a presque jamais vu exploiter son passing sur short-roll, lui qui est un très mauvais poseur d’écran. On a davantage affaire à un passeur assez statique sur demi-terrain, qui va privilégier la création par PnR pour créer des décalages plutôt que les amplifier.

C’est d’ailleurs un point sur lequel il va devoir progresser s’il veut passer un step-up. C’est en devenant un meilleur joueur en mouvement que Giddey pourra réduire ses déchets, et au contraire exploiter encore davantage sa bonne compréhension du jeu.

Une défense qui intrigue toujours

On ne va pas tergiverser longtemps : oui Josh Giddey est un mauvais défenseur sur l’homme. Trop lent face à des extérieurs ball-handlers et pas assez physique face à des ailiers plus costauds, c’est un joueur qui peut être facilement ciblé par les coachs adverses. Un problème récurrent depuis sa draft.

Pour compenser cela, l’Australien cherche à être malin, notamment en utilisant son envergure pour intercepter dans les mains de ses adversaires directs ou en venant en aide sur stunt. Ce n’est pas un joueur qui va être très agressif sur le porteur de balle, mais qui va plutôt chercher à réaliser l’action malicieuse.

Pour autant, il reste un joueur à cacher en défense car il n’a pas non plus cette vista défensive qui lui permettrait de réaliser ces actions spectaculaires tout au long d’une rencontre. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il défend la plus grande majorité du temps sur le moins bon extérieur adversaire, de préférence sur les shooteurs stationnaires. Cela lui permet d’ailleurs de pouvoir venir en aide sur la contestation de tir au cercle, où il a montré quelques flashes depuis le début de sa carrière, sans pour autant être excellent non plus dans ce domaine.

Il a également défendu à plusieurs reprises sur des shooteurs en mouvement, où son manque de rapidité s’est clairement fait exploser. D’autant plus qu’il n’est pas très bon pour circuler dans les écrans, explosant régulièrement aux contacts des intérieurs adverses. Il a également quelques absences off-ball où il lui arrive de concéder des cuts baselines assez grossières.

Tout cela fait de lui un joueur qui est régulièrement ciblé par les coachs adverses. Il a tout de même montré quelques progrès par rapport à sa dernière saison à OKC, mais il reste une liability pour son équipe de ce côté du terrain. La dimension collective est tout de même à prendre en compte dans son évaluation, lui qui évolue dans une équipe de Chicago qui a régulièrement pris l’eau en raison d’un effectif qui manque de joueurs efficaces en défense.

Quelle est la situation contractuelle de Josh Giddey et Chicago ?

Bien qu’il dispose de certaines qualités offensives, Giddey a d’autres compromis qui font de lui un joueur assez atypique autour duquel l’équipe doit se construire. Mais c’est peut-être justement là tout le problème de son profil. Et s’il n’était pas possible de lui trouver une place dans une équipe compétitive ? Non pas qu’il soit un mauvais joueur, loin de là même, mais il parait très compliqué de lui trouver une place, à moins qu’il parvienne à se réinventer en super connecteur de luxe, tout en progressant dans sa défense off-ball pour devenir un très bon protecteur de cercle secondaire.

Maintenant que cela est dit, on peut tout de même se demander à quel montant les Bulls vont prolonger leur pépite australienne. Car oui, il paraît hautement improbable que le front office de Chicago ne cherche pas à prolonger son jeune joueur, surtout au vu de sa deuxième partie de saison.

Si on regarde au niveau des joueurs de sa draft qui ont déjà prolongés, on peut voir que Jalen Green a été prolongé pour 35 millions la saison pendant trois ans, soit environ 20% du salary cap. Franz Wagner a quant à lui pris en moyenne 45 millions sur cinq ans (25%), tandis que Jalen Suggs a un contrat dégressif de 150 millions sur cinq ans, avec un salaire passant de 23% du cap la saison prochaine à 12% en 2030.

Si chaque situation est bien évidemment unique, et dépend de la situation individuelle du joueur, de son équipe et du marché, on peut s’imaginer que Josh Giddey soit prolongé vers un montant similaire à celui de Jalen Green mais sur une plus longue durée. Cela pourrait représenter 170-175 millions sur cinq ans (en moyenne 34-35 millions de dollars la saison), soit environ 20% du salary cap. Cela serait une belle preuve que Chicago tient à son jeune joueur, surtout quand on se rappelle que ce dernier avait connu une fin d’aventure compliquée du côté d’OKC.

Actuellement, la masse salariale des Bulls est à 135 millions pour la saison prochaine. Avec une prolongation de Josh Giddey à environ 35 millions, cela mettrait les Bulls au-delà du salary cap, fixé à 155 millions de dollars, tout en restant sous la luxury tax, qui est quant à elle fixée à 188 millions. Plus concrètement, cette prolongation prise seule permettrait à l’équipe de l’Illinois de conserver son jeune joueur, sans pour autant devoir payer la taxe. Un dernier aspect très important à prendre en compte quand on sait que Chicago n’a payé que deux fois la taxe – en 2013 et 2016 – depuis la saison 2002-2003 (pas merci Jerry Reinsdorf).

Si cette prolongation serait sûrement intéressante pour Chicago afin de lui laisser la possibilité de montrer son niveau sur plusieurs saisons, elle va néanmoins dépendre de l’intérêt que porteront les autres franchises à Josh Giddey. Car avec sa seconde partie de saison, nul doute qu’il a éveillé la curiosité de quelques franchises qui pourraient se montrer prêtes à lui proposer un contrat proche du max pour l’attirer (39 millions et une hausse annuelle de 8%, soit 25% du cap jusqu’en 2030). Ce qui obligerait dès lors les Bulls à s’aligner dessus pour le conserver. Mais est-ce vraiment souhaitable dans ce cas-là ?

Aussi intéressante qu’était la seconde partie de saison, une construction d’équipe autour du duo Coby White et Josh Giddey sur le backcourt et Matas Buzelis dans les ailes ne vend pas non plus du rêve. Dans le roster actuel, aucun joueur ne semble être en mesure de devenir réellement une superstar d’une équipe championne. Une construction qui ne semble néanmoins pas déranger Arturas Karnisovas qui déclarait : « Il y a plusieurs structures à essayer pour gagner le titre. On peut avoir deux ou trois stars et des joueurs de complément autour ou bien on peut construire avec 9 ou 10 très bons joueurs. »

Ne manque pas un article !

Rejoins la communauté Le Roster en t'abonnant à notre newsletter !

Damian Lillard indique l'heure